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Revue SIDIC XIV - 1981/2
Famille juive, famille chrétienne (Pag. 25 - 27)

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Mariages mixtes - Une autre perspective
Joseph A. Edelheit | Arthur Meth

 

Le problème des mariages mixtes n'est certes pas nouveau. Déjà Esdras s'y était heurté au retour du premier Exil (Esd. 10,1-4), et cette question a été débattue au long des siècles de l'histoire juive. On connaît les statistiques actuelles: Aux Etats-Unis, par exemple, jusqu'en 1960, le pourcentage des mariages exogamiques n'était que de 10%; entre 1961 et 1965, il est monté à 17,4%; entre 1966 et 1972, il a atteint 31,7%, et pour l'année 1979, il a été sans doute d'environ 35%. Si nous ajoutons à cela l'ignorance religieuse de bien desjuifs et le nombre restreint de ceux qui fréquentent la Synagogue ou une communauté, nous pouvons mieux apprécier l'importance de la crise.

L'expérience vécue d'une communauté

L'expérience du Temple Sinaï de Michigan City peut être de grand intérêt en ce qui concerne les mariages mixtes » (d'un juif avec un non-juif) et « exogamiques (d'un juif avec un converti au judaïsme). En novembre 1978, sur un total de 170 familles dans la communauté, 21 étaient des couples mixtes et 16 des couples exogamiques. Ainsi les 21,2% de la communauté étaient membres de familles mixtes ou exogamiques. Une telle statistique peut paraître impersonnelle et anodine, mais elle n'était pas sans amener de réelles controverses, des dissensions et de la confusion dans la communauté. Il nous fallait répondre à de difficiles questions personnelles comme: « Vous voulez dire que je peux rester membre de la communauté mais que la femme que je viens d'épouser ne peut pas en faire partie? » « Je suis né dans cette communauté et je désire que mes enfants reçoivent la même formation que moi. » « Mon mari ne veut pas devenir juif, mais je voudrais qu'il connaisse le Temple et puisse participer aux cérémonies. » « Rabbi, ma femme (non-juive) peut-elle réciter les bénédictions sur les bougies le soir où c'est notre tour pour le Oneg Chabbat? »

Le Temple Sinaï se trouvait confronté à la réalité et à la nécessité d'intégrer des non-juifs dans la communauté. Tout en maintenant l'interdiction officielle faite aux rabbins de célébrer des mariages mixtes dans les locaux du Temple, nous songeâmes à accueillir, au lieu de rejeter, ces couples mixtes. Peut-être cette attitude praîtra-t-elle contradictoire à certains, mais elle est bien conforme à la tradition juive, à la pratique de la Réforme et aux décisions de la Conférence Centrale des Rabbins Américains.

Cette pratique consistant à intégrer un non-juif dans le milieu juif où il réside s'enracine dans le concept de r( ger tochav », (étranger résident non-juif) qui, en un sens limité, devient pour ainsi dire membre de la communauté. Même si le cas du « ger tochav », selon l'ancienne définition du mot, ne s'applique pas exactement ici, il y a cependant bien des points communs avec les cas rencontrés actuellement de non-juifs mariés au sein de notre communauté juive.

En 1977, à Grossingers, la Commission Centrale des Rabbins Américains adoptait une résolution répondant à cette réalité du mariage mixte et de la famille juive élargie. En décembre 1978, s'adressant à « l'Union of American Hebrew Congregations », le rabbin Alexander Schindler les sommait de regarder en face la réalité des mariages mixtes dans la vie juive moderne. En suite de quoi, le Conseil prit une résolution recommandant à l'Union d'adopter un certain nombre de propositions, dont la clause No. 2 était de réaliser un programme d'accueil et d'engagement des convertis au judaïsme, et la clause No. 3 de réaliser un programme concret permettant à la Synagogue Réformée d'entrer en contact avec les couples mixtes.

Une manière plus large d'adhérer à la communauté

Le 19 juillet 1978, pour mieux répondre aux besoins réels des fidèles, le Temple Sinaï adopta une nouvelleconstitution qui donnait une définition plus large de la notion d'appartenance à la communauté, permettant d'y inclure les conjoints non-juifs, en tant que membres de la famille. Ce changement avait été précédé de longues discussions et d'un temps de formation, tant du côté du Conseil d'Administration que des fidèles; il a exigé, de plus, une formation continue des fidèles pour que ce changement garde bien tout son sens lorsqu'il s'agit d'accueillir des couples mixtes au sein de la communauté.

La troisième section de cette constitution, citée ci-dessous, prévoit le cas de cette catégorie spéciale d'adhérents non-juifs et les droits de ces adhérents.

Les adhérents:

A. Toute personne de croyance juive peut devenir membre du Temple Sinaï en en faisant la demande écrite.
B. Les adhésions seront individuelles. S'il s'agit de personnes mariées, maris et femmes ont les mêmes devoirs, droits et responsabilités. Chaque fois que le vote de la communauté sera requis, chacun aura son droit de vote individuel.

Section 1. Toute personne de foi juive, âgée de 18 ans ou plus, peut être reçue comme membre adhérent après approbation de sa demande, à la majorité des votes, par le Conseil d'Administration.

Section 2. (Classification des différents adhérents: mariés, juniors, non résidents).

Section 3. Dans le cas de personnes mariées, leur adhésion peut inclure la famille, ce qui signifie le mari, sa femme et leurs enfants non-mariés encore à change.
A. Si, dans un couple marié, l'un des époux est juif et que l'autre, non-juif ou n'ayant pas encore reçu un certificat officiel de conversion, a exprimé le désir de devenir membre de la communauté juive et d'assumer les responsabilités inhérentes à cette affiliation, il peut adhérer à la synagogue Sinaï en tant que membre de la famille. En vue de préserver l'unité familiale et pour respecter la dignité du partenaire non-juif, il (ou elle) devra jouir de tous les droits accordés aux adhérents, avec les exceptions mentionnées ci-après:
(1) Le non-juif ne participera à aucune cérémonie publique incluant une bénédiction.
(2) 11 ne pourra pas être élu, ni occuper une charge dans la communauté, ni faire partie du Conseil d'Administration ou du Comité proposant les candidatures.
Pour tout ce qui touche les membres non-juifs de la communauté, on prendra grand soin de suivre l'avis du rabbin.
Section 4. Les adhérents ont droit de vote sur tous les sujets proposés aux assemblées communautaires. S'il s'agit d'un couple, le mari et la femme auront chacun leur vote.

Mise en pratique

Accueillant ainsi de façon positive et officielle les couples mixtes au Temple Sinaï, le rabbin commença à organiser une série de programmes pour les aider à mieux s'intégrer dans la communauté et à s'initier aux coutumes familiales juives. Le rabbin et sa femme donnèrent chez eux, pour l'un ou l'autre couple, un cours sur les observances juives, et ceci sans avoir nulle intention d'encourager le partenaire non-juif à se convertir au judaïsme: il était clairement admis que les conjoints, surtout des femmes en l'occurence, s'intéressaient au judaïsme pour l'harmonie de leur foyer. Le cours portait sur les observances familiales du Chabbat et des fêtes; il comportait des explications sur les objets rituels, les traditions culinaires et les activités propres aux jours de fêtes.

Il faut insister sur le fait qu'intégrer un couple mixte ne constitue pas un simple changement de constitution au sein de la communauté: cette intégrationrequiert la coopération active des responsables laïcs et du rabbin. Ce processus d'intégration du conjoint non-juif dans la communauté n'a pas été, à notre connaissance, considéré comme un encouragement tacite au mariage mixte ou comme un premier pas vers la célébration officielle de tels mariages par le rabbin.

Reconnaître les besoins propres aux couples mixtes constitue un premier pas vers la compréhension. Le fait que le conjoint non-juif est membre de la famille et que le maintien de l'unité familiale est chose importante, voilà ce que tous les membres de la communauté juive devraient reconnaître et respecter. Il ne s'agit pas seulement de « derech eretz » ou de tolérance. Pour bon nombre de nos petites communautés citadines, c'est l'avenir qui est en jeu. Ce premier pas, nous l'espérons, pourra peut-être aider nos communautés, petites ou grandes, à aborder et à résoudre ce problème pressant de la vie juive qui ne va qu'en s'amplifiant un peu partout dans le monde.



Joseph A. Edelheit - Rabbin du Temple Sinaï, Michigan City
Arthur Meth - Ex-Président de la Communauté

 

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