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SIDIC Periodical II - 1969/1
L’enseignement chrétien et les juifs (Pages 15 - 19)

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Publications bibliques et judaïsme
G. Rochais, S. Mcevenue, G. Rossetto, T. Federici

 

Le Supplément au Dictionnaire de la Bible

Le judaïsme est souvent abordé dans le SDB. Mais si de nombreux articles traitent du judaïsme en rapport avec le Nouveau Testament, il est rare que le problème soit vu dans toute son ampleur. On peut noter une double carence à peu près commune à tous les articles: une certaine carence sur le plan herméneutique et sur le plan théologique. Sur le plan théologique: aucune mention n'est faite du rôle d'Israël dans le plan du salut après la venue du Christ — significatif à cet égard est l'article « Israël » du P. De Vaux qui se clôt à la chute de Jérusalem en 70. Sur le plan herméneutique: si les auteurs accordent généralement une section au judaïsme dans le développement général des pensées religieuses de l'Ancien Testament et par rapport au N.T., il n'y a souvent qu'une simple juxtaposition, qui pourrait faire croire que ces courants de pensée sont indépendants. Plusieurs auteurs avouent leur impuissance à pouvoir le faire.

Recension des principaux articles où une section est attribuée au judaïsme:

Abraham: étude ancienne de peu de valeur tant scientifique que spirituelle. Vague traité d'Apologétique sur Abraham et la mosaïcité du Pentateuque. Aucune mention du rôle d'Abraham dans le judaïsme ni d'ailleurs dans le N.T.

Expiation: consacre 2 paragraphes au judaïsme;

1) sur la souffrance dans la théologie vers le premier siècle de notre ère, 2) le Messie souffrant dans la théologie juive, étude basée sur « Le Messianisme palestinien » du P. Lagrange. Ne sont mentionnés ni l'Aqéda ni la fête de Kippur.

Interprétation: Exégèse juive. Etude succincte du P. Bonsirven sur les méthodes d'exégèse juive talmudique et postérieure.

Israël: L'article est envisagé sous le seul angle historique; il se termine par la chute de Jérusalem en 70.

Judaïsme: Long article du P. Bonsirven, col. 1143-1275. Etude de la théologie juive tannaïtique dans son ensemble, faite avec beaucoup de sympathie.
Logos: Etude du P. Starcky sur la notion de Membra dans les Targumim et le Rabbinisme; assez bref.

Loi: Pas d'étude de la Torah dans la pensée juive; l'auteur se borne à étudier la loi dans
l'A.T.

Midrash: Excellente étude de R. Bloch qui marque très bien la continuation du genre midrashique de l'A.T. au N.T. et à la littérature rabbinique.

Milieu biblique: Rien sur le milieu biblique leur insertion dans cette tradition dont la
du N.T.!

Moïse: Col. 1334-1337. Bonne étude sur Moïse dans les Apocryphes.
Nouvel An: 598-620. Excellente étude par A. Michel sur le sens et le développement du Rosh Hashanah dans la littérature rabbinique.

Pâque juive: 3 col. Description surtout du rite pascal juif selon le traité Pesahim de la Mishna.
Parabole: Le P. George souligne l'importance des paraboles rabbiniques pour comprendre et situer les paraboles évangéliques.

Passion: P. Xavier Léon-Dufour fait le point entre les différentes opinions sur la responsabilité de la mort de Jésus. Mélange de bonnes remarques, de généralisations traditionnelles et de vues théologiques inacceptables.

Pharisiens: Col. 1023-1115. Longue et excellente étude sur les Pharisiens depuis leur origine et à travers toute la littérature rabbinique.

D'après cette brève recension, on voit:

— Beaucoup d'articles abordent le problème du judaïsme sous l'angle théologique et en rapport avec le N.T. Plusieurs de ces articles sont excellents: Bloch, Bonsirven, Michel.

— Très souvent, sauf articles Midrash, Pharisiens, ils se limitent à étudier le judaïsme prémishnaïque. Ces études sont faites avec beaucoup de sympathie.

— Certains articles passent directement de l'A.T. au N.T. et semblent négliger la tradition dans laquelle l'A.T. était composé et compris.

— On peut regretter que la place d'Israël dans l'économie actuelle du salut ne soit pas abordé.
— Peu d'articles enfin, qui réservent une section au judaïsme, réussissent et « à replacer, selon le voeu de Renée Bloch, le thème qu'ils étudient, dans leur milieu historique, littéraire et doctrinal propres et à déceler par une analyse littéraire attentive leurs attaches, leurs sources, leur insertion dans cette tradition dont la source est Moïse et les prophètes ».

G. Rochais

Dictionary of the Bible.

Ce dictionnaire de la Bible (John L. McKenzie, Milwaukee, Bruce, 1965) est bien connu dans le monde universitaire des études bibliques. Un examen des mots Juif, Loi, Pharisien, Prêtre, Rabbin, Scribe, Talmud, révèle chez l'auteur le souci scrupuleux d'éviter tout antisémitisme. Le meilleur exemple s'en trouve sans doute au mot Talmud. Il expose de façon pertinente les erreurs d'interprétation rabbinique de l'Ecriture telle qu'on la trouve dans le Talmud; il nous conseille ensuite de les comprendre si nous voulons saisir le vrai sens des interprétations de l'Ancien Testament que nous trouvons dans le Nouveau. Quand il énumère les défauts des Pharisiens, il prend soin de nous dire que plusieurs parmi les meilleurs chrétiens de l'Eglise primitive étaient Pharisiens. Et il ajoute, « l'idéal d'une vie conforme à la Loi n'était pas étrangère au messianisme chrétien ni à sa morale ».

On peut cependant regretter qu'il n'ait pas terminé son explication par une histoire des Pharisiens après la mort du Christ. Lacune d'autant plus pénible que le judaïsme ne se trouve pas parmi les mots expliqués.

S. Mcevenue

Enciclopedia de la Biblia.

Cette encyclopédie de 6 volumes est sortie en un temps record de deux ans seulement, de novembre 1963 à septembre 1965. La direction technique a été assurée par A. Diez-Macho et S. Bertina (Barcelone, Editions Garriga, S.A. 1965). Ce travail nous apporte, outre les valeurs et les défauts communs à de semblables oeuvres collectives, le désavantage d'avoir été composé avec trop de hâte. L'éditeur voulait porter à la connaissance d'un vaste public les résultats des travaux des spécialistes en sciences bibliques et orientales. Ce but ambitieux ne nous semble pas atteint. Certes nous ne prétendions pas y trouver des monographies analogues à celles des autres dictionnaires encyclopédiques qui continuent encore à paraître en fascicules, car ce n'était pas là le but de l'oeuvre; mais nous aurions désiré être mis au courant des grands progrès accomplis ces dernières années dans les disciplines mentionnées, grâce à de solides synthèses bien a jour.

Au mot Reprobaciim (Vol. VI, p. 158) de J. Caubet, nous avons rencontré les habituels lieux communs à travers lesquels nous sentons transparaître le préjugé, surtout depuis que le Concile nous a sensibilisé à de semblables problèmes. Nous citons: « De plus si par Israël nous entendons le judaïsme religieux, pharisaïque du temps de Jésus, certainement il fut réprouvé par Dieu et pour toujours ». « Le judaïsme infidèle du temps de Jésus et ultérieur demeure réprouvé pour toujours ». Et comme si cela ne suffisait pas, écoutons le catégorique et dur jugement de dix-neuf siècles d'histoire de judaïsme, le tout assaisonné de citations bibliques: « L'endurcissement et l'aveuglement d'Israël dont parle saint Paul (Rom. 9,18; 11,7,25), le fait d'être un peuple désobéissant et rebelle (Rom. 10,21), d'être des ennemis (Rom. 11,28) qui ont fait un faux pas et sont tombés (Rom. 11,11,12) se réalise collectivement dans le peuple hébreu depuis plus de dix-neuf siècles sans interruption. C'est un fait que l'on ne peut nier historiquement; ils continuent avec insistance à rejeter Jésus-Christ et l'Eglise ». Par bonheur, l'auteur n'ignore pas que d'autres pensent d'une manière différente, mais pour lui les preuves données par ces théologiens ne sont pas convaincantes lorsque l'on considère l'ensemble de la doctrine de Paul.

Et c'est justement de cette dernière vision que s'inspire l'exégète connu J.M. Gonzalez-Ruiz, en expliquant Gal. 6,16 sous la rubrique « L'Israëlde Dieu et l'Eglise » (Vol. IV, p. 270 ss.). Grâce à sa profonde connaissance de saint Paul, J.M. Gonzalez-Ruiz rompt avec l'habitude, commune en certains milieux, d'opposer Israël selon la chair (1 Cor. 10, 18), qui serait l'Israël historique de l'Ancien Testament, à l'Israël de Dieu qui serait l'Eglise. L'auteur affirme avec fermeté:

« Sans aucune doute cette antithèse entre les deux Israëls est totalement étrangère à la pensée paulinienne. L'Église ne se substitue pas à Israël, mais au contraire elle est antée sur son tronc; c'est elle-même qui se convertit en Israël. Dieu n'a pas déraciné l'olivier pour planter un nouvel arbre; greffée sur Israël, l'Eglise lui demeure adhérente pour toujours et arriverait à mourir si elle était arrachée du tronc judaïque, car c'est par cette insertion qu'elle est arrivée à être le reste fidèle... ». En effet, le N.T. ne fait mention ni du 'Nouvel Israël', ni du nouveau peuple de Dieu', ni de 'l'Israël selon l'esprit' pour désigner l'Eglise chrétienne. En Gal. 4, 21-31 Paul explique longuement qu'il existe un seul peuple de Dieu, le peuple appelé sous le signe de la promesse faite à Abraham. A l'intérieur de ce peuple universel court la petite histoire de 'l'Israël selon la chair' (1 Cor. 10, 18). En effet, par l'intermédiaire d'Abraham, Dieu convoque un peuple universel qui embrasse toutes les nations de la terre; la promesse est l'institution divine qui soutient et maintient unie cette masse universelle. Un tel peuple universel parcourt deux étapes: celle de la promesse et celle de sa réalisation, l'étape sous contrôle du pédagogue et l'étape définitive de liberté dans le Christ ».

C'est une grande satisfaction que de noter comment ces efforts pour clarifier la pensée de Paul sur les juifs ont porté certains fruits dans le texte conciliaire: « L'Eglise du Christ, en effet, reconnaît que les prémices de sa foi et de son élection se trouvent, selon 'le mystère divin du salut, dans les Patriarches, Moïse et les Prophètes » (no 4 de la Déclaration sur les religions non-chrétiennes). Et plus loin: « Néanmoins, selon l'Apôtre, les juifs restent encore à cause de leur pères, très chers à Dieu, dont les dons et l'appel sont sans repentance ».

Dans l'article Fariseos (F. Lopez), nous trouvons encore des affirmations génériques sur leur formalisme, comme s'il n'y avait pas dans le pharisaïsme d'autres courants qui aient suscité une vraie et authentique piété intérieure à laquelle le Christ lui-même a adhéré, sans parler de Paul qui doit sa solide formation religieuse à l'un de ces courants d'inspiration libérale et ouverte. La bibliographie actuelle, bien que rare, nous oriente tout autrement. Le moment serait venu de faire un sort à tant de préjugés qui poluent nos rapports avec des groupes de confession religieuse différente, ne serait-ce que par simple devoir de justice. A tout l'article nous pouvons faire le reproche qu'un récent petit livre, clair et sûr, adressait à une semblable attitude de paresse mentale: « vouloir distinguer nettement, autour de Jésus, un groupe de disciples fidèles et un groupe d'opposants enragés dont feraient partie en bloc les scribes et les Pharisiens, c'est quelque chose qui ressemble un peu à ce que les enfants ont l'habitude de faire: ils divisent les hommes en deux catégories bien distinctes: les 'bons' et les 'méchants', qui ne se mélangent pas, mais s'opposent ». (Sofia Cavalletti, Ebraismo e spiritualità cristiana, Ed. Studium, Rama, 1966, p. 19).

Cette encyclopédie, faite pour aller entre les mains des prédicateurs et des laïcs qui veulent s'intéresser à la religion, est destinée aussi à être traduite en italien, ce qui ne sera certainement pas propre à arrêter le flux de semblables affirmations imprécises et hâtives.

G. Rossetto

La Bibbia concordata.

La Ière édition de la Bibbia concordata a été présentée officiellment, à Rame, le 14 novembre 1968. Sa vente eut de suite un succès sans précédent, et dans plusieurs villes d'Italie elle fut épuisée en quelques jours. (Il existe une édition bon marché et une autre de luxe).

La traduction de la Bibbia concordata a duré environ dix ans. La « Società biblica italiana », dont le centre est à Ravenne, fut chargée d'organiser le travail et d'entrer en rapport avec les représentants des différentes confessions religieuses qui y ont collaboré: protestants, orthodoxes, catholiques et juifs, tous italiens. De cette manière fut constitué un comité directeur restreint, chargé de la mise au point des manuscrits. Chacun des livres de la Bible a été confié à vingt-neuf experts. Ensuite le travail fut soumis à chaque confession qui l'a examiné, fait ses critiques, donné ses suggestions et approuvé le résultat final. Puis, le studium d'études bibliques des franciscains à Jérusalem fut chargé d'une mise au point scientifique, rigoureuse. Enfin le comité directeur a rédigé les notes explicatives qui expriment les divergences d'opinions sur le texte sacré. L'archevêque de Ravenne a donné son imprimatur, et les autres confessions des lettres d'approbation.

Le résultat de cette initiative, la première du genre, est positif. Cependant, en Italie, certains experts haut placés étaient assez réticents pour l'oeuvre encore en projet, ceci, disaient-ils pour deux raisons: « L'Italie n'a pas de problèmes oecuméniques parce qu'il n'y a pas de fortes minorités des autres religions ou confessions »; et « l'Italie n'a pas de spécialistes formés pour ce genre de travail ». La critique biblique rendra compte de cette dernière objection; quant à la première objection on peut répondre que théologiquement parlant, l'oecuménisme concerne tous les chrétiens où qu'ils vivent et quelle que soit la manière dont ils sont en rapport avec d'autres religions.

La fraternité qui s'est créée autour d'une « Table ronde » au niveau du comité directeur, ou entre les experts qui ont collaboré à l'oeuvre, suffirait à justifier l'existence de la concordata. C'est une preuve qu'il est possible de faire tomber les préjugés et les hostilités entre les différentes religions lorsque la préoccupation première est l'union autour de la Parole de Dieu. Pour cette raison, la Bibbia concordata se situe parmi les initiatives oecuméniques actuelles lesplus importantes, même si chaque confession n'a pas été officiellement engagée.

L'Introduction générale, particulièrement soignée, a voulu respecter le point de vue de chaque religion et aussi montrer combien la culture contemporaine devrait s'intéresser au Livre le plus traduit et le plus vendu à travers le monde.

T. Federici

 

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