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Revista SIDIC V - 1972/1
La théologie chrétienne et le judaïsme (Pages 19 - 20)

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Une Théologie du Judaïsme : son opportunité pour des professeurs
M. J. Leddy

 

Le professeur consciencieux aujourd'hui est bousculé de tous les côtés. Pour être efficace, il doit travailler à l'intérieur d'un type quelconque d'institution — soit traditionnel soit moderne. En même temps, il est conscient d'une revendication croissante de la société pour « l'adaptation ». En vérité, la réalité quotidienne du professeur est quelque chose d'analogue à la tension dans l'expérience judéo-chrétienne entre le ministère institutionnel et le témoignage prophétique.

Le professeur qui se sent responsable doit accepter une tâche énorme: l'éducation de personnes en vue du « choc de l'avenir » d'un monde complexe et en mutation. En 1972, les mass media ont leurs propres « diplômés » sortis de classes sans murs et nous sommes peut-être plus attentifs aux déficiences qu'aux potentialités d'une telle éducation. Combien facilement les mass media sont devenues les professeurs du consommateur de culture, et leurs élèves sont les petits Coca-Cola qui parlent un langage international et les futurs habitants du bloc mondial d'habitation. La réaction est immédiate chez ceux qui résistent à une telle influence standard — une influence plus subtile que les aspects négatifs de l'intégration et de l'assimilation. C'est le témoignage des Noirs et des Juifs dans leur combat pour être acceptés dans leur originalité irréductible. Comment l'éducateur peut-il aider les jeunes à se développer dans la souplesse et la stabilité, dans une conscience des autres, du monde et avec un sens de leur identité personnelle?

Comment peut-on développer une maturité à la fois créative et critique?

La voie à suivre n'est pas claire, encore que les possibilités offertes sous forme de nouveau matériel éducatif et de nouvelles méthodes soient nombreuses. Un sentiment de frustration accompagne la recherche d'adaptation. Bien des choses qui ont paru être un chemin nouveau, une réponse au dilemme du temps présent, sont rapidement devenues inopportunes. Cela convenait seulement pour un certain temps, seulement en un lieu précis. Ni le poids du passé n'était reconnu ni l'avenir réalisé d'une manière prophétique. Devant cette situation, quelle promesse peut tenir une théologie du Judaïsme à partir d'une perspective chrétienne?

Une telle théologie semblerait être de quelque valeur pour les catéchistes et les professeurs de religion, pour ceux qui sont engagés dans la traduction continue des voies du Seigneur à l'égard des hommes. Cependant, même le professeur de religion peut avoir l'idée superficielle qu'il s'agit seulement d'une théologie de plus à ajouter à l'accumulation des théologies d'aujourd'hui. Un examen plus sérieux est suffisant pour nous faire réfléchir, car ce qui est impliqué est une radicale (cf. racine) compréhension du Christianisme et du mystère du salut universel. On ne peut ignorer cela qu'au prix d'une inadaptation au sens le plus profond et d'un état de non-préparation à l'Avenir Absolu.

Cependant, la promesse d'une telle théologie est encore plus étendue. Une des idées-forces essentielles de Vatican II est que la religion est liée à la vie, au monde, aussi véritablement que le Catholicisme est lié aux autres religions du monde. La communication, en même temps qu'elle n'implique pas identité, inclut des différences. Dans ce contexte, la théologie est comme une articulation des aspects les plus profonds de l'existence humaine, et, s'il en est ainsi, elle assume toutes les faces d'une véritable éducation. Ainsi, la structure essentielle de la théologie du Judaïsme reflète non seulement la comprénhension de soi par l'Eglise elle-même, mais aussi la compréhension de soi-même du professeur et également de l'élève. Comme telle, elle a des ramifications dans le projet éducatif tout entier.

Le processus d'un devenir adulte est une chose complexe, comme de nombreuses psychologies nous le montrent, et il suffit de dire que le dernier mot est encore à écrire sur ce sujet. Quoi qu'il en soit, quelques aperçus peuvent être repris pour le présent débat.

La maturité comprend une intégration unique des expériences passées et présentes de quelqu'un, une intégration qui s'effectue principalement à travers le support des autres. Le développement décisif survient quand la certitude de l'identité de chacun coincide avec la reconnaissance des autres et de l'Autre comme authentiquement distinct de soi, encore qu'en relation. C'est seulement quand la personne a atteint une certaine plénitude, et peut-être finalement est-ce une grâce, qu'elle peut reconnaître et même aimer l'autre comme une personne distincte, et pas seulement comme un miroir d'elle-même. C'est cette certitude qui est à la fois stable et souple. Tout pro-fesseur sait quelles insécurités donnent naissance aux bandes à part des cours de récréation, à la tendance à exclure « ceux qui ne sont pas comme nous », et les théologiens commencent à reconnaître que le combat de l'Eglise pour son identité a souvent obscurci la réalité vivante du Judaïsme — un peuple « pas comme nous ». Tout professeur sait combien les bandes à part peuvent retarder le développement de celui qui est dans ou hors de la bande, et l'Eglise commence à réaliser combien sa croissance a été retardée par l'exclusion du Judaïsme.

Naturellement, il reste l'enjeu, pour chaque professeur et pour chaque administrateur, d'appliquer une telle attention aux différents stades de l'éducation. Les méthodes et le matériel actuels doivent être sérieusement examinés. Au niveau élémentaire, il y a un besoin d'une approche plus concrète, tandis qu'au niveau du secondaire c'est une théorie orientée vers le social qui est adéquate. Le concept d'un curriculum en spirale, recommençant continuellement une approche de base aux différents niveaux, est crucial.

D'une manière spécifique, on peut envisager un professeur du secondaire qui développe l'histoire de la lutte des Juifs pour survivre pendant les quarante dernières années selon les lignes suggérées par C. Rijk. Si ceci semble lointain, il suffit de rappeler que l'affaire Dreyfus a eu lieu dans un pays de liberté, égalité et fraternité, et qu'Auschwitz a été réalisé dans un pays de poètes et de musiciens. Si ceci semble abstrait, on peut faire connaître Anne Frank aux élèves. Dans cette rencontre, le fossé des générations disparaît et on porte une attention aiguë sur une personne qui est à la fois une jeune du Judaïsme, vivante, et partie prenante d'une grande aventure, mais menacée par ceux qui sont devenus vieux, durs, et qui ne l'ont jamais vraiment connue.

Si une théologie du Judaïsme est inadaptée par rapport à une culture Coca-Cola, c'est peut-être que la première a été bien peu prise en considération, tandis que cette dernière est, à première vue, de peu de prix.

 

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