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Revista SIDIC XXI - 1988/2
Le Miracle (Pages 05 - 09)

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Le miracle Juif
Armand Abecassis

 

Les événements

En 587 avant l'ère courante, le Temple de Jérusalem est détruit et les Judéens sont déportés en Babylonie: c'est l'exil babylonien.

En 536, grâce à Cyrus. les Judéens rentrent chez eux et rebâtissent leur Temple, mais sous la domination des satrapes: c'est l'exil perse.

En 333, la Judée passe aux mains des Grecs et elle est dominée par Alexandre de Macédoine et par ses successeurs pendant 200 ans: les Dia-dogues de 333 à 301, les Ptolémée de 301 à 200. et les Séleucides enfin de 200 à 140. C'est l'exil grec: galut Yawan.

Comme l'exil perse, l'exil grec présente cette particularité de se dérouler sur la Terre sainte et de ne comporter ni déportation ni destruction du sanctuaire. Mais contrairement aux Ptolémées d'Egypte qui, par fidélité à la vieille civilisation égyptienne, ne cherchent pas à imposer aux pays qu'us gouvernent la civilisation grecque, les Séleucides de Syrie s'efforcent d'unir tous les peuples qui leur sont soumis autour de la culture hellénistique. Antiochus IV Epiphane (l'éclairé), ou Epiliane fou), rencontre précisément en Judée des juifs qui, nouveaux riches, nouveaux propriétaires fonciers, nouveaux fonctionnaires d'Etat, grands prêtres et publicains, s'écartent de leurs traditions et s'ouvrent à l'hellénisme en s'y abîmant.

Face à ces Hellénistes, les petits commerçants, les prêtres inférieurs, les pauvres fermiers, les campagnards et les masses populaires restent fidèles à la tradition Iuive et hostiles aux moeurs nouvelles. On les appelle les Hassidim. Antiochus est obligé de se rendre à Jérusalem par deux fois, en 170 et en 168, pour massacrer les Hassidim, pour interdire le Shabbat, la circoncision, l'étude de la
Torah, pour ériger une statue de Zeus olympien sur l'autel et y sacrifier un porc!

Nous connaissons la splendide résistance des Hassidim qui entendent l'appel du prêtre Mata
thyahou (Matthatias) et de ses enfants depuis la petite ville de Modi'in. Nous connaissons également leurs victoires militaires et l'effort de purification du Temple, accompagné et appuyé par le miracle de la fiole d'huile. La Guémara a retenu en deux passages, dans le traité Shabbat et dans la Meguillah Ta'anit, le récit suivant:

Qu'est-ce que la fête de Hanukka?
Nos rabbins ont enseigné: « Le 25 Kislev, les jours de Hanukka sont au nombre de huit. On ne prononce pas d'oraison funèbre au cours de ces jours, et on n'y 'jeûne pas; car lorsque les Grecs entrèrent dans le Temple, ils profanèrent toutes les huiles qui s'y trouvaient; mais lorsque le pouvoir de la dynastie des Hasmonéens grandit et qu'ils battirent les Grecs, ils cherchèrent et ne trouvèrent, entreposée là, qu'une fiole d'huile qui était frappée du sceau du Grand prêtre. Elle ne contenait que la quantité suffisante pour briller pendant un seul jour. Un miracle s'y produisit, et ils purent la faire brûler pendant 8 jours. L'année suivante, ils fixèrent ces jours et les transformèrent en jours de fête, de louange et de reconnaissance »
(Shabbat 21b).

La lecture historique: le Peshat

Le Talmud se tait sur la guerre d'indépendance de la Judée menée par les Macchabées, alors que c'était une guerre parfaitement fondée et qu'elle fut couronnée par une victoire. Bien plus, pour montrer l'objectif final de cette guerre, les Macchabées se rendirent au Temple pour y réinstaller le culte en toute pureté. Ce qui a donc dressé les Hassidim contre les Syriens, c'est l'interdit jeté sur l'étude, le Shabbat, la circoncision, etc.... C'est le risque de perdre l'identité religieuse, et non pas politique, qui fut à l'origine du soulèvement des juifs fidèls et des prêtres qui les dirigeaient. Pourquoi donc le silence presque total du Talmud sur ces événements? Bien plus, les livres des Macchabées ne font pas partie du canon biblique juif, alors que le premier livre fut écrit un siècle après les événements, en hébreu et en araméen. Nous sommes obligés d'ouvrir la Bible chrétienne pour connaître l'historique de la fête! Le refus du Talmud est net et clair: « On n'a pas admis que le miracle de Hanukka soit écrit » (Yoma 29a).

En fait, les rabbins n'ont pas voulu se rendre complices d'un détournement de l'histoire. Cequ'écrit Flavius Josèphe sur la guerre des Macchabées permet de constater qu'il y eut deux périodes distinctes dans cette lutte d'indépendance et dans ses conséquences malheureuses. Il y eut d'abord le moment des 'Macchabées eux-mêmes. Ceux-ci ne pensèrent qu'à se laver les mains du sang d'une guerre, pourtant juste, en se rendant au Temple et en l'inaugurant à nouveau. Le miracle de la fiole d'huile fut une confirmation de leurs intentions et de la foi qui les animait. Pour eux, Yisre'el (Israël) était sur sa terre pour témoigner de la vie spirituelle et éthique, et non pour les victoires militaires, même s'il était obligé, pour sa survie, de gagner des guerres. Le miracle signifiait que la victoire militaire était nécessaire, uniquement parce qu'elle permettait à Israël de vivre, et de témoigner de l'éthique et de l'esprit.

Cependant, il y eut aussi le moment des successeurs des Macchabées et des politiciens qui, sous le fallacieux prétexte de l'indépendance politique exclusivement, et en se référant sans cesse aux héros de l'indépendance, conduisirent l'Etat à la décadence morale et aux dissensions politiques et sociales. Ils n'avaient alors plus rien de commun avec les résistants Hassidim des premiers temps du miracle. Tant que la domination étrangère, pendant plus de trois siècles, sous les Perses puis sous les Grecs, ne s'attaquait pas à leur religion, les Hassidim ne se plaignaient pas trop des impôts, des rançons, des pillages, des garnisons étrangères et de leur entretien. C'est seulement quand la statue de Zeus fut installée dans le Temple, quand un porc y fut sacrifié, et qu'il devint dangereux de circoncire, de respecter le Shabbat et d'étudier la Torah, que les Hassidim, et eux seuls, se révoltèrent.

Malheureusement, leur victoire et leur esprit furent confisqués par les juifs assimilés et par les Hellénistes qui détournèrent le miracle de la liberté religieuse des intentions éthiques de l'origine. Ils finirent par conduire le pays à la catastrophe. Quant aux Hassidim, ils n'eurent d'autre choix que de se séparer des Hellénistes et des dirigeants de l'époque. Ils s'isolèrent et portèrent le nom de Perushim, Pharisiens ou « Séparés ». Ce qui est remarquable, c'est que les Hassidim-Pharisiens furent les pères du Talmud et qu'ils ne voulurent pas y consigner leur guerre et leur victoire militaire contre les Séleucides. Ils voulurent marquer la postérité fidèle par le véritable miracle: celui de la fiole d'huile. Ils écrivirent alors:

« Qu'est-ce que Hanukka?... le miracle de la fiole d'huile capable de brûler huit jours ». Ce n'est donc pas le miracle de la victoire militaire.

La lecture allusive: le Rémez

On l'aura compris immédiatement: la fête de • Hanukkha nous renvoie à la dialectique permanente entre le miracle de la fiole d'huile qui permet au culte du Temple de recommencer, et le miracle de la libération de la terre occupée par l'étranger. La politique et l'éthique, l'Etat et Dieu, le peuple et Vermée: comment vivre au sein de ces couples contradictoires?

Mais une autre allusion est faite, dans l'enseignement talmudique, à ce qui semble être une précipitation et une faute des prêtres purificateurs du Temple. Ils savaient en effet que la fiole trouvée ne pouvait servir que 24 heures! Ils auraient dû attendre le septième jour pour l'allumer, et préparer pendant ce temps-là une autre huile pour la suite. Duel but poursuivaient-ils en allumant la fiole et en risquant d'interrompre la flamme, puisqu'il fallait une semaine pour préparer l'huile du candélabre?

Une autre allusion nous est fournie par la différence entre le candélabre du Temple qui était composé de sept branches et les Menorot que nous allumons aujourd'hui et qui comportent huit branches. Nous devrions fêter Hanukka en allumant, par fidélité historique, des Menorot à sept branches comme le candélabre du Temple!

Une autre allusion apparaît encore dans la durée du miracle; la fiole devait durer un jour, mais elle dura huit jours; le miracle ne s'étendit que Sur sept Purs. Pourquoi donc allumer la Menorah pendant huit jours?

Ce sont d'autres allusions (Remazim) qui permettent de découvrir derrière la problématique historique {Peshat) la problématique messianique plus générale. Il ne s'agit pas, en effet, de question politique et de question éthique simplement, mais il s'agit surtout de libération des hommes et des peuples, de libération de l'histoire par l'avènement des temps messianiques, des voies qui permettent d'accéder au monde du huit — le huitième jour —à partir du monde du sept dans lequel la Torah nous a laissés depuis le premier chapitre de la création.

Il n'est pas indifférent de remaquer que le surnom donné aux Macchabées était: Hashmona'im fles Hasmonéens), nom qui signifie littéralement: «les Huitièmistes », les hommes du huitième jour messianique. Il est curieux également de constater que le nom hébreu qui signifie «huile» est Shemen, qui est précisément le radical du chiffre huit en hébreu: Shemoneh,. Oindre une personne, verser de l'huile sur sa tète (Shémen), c'est lui reconnaître officiellement une fonction messianique qui permet de passer de la septième étape, décrite dans la Genèse, à la huitième étape du monde et de l'histoire.

La lecture interprétative: le Derash

Il nous faut à présent interpréter les informations fournies par le Peshat et les allusions découvertes par le Rémez. Il nous faut en chercher les significations profondes et définir l'expérience proprement juive d'une réalité universelle: la lumière. Or ce thème de la lumière est inscrit dans la réalité universelle, bien avant que les Macchabées ne l'inscrivent dans l'histoire juive proprement dite, à partir de leur rencontre avec le miracle grec de la lumière rationnelle.

En effet, dès le premier chapitre de la Torah, nous apprenons que la première réalité créée est la lumière: 'Or. Le rite, quant à lui, nous ordonne d'allumer la lumière de Hanukka à partir du 25 Kislev, c'est-à-dire le soir du 24, puisque le jour biblique commence la veille, à la tombée de la nuit, ainsi qu'il est écrit: « Et ce fut soir, et ce fut matin: jour un » (Gn 1,5). Or, le 24 Kislev au soir, c'est-à-dire le 25 Kislev, est exactement le temps du solstice d'hiver dans le calendrier rabbinique. C'est la période où les nuits sont les plus longues. A la fin de la fête de Hanukka, c'est-à-dire une semaine plus tard, les jours commencent à s'allonger et les nuits à diminuer. Et c'est au coeur du solstice d'hiver, au moment de l'année où l'obscurité est la plus grande, que l'on nous demande d'allumer la lumière pour proclamer qu'elle triomphe même au coeur de l'obscurité.

Le rite porte ainsi des significations fondamentales pour la société, qui s'y appuie et se perpétue par lui. C'est à l'individu à apprendre à les retrouver, en maintenant le rite vivant et en en faisant un moyen de communication du message qu'il porte. Tous les peuples du monde n'ont-ils pas un rite de la lumière qui les aide à triompher de l'obscurité? Les chrétiens ne font-ils pas naître Jésus le 24 décembre, au coeur de la nuit, veille du 25 décembre, jour de Noël? Le 25e mot du premier chapitre de la Torah n'est-il pas « 'Or ». la lumière? La 25e étape des Hébreux dans le désert. après la sortie d'Egypte, ne s'appelle-t-elle pas Hashmonah, d'où les Hasmonéens prirent leur nom? Rabbi Hanina ajoute: « C'est le 25 Kislev que le sanctuaire fut terminé dans le désert » (Valqut. Rois 1841 Et le prophète Haggaï (Aggée) rappelle que le second Temple fut terminé également le 25 Kislev (2,15).

Nous sommes ainsi ouverts à l'interprétation messianique de la délivrance, du combat c 35 fils de la lumière contre les fils des ténèbres comme le disaient les Esséniens, et de l'espérance active dans le triomphe de la lumière, alors que l'obscurité du monde est la plus épaisse et la plus longue dans la nuit du solstice d'hiver. A Hanukka nous nous prononçons, dans le rite de la lumière juive, sur l'absence de messianité de la lumière hellénistique. Car il y a la lumière qui ne connaît pas le temps, l'histoire, la mémoire. la réalité humaine véritable, et il y a la lumière qui se préoccupe d'éclairer la personne humaine, sans aucune distinction de race ni de statut social, parce qu'elle est fondée sur l'amour du prochain quel qu'il soit. Il y a la lumière du savoir, de l'objectivité, de l'efficacité, de la vérité, et il y a la lumière humaine de l'amour et du sens. Il y a la lumière, enfin, qui éclaire l'être pour connaître l'être, et il y a la lumière qui éclaire l'être, afin qu'il obtienne l'être qu'il cherche à être.

On peut vouloir, en effet, éclairer l'univers ou la société en sacrifiant les âmes individuelles que la Torah appelle « lampes de 11HWH». Quel est en effet le foyer de la lumière? Vient-elle du coeur de l'homme responsable ou de la place publique? De l'intériorité ou de l'extériorité? Les Hassidim ont choisi la lumière intérieure mais. Pharisiens, ils n'ont pas renoncé à la lumière extérieure, puisqu'ils se sont exposés dans la guerre et dans la résistance armée pour sauver la première lumière, Ils ont libéré leur territoire et fait brûler la fiole d'huile. En chacun d'eux, César a été illuminé par le miracle. Malheureusement, après eux, César a repris son indépendance absolue et s'est transformé en tyran fanatique, alors qu'il devait rester serviteur de l'éthique et de l'esprit.

Poussons encore le Midrash jusqu'à son extrème limite, là où il touche et introduit au Sod, à la lecture des Kabbalistes: Quels sont donc les processus de la lumière, de la dynamique de la libération, qu'elle soit entreprise pour l'extériorité ou pour l'intériorité? C'est de cette question que Hillel et Shammai discutent dans la Guémara (Shabbat 21b):

Nos maîtres ont enseigné: a La loi de Hanukka est l'allumage d'une seule lumière par le chef de famille pour sa famille: mais ceux qui magnifient (la loi) allument une lumière pour chacun; et pour ceux qui magnifient (la loi) davantage, l'école de Shammai enseigne:le premier jour on allume huit lumières, ensuite on diminue au fur et à mesure (jusqu'à une seule lumière le dernier jour). Mais l'école de Hillel enseigne: le premier jour on allume une lumière, ensuite on augmente au fur et à mesure (jusqu'aux huit lumières du huitième jour) ».

Les disciples de Shammai et ceux de Hillel ont donc une conception différente du miracle. Les premiers pensent que le miracle a éclaté de suite. Les prêtres-soldats ont versé l'huile dans les sept branches du candélabre et ont allumé les mèches; ils se sont aperçus au matin que le huitième de l'huile avait disparu, et non toute l'huile versée la veille. La nature de l'huile s'est transmutée et est devenue capable de fournir huit fois plus d'énergie qu'elle n'en contenait. Il faut donc allumer les huit lumières le premier jour pour signifier que le miracle fut connu dès le premier instant, dès le commencement. Le reste de l'histoire, le devenir de chaque jour, n'est donc que l'explicitation du premier jour. Tout est contenu dans l'origine, dans la matière première, dans le modèle ou dans le programme originel. Tout ce qui apparaît par la suite n'est que le commentaire, l'explicitation et le délie; loppement continu de la première réalité, qui contient en germe tous ses produits futurs.

L'école de Hillel pense au contraire au buisson ardent devant Moshé (Moise): la flamme brûlait chaque soir, mais ne consumait pas l'huile qui restait chaque pur au même niveau; la mèche brûlait sans consumer d'huile, et chaque matin, le miracle se reproduisait. C'est pourquoi, chaque soir, il nous faut allumer une lumière supplémentaire, de une à huit. C'est là une pédagogie, mais c'est aussi une conception de la transmission de la lumière. C'est surtout une métaphysique de la lumière. Le miracle est-il dans le don et dans M réception seulement? Il suffirait, dans ce cas, d'être patient en pensant que la nature du don est telle qu'il finira par produire son effet, nécessairement. Ainsi nous pourrions parfaitement suivre Shammai. et penser que le Messie est déjà venu et qu'il a donné tout ce qu'il fallait: c'est cela le miracle, ou le mystère. Il suffit à présent d'étendre à tous le don qu'il a fait. Mais rien ne sera radicalement nouveau quand l'humanité, à la fin des temps historiques, l'aura reconnu. La différence sera seulement quantitative, et pas qualitative. L'avenir est derrière, et le futur est antérieur.

L'école de Hillel, au contraire, croit que M miracle se répète à chaque instant de la vie humaine, individuelle et collective. Il faut allumer la lumière et réveiller l'autre à chaque moment, car l'allumer une fois ne signifie jamais qu'elle est reçue définitivement ni totalement. Le miracle est dans l'effort fait pour que l'homme reçoive la lumière et l'enrichisse en y ajoutant d'autres lumières, non contenues nécessairement dans l'originelle. tl est dans l'effort quotidien d'aimer, plus que dans l'amour lui-même, car rien n'est jamais là totalement et tout est à créer chaque jour.

Pour revenir au Peshat, le miracle n'était pas dans la libération du territoire ni dans l'allumage de la Menorah, mais surtout dans l'effort quotidien de réaliser la paix, la justice et l'amour sur la Terre sainte, grâce aux frontières reconnues et à la Menorah allumée. L'homme est là l'image de Dieu en ce qu'il est également créateur, et pas seulement administrateur de ce que le Créateur lui a confié.

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Si « sous le régime du soleil il n'y a rien de nouveau », au-delà du soleil, il y a du nouveau, comme disent nos rabbins, et l'avenir est absolument différent du passé, grâce aux hommes de lumière. Hanukka est le temps du miracle juif, le temps de la discontinuité, de l'abîme qui sépare les êtres, de la différence reconnue et saluée. La lumière des Macchabées est celle du modèle sur-naturel de la Loi qui dicte à l'être humain la séparation, et donc le devoir de reconnaissance de l'autre tel qu'il se livre dans son propre projet. Elle est l'espérance du fils qui abandonne le modèle naturel, et s'appuie sur le père pour le dépasser et pour ajouter au monde et à la nature ce que le père ne pouvait y fixer: l'accomplissement personnel. 4/ faut bien allumer une lumière pour chacun dans la famille: pour le père, pour la mère, pour chaque garçon et pour chaque fille.

Il nous faut donc revenir aujourd'hui à notre mémoire pharisienne définie par les Hassidim qui suivirent les Macchabées. Ce sont eux qui nous rappellent à notre conscience nationale, mais ce sont eux également, et eux uniquement, qui peuvent nous réciter les risques graves qui s'attachent aux idées de territoire, de nation et d'Etat quand elles ne sont pas limitées par la responsabilité de chacun de nous face à autrui, face à celui qui souffre, face à l'étranger et face à l'indigent. Ce sont encore les Hassidim de Hanukka qui nous apprennent comment nous ouvrir aux autres cultures et comment, en même temps, en recueillir les richesses et les valeurs qui nous permettent de mieux assumer notre mémoire et notre histoire, et de les placer à l'extrême pointe des progrès humains. Le miracle grec. en prenant place dans la conscience et dans l'actualité juives, et en y témoignant de sa valeur, y rencontre le miracle juif de la fiole d'huile qui alimente toute lumière sans jamais perdre de sa force créatrice.


Armand Abecassis est professeur de philosophie et de sociologie aux Universités de Strasbourg et de Bordeaux. Engagé dans le dialogue interreligieux et intercultu el, il est connu en France comme conférencier et comme auteur de livres et d'articles.

 

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