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Présentation
Les éditeurs
Elie est sans doute un personnage biblique un peu oublié dans les milieux chrétiens, et pourtant sa popularité semble avoir été grande pendant des siècles si l'on en juge par le nombre de lieux ou d'antiques sanctuaires chrétiens qui portent son nom.
Nous avons aussi un témoignage de cette popularité dans la liturgie: Don B. Botte, O.S.B., a retrouvé les traces d'une fête du prophète saint Elie en Gaule au 6e siècle, avec une Préface propre du jour(1); de nos jours encore, la liturgie byzantine (2) évoque fréquemment la figure d'Elie, dans les temps du Carême et de la Pentecôte particulièrement, et surtout pour la fête du «Saint et glorieux prophète Elie le Thesbite », le 20 juillet, date traditionnelle conservée aussi par le Propre latin des saints du diocèse de Jérusalem.
Dans la tradition musulmane, Elie tient aussi une place importante. Il est appelé soit Ilyas, soit Al Khidr ou El Khader, selon qu'il s'agit du prophète luttant contre l'idolâtrie ou d'un personnage plutôt légendaire intervenant dans la vie des croyants pour les aider, les guérir, les guider ou les accompagner au moment de la prière (3). Dans le judaïsme, comme nous le verrons, Eliyyahu joue aussi un rôle important, dans la tradition populaire surtout.
D'où vient donc la popularité, le succès d'une figure que nous pourrions considérer comme marginale dans chacune de nos traditions? Serait-ce l'attrait pour cet « homme de Dieu » qui a su en son temps s'opposer sans compromission aux idoles?... et les idoles renaissent à chaque moment de l'His toire; ou parce qu'il se révèle si proche de nous dans son découragement? Ou que, personnage semi-légendaire, un peu marginal, il est moins compromis avec « l'institution »? Serait-ce parce qu'Elie fut l'un des rares «faiseurs de miracles» de la Bible?... ce en quoi, d'ailleurs, il se rapproche de Jésus tel que le présentent les traditions évangéliques. Ou serait-ce plutôt pour la ferveur mystique de celui qui, saisi par l'Esprit de Dieu, « s'est levé comme un feu », et nous appelle à vivre à sa suite, avec le même zèle, en présence de Dieu?
Peut-être, pour nous chrétiens, Elie a-t-il un autre message important à rappeler. Ne sommes-nous pas, nous aussi, un peuple en attente, le peuple du « déjà » et du « pas encore »? S'il est vrai qu'en JésusChrist l'ère messianique est inaugurée, nous savons bien qu'elle n'est pas encore totalement réalisée ici bas, que nous sommes appelés à travailler chaque jour à ce qu'elle s'établisse davantage sur terre, et que nous attendons, nous aussi, le jour où il reviendra dans la gloire. Comme le dit Jean Marc Pasquier (4), nous pourrions falsifier la parole de Jésus et nous « installer », en ne retenant qu'une partie de Son message aux disciples: « Elie est déjà venu »; mais il a dit aussi: « Elie vient et il rétablira tout ».
1. Cf. Cahiers Sioniens No 11, sept. 1950, pp. 170-177.
2. Cf. Carmel No 31 1943-3: « Elie le Prophète: Regards de la tradition chrétienne», pp. 200-207.
3. Cf. A. Chouraqui: «L'Univers de la Bible» t. 1111, éd. Lidis, Paris, p. 455 et 492.
4. Article de Jean Marc Pasquier qui paraîtra dans la prochaine revue.
