Other articles from this issue | Version in English | Version in French
1970 Noordwijkerhout: Recommandations Pastorales
Concile Pastoral de l'Eglise catholique des Pays-Bas
Le Concile Pastoral de l'Eglise catholique des Pays-Bas a étudié, au cours de sa Session plénière du 5 au 8 avril 1970 à Nordwijkerhout, une série de « Recommandations Pastorales » basées sur un « Projet de rapport: Les relations entre juifs et chrétiens ». Ce dernier document a été établi par la Sous-Commission « Eglise et Israël » dont Mgr Dr A. Ramselaar est le président. Selon la méthode de ce Concile Pastoral, seules les « Recommandations Pastorales » ont été votées et sont des conclusions officielles. Elles doivent être publiées en association avec le « Projet de rapport ».
Projet de rapport: « Les relations entre juifs et chrétiens »
Introduction
Motif et plan
Le Concile Pastoral de l'Eglise catholique romaine des Pays-Bas croit souhaitable de réfléchir sur son attitude à l'égard du peuple juif (1).
1. Le peuple juif a contribué fortement à l'histoire de la civilisation néerlandaise. Les Pays-Bas ont joué un grand rôle dans la vie et la pensée du peuple juif pendant les derniers siècles. A notre capitale, on a donné le titre de Jérusalem de l'Occident.
2. On doit réfléchir — même aujourd'hui — sur la disparition de la plupart des communautés juives aux Pays-Bas, due aux persécutions terribles des années d'occupation 1940-1945. On doit y réfléchir, d'une part pour garder vivant le souvenir du courage et de la foi forte dont beaucoup d'entre elles ont fait preuve dans la privation et la torture; d'autre part, pour ne pas oublier que beaucoup de chrétiens n'ont pas fait leur devoir à ce moment-là, entre autres à cause d'un antisémitisme chrétien séculaire. Celui-ci est exprimé également dans un avertissement du Concile provincial de l'Eglise néerlandaise (2).
3. Le peuple juif tient une place particulière dans la foi de l'Eglise. On ne peut jamais le compter purement et simplement parmi les peuples non-chrétiens. L'Eglise sait qu'elle ne peut être l'Eglise pour les peuples, sans le lien avec le peuple juif d'aujourd'hui. Elle croit qu'elle reste toujours liée par son maître Jésus-Christ à ce peuple, dans son histoire et dans sa permanence. Ce lien particulier doit déterminer sa propre mission, et son attitude à l'égard du peuple juif. Cela peut aider l'Eglise à mieux comprendre et à mieux réaliser son unité avec les autres Eglises, et à mieux percevoir sa mission dans le monde.
La relation entre les juifs et les chrétiens pose beaucoup de problèmes, dont quelques-uns seulement sont évoqués ici.
Le rapport s'efforce d'éviter le danger de considérer les relations avec le peuple juif exclusivement à l'aide des données bibliques ou théologiques, en négligeant le développement de la vie juive après l'année 70 (resp. 130).
C'est bien dans l'esprit du judaïsme que de se laisser instruire par l'histoire. C'est pour celaque le rapport prend son point de départ dans l'attitude réelle que le christianisme a eue à l'égard des juifs pendant les siècles. Puis quelques principes sont formulés, basés sur des données bibliques, historiques et théologiques, qui sont déterminants pour les rapports entre les juifs et les chrétiens.
Ce qui lie, à notre avis, les chrétiens aux juifs, ce n'est pas ;seulement le passé — le christianisme est issu du judaïsme —, mais c'est surtout le présent: car, en dépit d'une interprétation différente, ils ont en commun — dans la vie quotidienne de l'Eglise et dans le culte juif —les éléments les plus essentiels, c.à.d. la liturgie de la Parole et de l'Agneau de Dieu, et le ministère de la réconciliation. Un paragraphe spécial est consacré à ce point.
Pour l'amélioration des relations entre les juifs et les chrétiens, l'attention est attirée, dans deux autres paragraphes
— sur la catéchèse concernant le peuple juif,
— sur l'éducation et l'information touchant les rapports entre juifs et chrétiens.
Chapitre 1.
L'Antisémitisme
En se référant à la Déclaration Nostra Aetate du Concile Vatican II, le Concile Pastoral condamne toute forme d'antisémitisme.
1. Le Concile Vatican déclare: (Nostra Aetate n. 5)
« Nous ne pouvons invoquer Dieu, Père de tous les hommes, si nous refusons de nous conduire fraternellement envers certains des hommes créés à l'image de Dieu. Il y a un lien si étroit entre l'attitude de l'homme à l'égard de Dieu son Père et son attitude à l'égard des hommes ses frères que l'Ecriture dit: "Qui n'aime pas ne connaît pas Dieu" (1 Jn 4, 8).
Par là est sapé le fondement de toute théorie ou de toute pratique qui introduit entre homme et homme, entre peuple et peuple, une discrimination en ce qui concerne la dignité humaine et les droits qui en découlent ».
2. Cela vaut d'une manière spéciale, pour la réflexion religieuse, au sujet des rapports avec les juifs et le peuple juif. L'antisémitisme n'est pas seulement une forme de discrimination injuste concernant un groupe d'hommes ou un peuple, mais il est aussi à l'opposé d'une certaine conception de la vie. Il n'est pas seulement dirigé contre les juifs comme groupe ethnique ou sociologique, mais avant tout contre leur existence particulière liée à leur histoire et à leur conscience religieuse. Dans cet ordre d'idées, l'antisémitisme signifie au fond une méconnaissance de la manière dont Dieu agit avec le peuple juif comme premier-né de tous les peuples. Nous devons reconnaître également cet aspect de l'antisémitisme, si nous ne voulons pas risquer de mésestimer les qualités et le comportement du peuple juif.
3. Depuis toujours, les chrétiens et les. Eglises ont compris l'histoire du peuple de Dieu selon une conception trop humaine. L'Eglise était vue surtout comme une Eglise des gentils à l'exclusion du peuple juif. L'enracinement de l'Eglise dans l'histoire du peuple juif est ainsirelégué au second plan, de même que la conscience du patrimoine spirituel commun. C'est une des raisons du tort effrayant qui a été fait aux juifs. Les dimensions réelles nous en sont révélées à notre époque: à peine l'immense majorité des chrétiens et des Eglises a-t-elle protesté contre le massacre du peuple juif, qui dépasse toute compréhension humaine, et dont des hommes pourtant sont responsables.
4. La réflexion religieuse des juifs concernant leur propre existence de peuple reconnaît un lien particulier avec la Terre Promise. Le peuple juif ne le considère pas seulement comme un phénomène historique, culturel ou religieux, mais comme une donnée, indissolublement liée à son attente d'une paix et d'une justice qui embrassent tous les peuples.
Négliger ou nier ce fait peut être source de malentendu, et peut nourrir des préjugés concernant la nature du peuple juif et sa place parmi les peuples: préjugés qui ont conduit, ou qui peuvent conduire, à une discrimination. Un jugement sur l'antisémitisme ne demande pas seulement une grande prudence, mais également une connaissance de la réalité juive.
Chapitre 2.
Les relations de l'Eglise avec le peuple juif
La Déclaration du 2ème Concile du Vatican indique de lien par lequel le peuple du Nouveau Testament est relié spirituellement à la descendance d'Abraham (Nostra Aetate n. 4a). Le Concile met en lumière la continuation de l'Ancien Testament dans le Nouveau, et indique de quelle façon l'Eglise était préfigurée et enracinée dans le peuple juif (4b). Avec les paroles des épîtres de Paul aux chrétiens d'Ephèse (4b) et de Rome (4c), le Concile rappelle le lien permanent qui unit l'Eglise et le peuple juif, et le grand patrimoine spirituel qu'ils ont en commun (4e). Il est enfin rappelé que l'Eglise, avec les prophètes et le même apôtre, attend le jour, connu de Dieu seul, où tous les peuples invoqueront le Seigneur d'une seule voix et le « serviront d'un même coeur » (So 3, 9).
Le Concile Pastoral de l'Eglise catholique romaine des Pays-Bas croit que, selon la prédication de la loi, des prophètes et des psaumes (cf. Lc 24, 44; Lc 13, 34-35), le peuple juif est le témoin permanent de l'action salutaire de Dieu sur l'humanité (Is 43, 10; Rm 9, 11).
La promesse, par excellence, de Dieu au peuple juif, c'est l'Alliance sans repentance (cf Rm 9, 4-5; 11, 29; Ep 2, 12). Le Concile Pastoral croit que Jésus-Christ, rré sous la Loi (cf. Ga 4, 5) est celui que prophètes, justes et rois désiraient voir (Mt 13, 17; Lc 10, 24). En Lui, la révélation de l'amour éternel de Dieu a atteint sa plénitude (cf Ep 1, 10; Col 1, 15-23).
Le Concile Pastoral professe qu'en Jésus-Christ la paix est venue, unissant les deux mondes en détruisant la barrière qui séparait juifs et gentils: (cf. Ep 2, 14-15). Il reviendra achever cette paix On 16, 33; Ap 21). Dans la prière liturgique les promesses de Dieu au peuple juif, non encore accomplies, sont maintenues en honneur.
I'Eglise catholique romaine des Pays-Bas pense avec reconnaissance à la tradition spirituelle propre aux juifs, dans laquelle ils ont gardé la Loi et les prophètes. Elle reconnaît aussi les multiples valeurs spirituelles et religieuses du peuple juif: elles sont un stimulant permanent et un examen de conscience pour l'Eglise, et ont une grande importance pour la justice et la paix dans le monde entier.
En conséquence, l'Eglise catholique romaine des Pays-Bas, par la connaissance et l'estime mutuelles, s'efforce de tout mettre en oeuvre pour promouvoir le renouveau des relations judéo-chrétiennes, demandé par le 2ème Concile du Vatican à toute l'Eglise. Il sera servi par l'étude commune de la Bible et de l'histoire, et la volonté de s'en instruire ensemble. Toute intention ouprojet de prosélytisme doit être exclu comme contraire à la dignité humaine et à la conception chrétienne de la foi. De plus, on ne peut pas assimiler la situation du peuple juif, à l'égard du message universel du Christ à celle des autres religions non-chrétiennes.
Le christianisme est affronté aujourd'hui aux problèmes du discernement des voies de Dieu dans l'histoire humaine, et de la vie religieuse dans une société sécularisée. Il serait utile de chercher à intégrer la tradition juive dans cette nouvelle manière de penser.
Chapitre 3.
Les relations avec le peuple juif dans la liturgie
1. Le lien entre le peuple juif et l'Eglise se révèle spécialement dans la liturgie, où il est vécu d'une manière mystérieuse. C'est par la parole et le sacrement, par des hymnes et des prières que la communauté célèbre la présence vivante du Christ, la tête du Corps par l'action de l'Esprit. Ce que Dieu a réalisé dans son peuple, le Christ l'a confirmé et pleinement accompli par sa médiation unique et éternelle. Dans le culte liturgique, l'Eglise fait l'expérience d'être une création nouvelle dans le Christ, d'entrer dans la famille d'Abraham et de participer à la dignité d'Israël (liturgie du baptême de la nuit pascale). Le Christ est l'Agneau pascal véritable qui enlève les péchés du monde (Préface de Pâques). En le mangeant, nous annonçons sa mort jusqu'à ce qu'Il vienne (1 Co 11, 26).
Dans les éléments essentiels de sa liturgie, dans son contenu et dans sa forme, l'Eglise conserve le patrimoine du culte juif: la proclamation de la Parole de Dieu, la célébration du repas pascal et le ministère de la réconciliation par le baptême et le sacrement de la pénitence.
2. Les vraies relations entre les chrétiens et les juifs ne peuvent naître sans la conscience de ce lien. Seule l'expérience vivante de cette relation donne à la communauté du Christ sa forme véritable. C'est ainsi que s'est constituée la liturgie primitive: la liturgie de la Parole et la célébration de l'Eucharistie, l'Avent et la fête de Noël, Pâques avec le Carême et la Pentecôte, tout le ministère de la réconciliation. La réforme de la liturgie devra toujours en tenir compte, et maintenir le caractère de proclamation du salut, l'accent oecuménique et eschatologique de la liturgie.
Plus concrètement, l'attention est attirée sur les points suivants:
a) l'usage des psaumes dans la liturgie est préféré aux autres chants; et cela non seulement, parce que l'Eglise a toujours considéré le Psautier comme son livre de chants, mais parce que l'annonce du salut a trouvé, dans les psaumes, une forme très évocatrice et très universelle.
b) les lectures, en particulier celles qui se rapportent au peuple juif et à la Terre Promise. Elles peuvent aider à une compréhension plus juste de la relation entre les chrétiens et le peuple juif.
c) les prières, en particulier celles qui sont utilisées pendant la célébration de l'Eucharistie. Elles exprimeront l'amour du Christ pour tous les hommes et pour son propre peuple.
3. Toutes les traces d'antisémitisme doivent disparaître. Il ne s'agit pas seulement des textes de certaines parties du missel et du bréviaire, mais aussi des représentations, spécialement de la Passion du Christ, où Jésus, Marie et les disciples sont figurés comme non-juifs tandis que les autres juifs sont caricaturés. On doit veiller à ce que d'anciens préjugés ne s'introduisent pas involontairement dans des formulations nouvelles.
4. Cités hors du contexte, ou sans connaissance des circonstances historiques ou de l'usage historique de la langue, certains textes peuvent être source de malentendus; ces textes doivent être expliqués afin de contribuer à la formation d'une nouvelle mentalité concernant le peuple juif.
Chapitre 4.
La Catéchèse au sujet du peuple juif
Situation actuelle.
1. La catéchèse concernant le peuple juif doit contribuer fortement à l'amélioration des relations judéo-chrétiennes, et à un échange fructueux entre le judaïsme et le christianisme. C'est surtout la catéchèse qui, dans le passé, a nourri de génération en génération les préjugés contre le peuple juif.
Aujourd'hui encore la catéchèse faillit:
— par une méconnaissance — le plus souvent inconsciente — ou par un mépris du peuple juif d'hier et d'aujourd'hui;
— par manque, souvent, d'une approche positive du peuple juif;
— par une ignorance de la vraie nature et des dimensions de l'antisémitisme.
Normes générales:
2. Pour une catéchèse correcte concernant le peuple juif, il faudra veiller:
— à une connaissance profonde et à une compréhension juste de la Bible comme annonce de l'action de Dieu dans l'humanité. Tant que le chrétien ignorera la Bible, une relation juste avec le peuple juif ne pourra naître. Et tant qu'on détache la prédication de Jésus et des apôtres de son arrière-fond historique juif, et qu'on expose le christianisme comme un système de vérités abstraites, on continuera inévitablement à déprécier le peuple juif. Son histoire — avant et après le Christ — doit être interprétée selon sa signification propre dans l'histoire du salut;
— à une réflexion religieuse sur les relations de l'Eglise avec le peuple juif, selon les normes exposées dans la chapitre 3;
— au respect de la pleine vérité historique concernant le peuple juif, et à l'information exacte de la réalité vivante qu'ils constituent.
Points particuliers:
Quelques points demandent une attention spéciale:
1. Le peuple juif doit être considéré comme le peuple avec lequel Dieu a conclu une alliance éternelle.
2. L'Ancienne Alliance n'existe pas unique-mente en fonction de la Nouvelle, mais elle a sa propre signification dans l'histoire du (peuple juif et dans l'histoire du monde.
3. Le peuple juif n'est pas collectivement coupable, ni de la Passion et de la mort de Jésus-Christ, ni de son refus comme Messie.
« Bien que les chefs des juifs avec leurs partisans, aient poussé à la mort du Christ — cf. la « Déclaration sur l'attitude de l'Eglise à l'égard des religions non-chrétiennes », n. 4 — cependant ce qui a été commis durant sa Passion ne peut être imputé, ni indistinctement à tous les juifs vivant alors, ni aux juifs de notre temps ». Le peuple juif n'est ni maudit, ni dépouillé de son élection. Les souffrances, la dispersion et les persécutions ne sont pas une punition pour la crucifixion et le refus de Jésus. Il est injuste d'accuser les juifs de « déicide ».
4. Il n'est pas naturel qu'une rupture complète soit intervenue entre les juifs et les chrétiens, car Jésus, né d'une mère juive, n'a jamais rompu les liens avec son peuple. L'Eglise primitive est enracinée dans le peuple juif.
5. La manière dont le peuple juif vit sa foi aujourd'hui doit être présentée dans la catéchèse, selon la vérité.
6. E est inexact )et injuste d'opposer la Nouvelle et l'Ancienne Alliance comme une alliance d'amour à une alliance de crainte. Car la prédication de l'amour de Dieu pour l'homme, de l'amour du prochain, de la miséricorde, de la fidélité et de la justice, tout cela appartient essentiellement à l'Alliance Ancienne.
7. On doit donner sa juste place au message évangélique et à la prédication des apôtres concernant la signification du peuple juif dans l'instauration finale de l'unité du monde (Mt 23, 37-39; Lc 13, 35; Ac 1, 7; 19, 21; Rm 9, 11; Ep 2, 11-22).
Chapitre 5.
Education et information
1. Tous ceux qui sont chargés de l'instruction et de l'éducation doivent être informés durant leurs études, de la signification permanente du peuple juif dans le dessein de Dieu sur l'humanité. On ne doit pas passer sous silence l'histoire des persécutions, ni ignorer l'existence du peuple juif.
2. Il est important de chercher comment promouvoir concrètement l'étude des sciences du judaïsme; de préférence en collaborant avec d'autres Eglises.
3. Dans la formation des futurs prêtres les études concernant le peuple juif sont recommandées.
4. Cela doit se faire selon l'esprit dans lequel le peuple juif se connaît lui-même.
5. On fait appel à tous les moyens de communications sociales pour promouvoir de nouvelles relations entre juifs et chrétiens.
Recommandations Pastorales
1) Le Concile Pastoral demande que l'Eglise catholique aux Pays-Bas se laisse guider, dans ses relations avec les juifs, par la conscience de foi, telle qu'elle s'est exprimée dans la Déclaration Nostra Aetate n. 4 du Concile Vatican II.
Cela signifie que:
a) les juifs restent, à cause de leurs pères, très chers à Dieu (Rm 9, 4-5 et Rm 11, 28);
b) l'Eglise du Christ est greffée sur le tronc du peuple juif (cf. Rm 11, 17-24);
c) il y a un patrimoine spirituel commun aux juifs et aux chrétiens.
2. Le Concile Pastoral reconnaît que le message biblique est parvenu à l'Eglise dans le monde de la pensée et de la foi juives dont il est issu.
Pour cette raison:
a) une connaissance approfondie et une compréhension exacte de la Bible comme proclamation de l'agir de Dieu avec les hommes ne sont pleinement possibles sans la familiarité avec la conscience de Dieu qu'ont les juifs, et avec leur compréhension des termes bibliques;
b) il faut reconnaître que, non seulement l'Ancien Testament, mais le Nouveau Testament également peut être considéré comme un écrit juif, et qu'il ne peut être compris sans la connaissance de l'arrière-fond juif;
c) une étude en commun de l'Ecriture par juifs et chrétiens est souhaitable;
d) il est nécessaire pour l'Eglise de veiller à la fidélité au texte original de l'Ecriture.
3. Pour progresser dans la rencontre entre les différentes Eglises, une réorientation de tous sur l'origine juive commune est nécessaire.
4. Le Concile Pastoral rejette toute forme d'antisémitisme, et déclare à ce propos:
a) qu'en prolongement de la Déclaration du Concile Vatican II, il ne déplore pas seulement, mais condamne catégoriquement toute forme d'antisémitisme;
b) qu'il veut répéter que la Passion du Christ ne peut être imputée ni à tous les juifs vivant alors, ni aux juifs de notre temps; pour cette raison, les juifs ne doivent pas être considérés comme maudits ou rejetés;
c) que de simples raisons d'humanité suffisent à condamner toute discrimination à l'égard des juifs, comme groupe social particulier, ou comme adhérants à une religion déterminée et à une certaine conception de vie;
d) que l'Eglise a le devoir de réfléchir sur toute l'histoire du peuple juif tant avant qu'après la venue du Christ, et sur la conscience qu'il a de lui-même;
e) qu'une réflexion s'impose, — faite ensemble, par juifs et chrétiens, avec l'apport de la pensée juive et chrétienne modernes —, sur une origine qui leur est commune, et sur les raisons de leur séparation;
f) qu'il serait juste — après la référence aux acta et decreta concilii provincialis ultrajectensis 1924 can. 1325 par. 3 p. 183, faite dans le projet de rapport — de prier l'épiscopat néerlandais d'annuler ce qui est dit dans ce paragraphe.
5. Le Concile Pastoral veut témoigner que l'Eglise Catholique des Pays-Bas, ensemble avecles autres chrétiens et les juifs:
a) veut vivre de la promesse divine de la justice et de la paix;
b) veut servir le salut de toute la création;
c) veut chercher les réponses aux questions concernant l'idée de Dieu, l'image de l'homme, l'attente eschatologique, qui, toutes ensemble, déterminent aujourd'hui la crise générale et religieuse de l'occident.
6. Le Concile Pastoral demande avec force à toutes le instances responsables de veiller sérieusement et continuellement à ce que ces idées et les résultats des études et réflexions ultérieures entrent dans la formation théologique, la prédication, la catéchèse, la liturgie et les publications.
(1) Déjà le nom « peuple juif » pose la question de la signification exacte de ce terme.
Nous partons de la conviction exprimée dans l'Ecriture et confirmée dans les livres du Nouveau Testament, que le peuple juif a une existence particulière. Son existence comme peuple (son origine, et ses vicissitudes pendant les siècles) — semblable à celle des autres peuples — montre pourtant des aspects par lesquels elle se place hors de toute catégorie.
C'est pour cela qu'il n'est pas possible de définir la notion de « peuple juif ». Le peuple juif lui-même n'est pas arrivé à une définition aceptée par tous. Ce rapport s'en abstient également.
On a préféré le titre « peuple juif » à « juif », car ce dernier mot suggère que les juifs individuels seraient différents des autres hommes; or c'est seulement leur existence particulière comme peuple qu'on reconnaît dans ce document. D'ailleurs le nom « juif » semble méconnaître la solidarité du peuple juif dispersé dans le monde. On évite le nom d'« Israël » parce qu'il revêt des significations divergentes, plus encore que celui de « peuple juif ».
Ce document veut se prononcer seulement sur les rapports entre les juifs et les chrétiens comme tels, en tant qu'ils appartiennent au peuple juif ou à la communauté chrétienne. Le peuple juif n'étant pas seulement un groupement religieux, son existence comme peuple parmi les peuples comporte toujours des implication politiques. Ce rapport ne porte pas un jugement sur ces implications, même lorsque celles-ci touchent les intérêts de certaines Eglises: par ex. l'internationalisation de Jérusalem, la gestion des Lieux saints.
(2) Acta et decreta concilii provincialis ultrajectensts 1924 can. 1325 par. 3 p. 183: (...).
« Les relations avec les juifs doivent être évitées, car ils sont très éloignés de la doctrine de la croix du Christ: scandale pour eux. Les curés doivent veiller à ce que les chrétiens ne prennent pas un travail chez des juifs qui les fassent devenir leurs domestiques ou leurs subordonnés. S'il n'y a pas de danger pour la foi ou les moeurs, on peut accepter un travail quotidien salarié chez eux, soit dans l'agriculture, soit dans les usines.
Cependant un avertissement grave est donné: que ces services rendus n'en conduisent pas à d'autres où il y aurait un danger pour l'âme, surtout à cause du désir de lucre. D'ailleurs les fidèles doivent prendre soin — selon l'avertissement de Benoît XIV (Enc. A quo primum, 1751) de ne pas avoir besoin de l'aide et de l'appui des juifs (...).