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Documents about the Jewish-Christian Dialogue

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Le procès et la mort de Jésus

Conseil des chrétiens et des juifs
Austrália (1994)

 

Extrait de: Rightly Explaining the Word of Truth: Guidelines for Christian Clergy and Teachers in their use of the New Testament with reference to the New Testament’s Presentation of Jews and Judaism, 1994 [Une juste explication de la parole de vérité: Directives concernant l’utilisation du Nouveau Testament par le clergé et les éducateurs chrétiens et, en particulier, la présentation néo-testamentaire des juifs et du judaïsme, 1994].

9. La mort de Jésus est d’une importance primordiale pour la compréhension chrétienne du projet divin de salut. Il n’est donc pas surprenant que, dans leurs descriptions du procès et de la mort de Jésus, les quatre évangiles nous apportent un ensemble inhabituel de précisions communes. Pourtant chacun fournit aussi, à l’évidence, des détails qui lui sont propres. Ce qui n’est pas le moins frappant, c’est le désaccord sur l’identification des personnes auxquelles est attribuée la responsabilité d’avoir amené Jésus devant Ponce Pilate. Il est également à noter que ni Luc ni Jean ne font état d’un rôle qu’aurait joué le Sanhédrin juif. Pas plus que les synoptiques ne parlent d’une participation des Pharisiens (comparer à Jean 18,3).

10. Il est impossible, à partir des données existantes, de procéder à une nette reconstitution de ce qui s’est effectivement passé, ni de déterminer précisément ceux qui ont participé aux événements. Les évangiles ne nous présentent pas les témoignages de témoins oculaires. Les éléments sur lesquels nous avons à travailler ont été transmis tout au long d’une période assez longue au cours de laquelle, dans une ambiance apologétique et polémique, l’Eglise naissante cherchait à s’affirmer dans un empire sous domination romaine et face à l’opposition d’un judaïsme viril. Ce qui est clair, c’est que Jésus a été traduit devant le préfet romain, Ponce Pilate, sous le chef de sédition contre l’empire et qu’il a été mis à mort par la méthode romaine de la crucifixion. Selon les évangiles synoptiques, cette procédure a été mise en oeuvre par des soldats romains.

11. Or - et c’est là le noeud du problème - l’histoire a acquitté les Romains et fait porter la responsabilité de la mort de Jésus non seulement à quelques juifs ( par exemple, aux chefs religieux comme le Grand Prêtre, qui étaient favorables à Rome dont ils tenaient leur charge) mais à tous les juifs. Cette responsabilité de la mort du Messie chrétien, souvent exprimée en termes de déicide, n’a même pas été limitée aux contemporains de Jésus. Elle a poursuivi tous les juifs, où qu’ils vivent, tout au long des siècles.

12. Ce transfert de culpabilité des Romains aux juifs trouve sa meilleure illustration dans un épisode que l’évangile de Matthieu est le seul à rapporter (27, 24-26). Cet épisode nous présente un Ponce Pilate, réputé pour sa corruption et sa brutalité, observant ce qui est en fait une coutume juive, à savoir le lavage des mains pour la purification de la souillure du péché (cf. Deutéronome 21, 1-9). De plus, Pilate est décrit comme se pliant aux injonctions de sujets juifs qu’il avait coutume de traiter avec dédain et qui prennent délibérément sur eux la responsabilité d’exécuter à la romaine, par la crucifixion, un prisonnier qui lui a été amené sous l’accusation de sédition contre le pouvoir romain. La proclamation de l’avènement imminent du Royaume de Dieu, élément essentiel de la prédication de Jésus, aurait alarmé les autorités romaines au moins autant que le Grand Prêtre et ses assistants. L’auteur de l’évangile accentue la culpabilité juive en assimilant les participants à «tout le peuple». C’est «tout le peuple» qui s’exclame comme un seul homme «que son sang soit sur nous et sur nos enfants» (Mt 27,25). La place de cette exclamation dans le texte de l’Ecriture lui a donné le statut d’un aveu des juifs, authentifié par Dieu, selon lequel ce serait bien eux qui porteraient la responsabilité de la mort de Jésus. Or, comme on l’a dit plus haut, les récits évangéliques eux-mêmes indiquent que l’affaire est beaucoup plus complexe.

13. Le fait de lire publiquement le récit de la Passion, du procès et de la mort de Jésus, sans expliquer certaines des questions et difficultés qu’il soulève ni le caractère hautement dramatique qu’il revêt, et de proclamer le texte sans tenir compte du contexte politique et religieux actuel, est de nature à perpétuer des attitudes qui, dans le passé, ont causé de grandes angoisses et de grandes souffrances à la communauté juive.

14. Lorsqu’on s’interroge sur la mort de Jésus, la première question à se poser est non pas qui, mais qu’est-ce qui a tué Jésus ? Ce que l’Eglise répond avec clarté, c’est qu’il est mort pour les péchés du monde selon la volonté divine. On ne saurait donner d’autre réponse sans tenir compte des problèmes évoqués ci-dessus.



Revue SIDIC 1998/1

 

 

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