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Revista SIDIC XXX - 1997/1
Le Séder pascal (Páginas 21 - 23)

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La celebration du Séder de Pâque en milieu chrétien
Centre SIDIC

 

"L'Église, chacun de nous, nos communautés, ne peuvent se comprendre et se définir qu'en relation avec les racines saintes de notre foi, et donc avec ce que signifie le peuple juif dans l'histoire, avec sa mission et sa vocation permanente ". (C. Maria Martini)

INTRODUCTION
Dans certains milieux chrétiens (groupes, communautés religieuses et paroisses) l'usage se répand de plus en plus de célébrer le repas pascal juif dans l'intention de mieux vivre et de mieux comprendre la Pâque chrétienne.
Ce dépliant propose quelques éléments de réflexion et quelques orientations pour éviter que cette pratique ne soit source d'ambiguïtés, et pour qu’elle respecte les identités juive et chrétienne.

QU'EST-CE QU'UN SEDER PASCAL?
Seder, en hébreu, signifie "ordre" et désigne l'ensemble des composantes d'un rite. Lorsqu'on parle de Seder pascal, on entend l'ensemble de la célébration-qui peut durer quelques heures- au cours de laquelle les juifs, lors de la Pâque, font mémoire et revivent en famille l'événement de leur libération d'Egypte: "Nous étions esclaves de Pharaon en Egypte, mais le Seigneur notre Dieu nous en a fait sortir, à main forte et à bras étendu. Si le Saint-béni-soit-il ne nous avait pas fait sortir d'Egypte, nous, nos enfants et les enfants de nos enfants, nous serions encore esclaves de Pharaon en Egypte" (Texte de la Haggadah).
Le moment le plus important du Seder pascal étant celui où l'on raconte comment Dieu a libéré son peuple de l'Egypte, "à main forte et à bras étendu", celui-ci est appelé aussi communément Haggadah, terme qui signifie "récit, de la racine ngd, raconter. La Haggadah est le texte le plus important de la Pâque juive, fondé sur le précepte biblique de raconter à ses enfants l'intervention de Dieu pour libérer son peuple d'Egypte (Dt 6, 20), constitué d'éléments fixes et d'éléments variables (selon les communautés de la diaspora) et enrichi de miniatures, de dessins, de chants, de commentaires et de rubriques variées.
Selon les experts, la Haggadah, telle qu'elle est connue actuellement et en tant que texte liturgique à part, fut rédigée pour la première fois vers le VIIè siècle de l'ère chrétienne. Mais si sa rédaction a été tardive, les rites et les prières qu'elle contient sont beaucoup plus anciens. Les plus importants se trouvent déjà dans la Mishna (premier recueil écrit de la Torah orale du judaïsme, qui remonte au IIè siècle), et certains remontent même à une époque pré-chrétienne. En tant que mémorial qui actualise l'action libératrice de Dieu en faveur de son peuple, le Seder a été commenté et réinterprété par les juifs de génération en génération jusqu'à nos jours.
Le texte de la Haggadah, partie centrale du Seder, fut imprimé pour la première fois en 1482, en Espagne, à Guadalajara. Les éditions se sont dès lors multipliées, faisant de ce livre une des oeuvres les plus belles, les plus riches et les plus populaires du judaïsme.

JÉSUS ET LE SEDER PASCAL
Le Nouveau Testament nous dit que Jésus était fidèle à l'observance de la Pâque, des fêtes de la Pentecôte (Shavu'ot) et des Tentes (Sukkot). En Matthieu 26, 17, on lit: "Le premier jour des azymes, les disciples s'approchèrent de Jésus et lui dirent: Où veux-tu que nous te préparions de quoi manger la Pâque?".
"Manger la Pâque" est synonyme de "célébrer la Pâque". L'expression fait allusion au moment central du rite qui est celui de l'immolation de l'agneau dans le Temple de Jérusalem et de la consommation en famille de certains de ses morceaux, en "mémoire" de l'intervention libératrice de Dieu en faveur d'Israël au temps de son oppression en Egypte.
Mais à part ces deux données -l'immolation de l'agneau et sa valeur de "mémorial"- le Nouveau Testament ne nous dit rien en fait de la manière dont on célébrait la Pâque, et il n'existe pas de sources contemporaines. De toute manière, il ne s'agissait pas d'un Seder pascal tel qu'on le célèbre actuellement, puisque celui-ci, comme nous l'avons dit, est postérieur de plusieurs siècles.
Du point de vue historique, il faut encore ajouter qu'on ne peut affirmer avec certitude, à partir du Nouveau Testament, que la dernière Cène de Jésus ait été un dîner ou un repas pascal. Certains savants auraient actuellement tendance à y voir plutôt un repas d'adieu.
De toute façon, les auteurs du Nouveau Testament s'accordent dans l'interprétation pascale qu'ils donnent de la mort sur la croix de Jésus et de son testament mémorial transmis lors de la dernière Cène: "Faites ceci en mémoire de moi" (Le 22.191.

EUCHARISTIE ET SEDER PASCAL
L'Eucharistie chrétienne, par laquelle l'Eglise transmet au cours des siècles le mémorial de la mort et de la résurrection de Jésus, n'a pas seulement une dimension pascale, elle est également liée à la prière de bénédiction qui chez les juifs, à l'époque néotestamentaire déjà, accompagnait les principaux repas: "Alors qu'ils étaient à table, Jésus prit le pain et, après avoir récité la bénédiction, il le rompit et le donna à ses disciples... Puis il prit la coupe et, après avoir rendu grâce, il la leur donna en disant..." (Mt 26,26-27).
Les formules « prononcer la bénédiction » et « rendre grâce » rappellent une des actions liturgiques les plus importantes du judaïsme: la prière avant le repas (birkat ha-motzi) et après le repas (birkat hamazon), qui consiste à reconnaître dans les biens de la terre -représentés par le pain et le vin- la bienveillance de Dieu, créateur et rédempteur, qui les sous-tend et les transforme en dons.
On pense que cette prière, qui commence par la birkat ha-motzi (d'origine rabbinique) et se termine par la birkat ha-mazon (d'origine biblique puisque fondée sur Dt 8,10), remonte pour son contenu essentiel à la période post-exilique (à partir de 587 av. J.C.), et celle-ci accompagne toujours chacun des repas, y compris le repas pascal.
Même dans l'hypothèse où Jésus aurait célébré un repas d'adieu au lieu d'un repas pascal, le lien essentiel demeure entre ce qu'il a dit et fait, et la prière de bénédiction. En effet, cette bénédiction accompagne obligatoirement tout repas, et pas seulement celui de la Pâque.
C'est dans ce contexte de la bénédiction que Jésus a institué le mémorial de sa mort et de sa résurrection, et c'est aussi dans ce contexte que l'Église le transmet au cours de sa "prière eucharistique", qui est au centre de sa propre liturgie.

PEUT-ON PARLER DE SEDER CHRÉTIEN?
Il est ambigu de parler de Seder chrétien. Il faut l'éviter parce que c'est historiquement inexact. L'expression "célébration chrétienne du Seder pascal" est également ambiguë et à éviter, car le Seder pascal appartient à la tradition juive, et seuls les juifs en sont les célébrants. Il peut en revanche être correct de parler de Seder pascal pour communautés chrétiennes ou de célébrations chrétiennes avec textes du Seder pascal.
Dans de tels cas, on pourra utiliser, au cours d'une prière ou d'une para-liturgie chrétienne, des éléments textuels ou rituels du Seder pascal juif, en partant du principe que la tradition chrétienne a depuis toujours enrichi sa liturgie d'éléments de la tradition juive: depuis la lecture de la Torah et des prophètes jusqu'à la prière des psaumes. Dans de tels cas cependant, il doit être clair qu'il ne s'agit pas de s'approprier le rite juif, mais de redécouvrir sa propre foi à la lumière de la tradition juive, à laquelle il faut s'ouvrir avec reconnaissance.

UN CHRÉTIEN PEUT-IL CÉLÉBRER LE SEDER?
Comme il s'agit d'un rite constitutif du judaïsme, le Seder pascal ne peut être célébré que par des juifs: ils en sont les sujets et les destinataires. Mais cela ne signifie pas que sa richesse doive rester inaccessible aux chrétiens.
L'idéal serait de participer à un Seder pascal en tant qu'invité par des amis juifs, chez eux. On serait ainsi vraiment les "hôtes" de la tradition et de la foi juive à laquelle l'Eglise "est liée au niveau même de son identité" (Cf. les Notes de 1985, I, 2).
Entre chrétiens, au contraire, il ne s'agira pas de célébrer le Seder, mais bien d'y réfléchir, d'en étudier et d'en approfondir le texte, dans une "écoute" pleine de respect et de reconnaissance.
Dans ce cas, on pourrait inviter, dans son groupe ou sa communauté, un rabbin ou un juif pratiquant, c'est-à-dire une personne vraiment compétente, lui demandant de partager son expérience et sa lecture du Seder pascal: textes, rites, symbolisme et histoire.
Si la présence d'un rabbin n'est pas possible, les chrétiens peuvent aborder le Seder pascal seuls ou en groupes et en étudier la structure, en lire les textes, en expliquer les rites avec l’aide d'une personne sensibilisée au judaïsme et compétente. Il est clair, que, dans de tels cas, on devrait parler non pas de célébration du Seder pascal, mais d'une étude pédagogique et didactique.

CONCLUSION
Pour connaître le Seder pascal, il ne suffit pas de lire les textes et d'en comprendre les symboles, mais il est également nécessaire d'entrer en communion avec la foi du peuple juif qui, en eux, a pris corps et à travers eux continue à se transmettre.
C'est pourquoi l'attitude des chrétiens par rapport au Seder pascal consiste à partager l'histoire du peuple juif, en accueillant comme un don incomparable le fait d'être des "hôtes" dans sa "maison", et en découvrant le lien qui nous lie à celui-ci, comme l'affirment les premières lignes de Nostra Aetate, N.4: "En scrutant le mystère de l'Eglise, le Concile rappelle le lien qui relie spirituellement le peuple du Nouveau Testament avec la lignée d'Abraham" (Concile Vatican II).

 

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