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Revista SIDIC XXXII - 1999/1
Vers un nouveau millénaire. Un Jubilé d'espérance (Pages 13-15)

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Les calendriers: coup d'oeil sur la manière dont juifs et chrétiens mesurent le temps
Westerheim, Margo

 

Le calendrier hébraïque des juifs


L’origine du temps pour les juifs est la date traditionnellement admise comme le jour de la Création du monde, tel que le décrit le Livre de la Genèse. Les savants ont des avis divergents sur la date à laquelle a paru le premier calendrier hébreu écrit, mais on peut sans grand risque d’erreur attribuer son élaboration autant à la piété qu’à la pression politique.
Il était vital pour les Hébreux fervents, ancêtres des juifs, d’observer les rites religieux au bon moment. Le repérage de la nouvelle lune, du Rosh Hodesh, qui marquait le début d’un nouveau mois, était particulièrement important, car il déterminait le temps du Shabbat, du jour du sabbat, ainsi que la date de toutes les fêtes, des jours saints et des jours de jeûne.

A Jérusalem, les prêtres se rendaient sur le mont des Oliviers où, dès qu’ils avaient aperçu le croissant de la nouvelle lune, ils allumaient un feu destiné à servir de signal. Leur feu était le premier d’une série de feux que les prêtres, qui montaient la garde sur d’autres sommets du pays, allumaient les uns après les autres. Cette chaîne de signaux se poursuivait jusqu’à ce que l’annonce de la nouvelle lune ait atteint, au nord, la ville de Safed, située à 225 km (140 miles) de Jérusalem. Les signaux de feu se propageaient ainsi simultanément, comme les impulsions d’un télégraphe, jusqu’en Babylonie. Les croyants fidèles surveillaient étroitement l’apparition de ces feux afin de pouvoir accomplir les rites religieux au moment opportun.

On imagine aisément la déception du peuple lorsqu’il découvrit que des ennemis allumaient de faux signaux pour le tromper ! Plus tard, pour porter leur désarroi à son comble, les Romains interdirent aux juifs d’allumer des feux. Les prêtres de Jérusalem essayèrent alors d’envoyer des messagers spéciaux pour annoncer l’apparition de la nouvelle lune, mais cette mission étant trop longue, le mois ne pouvait pas commencer partout au même moment.
Que faire ? Les Hébreux se virent dans l’obligation d’élaborer une méthode sûre pour mesurer le temps. Il fallait une méthode écrite, pour que les prêtres et les croyants n’aient plus à se fier à des feux ou à des messagers. Avec un calendrier écrit, le moment de l’apparition de la nouvelle lune et du commencement du mois serait commun à tous les prêtres et croyants.

Les prêtres-astronomes hébreux se mirent au travail. On pense que le calendrier hébreu de la période qui a précédé l’exil à Babylone était luno-solaire, mais on n’en sait guère plus. Selon certains savants, c’est vers 586 avant notre ère que les Hébreux auraient commencé à utiliser le calendrier babylonien qui les aurait fortement influencés. Il est certain qu’il existe des analogies dans le nom de certains mois et le principe fondamental du calendrier. Si les Hébreux adoptèrent le calendrier babylonien, il semble qu’ils aient ajouté à sa conception quelques observations importantes leur permettant de mesurer le temps avec beaucoup plus d’exactitude. Il est significatif de noter que le calendrier hébreu est toujours en usage aujourd’hui, alors que le calendrier babylonien n’existe plus que dans les livres d’histoire.

Les jours et les semaines.
La journée juive commence et se termine au coucher du soleil, de sorte que sa durée varie au gré des saisons. On pense que si les Hébreux ont fixé le début du jour au coucher du soleil, c’est en raison du verset biblique “Dieu appela la lumière ‘jour’ et la ténèbre il l’appela ‘nuit’. Il y eut un soir, il y eut un matin : premier jour”. D’après le récit de la Genèse, Dieu a créé le monde en six jours et, le septième, il s’est reposé. Les Hébreux ont appelé le septième jour Shabbat, ce qui signifie jour de repos. Et le shabbat juif, jour mis à part pour honorer Dieu, est devenu le pivot autour duquel la vie et la piété juive se sont articulées. La semaine de sept jours est devenue une mesure constante du temps, établissant le retour régulier du shabbat. Et cette mesure a non seulement fixé le rythme de vie des Hébreux et de leurs descendants, mais aussi marqué la vie de millions de chrétiens et de musulmans.

Le respect que les juifs portent au shabbat est si grand que lorsqu’il arrive qu’il coïncide avec d’autres fêtes juives, c’est toujours à lui qu’est donnée la priorité. D’ailleurs, il est significatif de constater que les autres jours de la semaine sont désignés par un chiffre: premier jour, deuxième jour, et ainsi de suite. Le seul jour de la semaine qui soit jugé digne de porter un nom est le septième jour, le shabbat, jour de Dieu.


L’annee synchronisee.
Le calendrier hébreu synchronise les années lunaires et les années solaires. Chaque cycle de dix-neuf ans comporte douze années ordinaires et sept années “bissextiles”. Les années “bissextiles” sont les troisième, sixième, huitième, onzième, dix-septième et dix-neuvième année du cycle. Dans les temps anciens, les observations des prêtres-astronomes de Jérusalem déterminaient la longueur des années. Plus tard, les observations ont cédé le pas aux calculs pour déterminer si l’année était ordinaire ou “bissextile”. La succession des années ordinaires et des années “bissextiles” a été fixée après l’adoption des réformes de Hillel.

Le nombre de jours par an varie de 353 à 385, parce que le calendrier hébreu tient compte à la fois du calcul du temps et des obligations religieuses. Les années se répartissent, selon leur durée, en six catégories: les années ordinaires régulières (de 354 jours), défectives (de 353 jours) et pleines (de 355 jours) et les années “bissextiles” régulières (de 384 jours), défectives (de 383 jours) et pleines (de 385 jours). Pendant les années défectives, le mois de Kislev est raccourci d’un jour et, pendant les années pleines, c’est le mois de Heshvan qui est allongé d’un jour.

Si les variations de la durée de l’année sont aussi compliquées, c’est en raison de la nécessité de fixer la date de deux grandes fêtes, Yom Kippour (le jour du pardon) et Rosh Hashanah (le nouvel an juif). On considère qu’il vaut mieux ne pas laisser Yom Kippour, jour de jeûne, tomber la veille ou le lendemain d’un shabbat et il est interdit que Rosh Hashanah coïncide avec le shabbat. Pour fixer la date du premier jour de Tishri (le début de l’année juive), on modifie la durée de l’année précédant ce mois. C’est en ajoutant ou en retranchant un jour à l’année qui précède le 1er Tishri que l’on peut fixer comme il convient la date de Rosh Hashanah, c’est-à-dire le début de l’année qui suit. Nisan, le mois de la Pâque, marque toujours le commencement de l’année civile et agricole qui était jadis déterminée en fonction de la maturité de l’orge.

Certains juifs observent un cycle de sept années, la septième année étant une année dite “sabbatique”. Autrefois, cette année était marquée par la mise de la terre en jachère, la libération des esclaves et l’annulation de toutes les dettes. Au terme d’un cycle de sept fois sept ans, soit une “semaine d’années sabbatiques”, était célébrée une année jubilaire. Une autre obligation venait s’ajouter aux obligations propres à l’année sabbatique: celle de restituer les biens à leurs propriétaires d’origine.


Les calendriers julien et grégorien du christianisme


L’ère chrétienne commence par la date admise comme étant celle de la naissance de Jésus Christ. La vie des premiers chrétiens étant réglée par le calendrier julien de Rome, ces derniers adoptèrent l’année romaine qui se composait exactement de 365 1/4 jours et était divisée en douze mois, et conservèrent le nom et la durée de chaque mois. Ce qu’ils changèrent, c’est la date du commencement, en calculant le temps à partir de la naissance de Jésus et non à partir de la fondation de Rome. Lorsqu’ils adaptèrent le calendrier julien à leurs besoins, ils apportèrent un autre changement en instituant la semaine de sept jours. Ce désir de suivre une semaine de sept jours leur était inspiré par le récit de la Création et par l’obligation de célébrer le shabbat. Ce qui est curieux, cependant, c’est qu’ils aient donné aux jours de la semaine des noms apparemment plus influencés par les divinités teutoniques pré-chrétiennes que par la Bible (1). [NDT: dans les langues romanes, il s’agit plutôt, en dehors du dimanche (le jour du soleil, devenu le jour du Seigneur) et du lundi (le jour de la lune), des divinités romaines: Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne.]

Le calendrier julien avait la réputation d’être très exact, puisque les prêtres-astronomes de Rome l’avaient mis au point, avec l’autorisation de Jules César, cinquante ans seulement avant la naissance du Christ. Le calendrier que les premiers chrétiens adaptèrent à leurs besoins avait donc déjà été ajusté afin d’accorder le vieux calendrier lunaire avec l’année solaire. Même ainsi, toutefois, il n’était pas aussi exact qu’on l’avait espéré. Il s’avéra qu’il dépassait le temps réel de onze minutes quarante secondes chaque année. Cette différence peut paraître insignifiante et, pourtant, cette erreur de quelques minutes représentait un jour entier tous les 128 ans.

Au fil des ans, le problème fut régulièrement soulevé sans qu’on lui trouve de solution. En 1582, le calendrier julien présentait un décalage de dix jours par rapport à l’année solaire et le Pape Grégoire XIII demanda que l’on recherche le meilleur moyen de le réformer. Pour conduire cette recherche, il recruta parmi l’élite des érudits, prêtres, savants et astronomes et ceux-ci élaborèrent un calendrier qui mesure le temps avec une grande exactitude. Les réformateurs grégoriens procédèrent à un ajustement minime mais extrêmement important, en calculant quelles devraient être les années bissextiles. Ils décidèrent que ces années interviendraient tous les quatre ans, à l’exception de trois années sur quatre siècles se terminant par 00. Par exemple, l’année 1600 était une année bissextile et les années 1700, 1800 et 1900 des années ordinaires. L’année 2000 serait une année bissextile. Ce subtil ajustement est la clé de l’exactitude du calendrier grégorien. C’est en l’honneur du Pape Grégoire XIII qu’on l’appela calendrier grégorien.

Les pays catholiques d’Europe adoptèrent le calendrier réformé en 1587, soit cinq ans après sa promulgation par le Pape. Les pays non catholiques manifestèrent plus de réticence à adopter un calendrier qui avait été réformé sous les auspices de l’Eglise catholique romaine et continuèrent à se servir du calendrier julien. Le gouvernement britannique mit 165 ans à adopter le calendrier grégorien et ne le fit qu’en 1752, après qu’on l’eût débaptisé et appelé Nouveau Calendrier, afin de faciliter son adoption.

Lorsque le Pape Grégoire XIII inaugura le calendrier réformé, il fallait rattraper un retard de dix jours. C’est pourquoi il déclara que le jour suivant le 4 octobre 1582 serait le 15 octobre 1582. Le pape lui-même l’ayant décrété, les catholiques acceptèrent ce changement sans sourciller. Il n’en fut pas de même en Grande-Bretagne. En 1752, lorsque le parlement britannique décida d’adopter le Nouveau Calendrier (ou calendrier grégorien), le calendrier julien avait onze jours de retard sur l’année solaire. Voilà pourquoi le parlement britannique dut prendre un décret stipulant que le 2 septembre 1752 serait en fait le 14 septembre 1752.

Si l’usage du Nouveau Calendrier (le calendrier grégorien) se répandit rapidement dans le monde, c’est parce que les Etats européens l’imposèrent à toutes leurs colonies. Son adoption fut plus lente en Asie. Le Japon l’adopta en 1873, l’Egypte en 1875, la Chine en 1912, la Turquie en 1917 et l’URSS en 1918. La Grèce fut le dernier pays européen à le faire, en 1923. Les gouvernements britannique et japonais ont gardé l’habitude de dater les documents officiels d’après l’année de la monarchie en cours, mais se servent du Nouveau Calendrier (ou calendrier grégorien) dans l’administration civile.

Le calendrier julien est toujours officiellement en usage dans les Eglises orthodoxes orientales, comme les Eglises orthodoxes de Grèce, de Russie, de Serbie et de Roumanie. C’est aussi le calendrier qu’utilisent les savants et les historiens pour dater tout ce qui est antérieur à l’année 1582 de notre ère. C’est à cause de la différence entre les calendriers julien et grégorien que les jours de fête des Eglises chrétiennes ne coïncident pas en Orient et en Occident.

Le jour et la semaine.
Les premiers chrétiens adoptèrent la coutume romaine consistant à faire commencer la journée une minute après minuit. Chaque jour était un intervalle de 24 heures, entre minuit et minuit, composé d’une période d’obscurité coupée par une période de lumière. La durée de la journée était divisée en deux fractions de douze heures égales dans certains pays, et en vingt-quatre heures égales dans d’autres. La répartition de la semaine en sept jours pour mesurer le temps et observer ainsi le jour du sabbat ne fut légalisée qu’en 321 de notre ère, date à laquelle l’empereur chrétien Constantin en fit une loi.
On ne sait pas avec certitude qui a choisi les noms des jours de la semaine.
L’influence exercée sur les tout premiers chrétiens par les noms païens saute aux yeux lorsqu’on compare les désignations pré-chrétiennes et chrétiennes. Aujourd’hui, la plupart des chrétiens considèrent le dimanche, premier jour de la semaine, comme leur jour de sabbat, et c’est le dimanche qu’ils commémorent la résurrection de Jésus Christ, survenue le troisième jour après sa crucifixion. Quelques chrétiens minoritaires continuent à célébrer le sabbat le samedi, dans une stricte fidélité à la loi juive

Le mois et l’annee.
Lorsque l’on procéda à la réforme du vieux calendrier romain sous le règne de Jules César, on garda la division de l’année en douze mois mais en modifiant le nombre de jours assigné à certains mois, afin de synchroniser l’année et les cycles solaires. Or, les mois se trouvèrent de ce fait décalés par rapport à la croissance et à la décroissance de la lune. Les mois adoptés par les premiers chrétiens gardèrent les noms des mois romains, qui étaient tantôt des noms de divinités (ainsi les dieux Janus et Mars, la déesse Junon), tantôt des nombres traduisant la position des mois lorsque l’année ne se composait que de dix mois (Quintilis, Sextilis, Septembris, Novembris, Decembris).

L’année du calendrier julien est exactement de 365,25 jours et celle du calendrier grégorien de 325,24 jours. Les deux calendriers ont recours au système consistant à intercaler quelques années bissextiles dans la succession des années ordinaires, afin d’accorder au mieux l’année lunaire et l’année solaire. Les années ordinaires ont 365 jours et les années bissextiles 366.


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* Le présent article, à quelques légères modifications près, est composé d’extraits empruntés aux pages 49-55 et 66-72 de Calendars of the world : a look at calendars and the way we celebrate de Margo Westerheim, 1993,1994. Avec l’accord de Oneworld Publications, Oxford, Angleterre et Rockport, Md.
[Traduit de l’anglais par C. Le Paire]
1. Sun, Moon, Tiw, Woden, Thor, Frigg, Saturne.

 

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