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SIDIC Periodical I - 1968/1
Les études bibliques (Pages 03 - 09)

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Remarques sur des Bibles
Jean Martucci, A. Roy Echardt, Pr R. Schmid, A. K. Willett

 

« Il faut que l'accès à la sainte Ecriture soit largement ouvert aux chrétiens. C'est pourquoi, dès ses origines, l'Eglise a admis comme sienne cette très ancienne version grecque de l'Ancien Testament, dite des Septante; elle a toujours en estime d'autres versions orientales et des versions latines, principalement celle qu'on appelle la Vulgate ».
Dei Verbum No 22

Quelques éditions les plus répandues de la Bible sont maintenant commentées, concernant leur manière de présenter le peuple juif et le judaïsme.

1. Réflexion sur les notes de la Bible de Jérusalem - Evangiles

Dans « Jésus et Israël » (Paris 1948 et 1958), Jules Isaac attribue au texte lui-même des quatre Evangiles (surtout celui de Jean) des intentions et un enseignement antisémites.

Gregory Baum, dans The Jews and the Gospel (Londres 1961 et Glen Rock, N. J., 1965) traduit en français pour la collection « Lectio Divina » (N° 41) sous le titre « Les Juifs et l'Evangile », démontre que le Nouveau Testament, même s'il porte la marque du conflit entre la Synagogue et l'Eglise naissante, ne contient aucun germe de mépris envers les juifs.

C'est au niveau des traductions et des interprétations, souvent faites dans une optique antijuive, même inconsciente, que se pose le problème. Depuis quelques années et à la suite surtout des déclarations de Vatican II, une sensibilité nouvelle est née, qui tente justement d'éviter tout ce qui pourrait entretenir les préjugés créés par une lecture équivoque ou même tendancieuse des textes scripturaires.

C'est avec cette préoccupation que les auteurs du présent article ont voulu lire ensemble l'édition français des Livres Saints la plus prestigieuse et la plus répandue: la Bible de Jérusalem (édition en un volume grand format).

Nous ne pouvions évidemment pas nous attaquer d'emblée à la totalité du texte, aussi nous sommes-nous limités aux quatre Evangiles, et même, délaissant les problèmes soulevés par la traduction de certains passages, nous avons confiné notre travail aux seules notes explicatives. Tentative humble et volontairement restreinte.

La Bible de Jérusalem, on le sait, date de 1955, de plusieurs années donc avant le Deuxième Concile du Vatican et la réflexion qu'il a suscitée sur le problème des relations entre juifs et chrétiens. Ses notes reflètent donc presque inévitablement une certaine mentalité pré-conciliaire.

Les constatations faites au cours de notre étude peuvent être ramenées à trois chefs: des silences malheureux, des généralisations indues et des explications équivoques.

En les exposant ici nous n'avons d'autre but que celui d'éveiller l'attention des lecteurs actuels et des responsables d'une éventuelle révision.

Des Silences Malheureux. — Il faut souhaiter qu'on publie un jour une édition des Evangiles dont les notes explicatives soient orientées principalement sur le problème d'interprétation soulevé par le fait que la vie de Jésus s'est écoulée dans un contexte purement juif. Nous ne pouvons pas exiger cela de la Bible de Jérusalem. Ne pourrait-on cependant envisager des notes quiéclairent certains points plus délicats, et même, dans l'introduction aux Evangiles, consacrer un paragraphe aux juifs?

Dans Jean 1,19 l'expression « les Juifs » apparaît pour la première fois dans le Quatrième Evangile. La note b de la Bible de Jérusalem est insuffisante. On souhaiterait trouver ici une note plus élaborée, à laquelle on renverrait chaque fois qu'un passage paraît l'exiger.

Plus loin ( Jean 4,22), la phrase admirable « le salut vient des Juifs » n'est pour la Bible de Jérusalem l'occasion d'aucune explication. Nous sommes pourtant ici au coeur de l'histoire du salut et à la charnière des deux Alliances. Renvoyer à Rm 9,4-5 ne suffit pas; il faudrait ici toute une note rédigée dans l'esprit de Rm 11,16-32.

En Mt 27,25, les mots « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants » ont donné lieu à tant d'antisémitisme qu'il faut les expliquer plus longuement qu'en disant simplement « le peuple revendique la responsabilité du meurtre qu'il réclame » (note c).

La loi du talion, rappelée en Mt 5,38, est souvent citée pour évoquer le désir de vengeance qu'on prête au peuple juif, en contraste avec la loi chrétienne de la charité. La règle du talion constituait pourtant dans l'antiquité un pas dans la voie de la justice, ordonnant qu'on ne réclamât pas plus qu'un oeil pour un oeil, et pas plus qu'une dent pour une dent. La tradition pharisienne a même fini par ramener cette règle à certaines compensations juridiques prévues par le droit. Une note de la Bible de Jérusalem devrait faire allusion à cette interprétation, sans pour autant sous-estimer les exigences nouvelles posées par Jésus.

Mt 23, avec ses interpellations de Jésus aux scribes et aux Pharisiens, serait une excellente occasion pour placer une note explicative sur la signification véritable en même temps que les faiblesses du mouvement pharisien. Présentement, rien dans la Bible de Jérusalem ne laisse entendre qu'il y ait pu avoir des pharisiens honnêtes, simples et pieux.

Nous ne signalons là que des silences malheureux. Il est bien évident que d'autres notes explicatives seraient souhaitables et utiles. Mais attachons-nous tout de suite à étudier ce qui est dit plutôt que ce qui ne l'est pas.

Des Généralisations Indues. — Là où saint Paul enseigne qu'une partie d'Israël s'est endurci (Rm 11, 25), certaines notes de la Bible de Jérusalem affirment que « les Juifs » seront supplantés par... des païens plus dignes qu'eux (Mt 8, 12, note c); que « les Juifs » rejettent toutes les avances de Dieu (Mt 11, note a); que « le figuier représente Israël stérile et châtié » (Mt 21, 19, note c); que « les invités qui les (prophètes et apôtres) négligent ou les outragent sont les Juifs » (Mt 22,1, note d). En Mt 10,23, note f, c'est « le peuple » lui-même qui est « devenu infidèle », et dans Jn 8,21, note d: « en repoussant Jésus, les Juifs se perdent sans espoir ».

Là où saint Paul enseigne que « quelques-unes des branches ont été coupées » (Rm 11, 17) pour que des païens convertis puissent, comme un sauvageon d'olivier, être greffés parmi les branches, la Bible de Jérusalem dit que « les païens remplaceront le peuple juif infidèle » (Lc 21,24, note c), et encore que « les Juifs laisseront passer " le temps " et les païens recevront le salut à leur place » (Jn 7,34, note i). Il faudrait ici un peu plus de nuances. Etre païen n'est pas plus un titre au salut qu'être juif!

Certaines notes contribuent à jeter dans le discrédit l'ensemble de la piété pharisienne, de la tradition rabbinique et des coutumes juives. Mt 10,27, note g, parle sans distinction de l'hypocrisie des Pharisiens », et Mt 11,25, note b, range tous « les Pharisiens et leurs docteurs » parmi les « sages » à qui restent cachés les mystères du Royaume. L'attitude égoïste du fils aîné dans la parabole de « l'enfant prodigue » devient indistinctement celle des « Pharisiens et des scribes » dans Lc 15,25, note b.

Dans la note f de Jn 10, 6, il semble que tous les Pharisiens soient « aveuglés » et Jn 10,8, note h, laisse entendre qu'ils étaient tous des voleurset des pillards entrés sournoisement dans la bergerie.

Enfin, malgré le rejet de Jésus par le judaïsme officiel, la Bible de Jérusalem généralise indûment en parlant de la « doctrine faussée des chefs juifs » (Mt 16,12, note a) ce qui paraît contredire la parole de Jésus: « Les scribes et les Pharisiens occupent la chaire de Moïse: faites donc et observez tout ce qu'ils pourront vous dire; mais ne vous réglez pas sur leurs actes... » (Mt 23,2-3).

Des Explications Equivoques. — Jésus, nous dit lui-même qu'il « n'est pas venu abolir, mais accomplir » (Mt 5, 17). Certaines notes explicatives de la Bible de Jérusalem emploient des expressions équivoques qui semblent ne pas tenir compte de cette vérité.

Est-ce bien juste d'affirmer que « la ruine de Jérusalem marque la fin de l'Ancienne Alliance » (Mt 24, note d, au titre « discours eschatologique ») et que Jésus « viendra établir son règne messianique (L'Eglise) sur les ruines du Judaïsme » (Mt 24, 3 note e) tandis que « Dieu lui-même abandonnera Jérusalem et son Temple » (Mt 23, 38, note b)?

Si l'Ancienne Alliance meurt, c'est pour ressusciter en Alliance Nouvelle, et il serait plus heureux de parler de passage et de transformation que de ruine et de destruction du judaïsme. Dans cette optique il est également très peu juste de parler des juifs qui « se seront convertis » (Mt 23, 39, note c). La conversion implique un rejet du chemin parcouru jusque là, un changement total de direction. Saint Paul est plus prudent lorsqu'il parle d'admission des juifs (Rm 11,15). Même le déchirement du voile du Temple marque moins « la suppression de l'ancien culte mosaïque » (Mt 27,51, note n) que l'accession de tous les hommes au sanctuaire messianique ouvert par le Christ.
Il faudrait aussi rappeler que, même si les apôtres ont décidé qu'il ne faut pas « tracasser ceux des païens qui se convertissent à Dieu » (Ac 15,19) en leur imposant les lois judaïques, ils n'ont jamais condamné l'observance de celles-ci par les juifs, même devenus chrétiens. De ce point de vue il peut être équivoque d'affirmer que « la Loi juive laissée à elle-même va devenir caduque » (Mt 13,12, note h) et que la tradition orale n'était qu'un « prétexte » (Mt 15,2, note e) pour renchérir sur elle.

Dans ses notes explicatives sur la Passion, la Bible de Jérusalem devrait expliquer plus clairement qu'elle ne le fait (Mt 27,2, note d) la limitation imposée par Rome aux juifs dans l'imposition de la peine capitale. Elle devrait aussi employer le verbe « exécuter » plutôt que l'expression « tuer Jésus » (Jn 18,24), note c) en parlant de la décision des autorités juives. Enfin, s'il est vrai que « tout Israël sera sauvé » (Rm 11,26), on ne voit pas pourquoi la Bible de Jérusalem parle de « séparation définitive » (Jn 13, 33, note g) entre Jésus et les juifs au moment de sa mort.

Tout au long des textes évangéliques qui évoquent la vie publique de Jésus, les notes font souvent allusion à l'opposition que le Christ rencontre dans son milieu. Jésus n'ayant vécu qu'au sein du peuple juif, il n'a pas eu d'autres interlocuteurs que ses compatriotes, aussi l'expression

«les Juifs » qui revient constamment dans les notes pour désigner ceux qui mettent en question l'enseignement du Christ risque-t-elle d'induire en erreur, surtout les esprits peu avertis; ne serait-il pas plus simple et plus juste de dire « les interlocuteurs de Jésus »? Les explications de Jn 5,17, note c et 8,15, note b; 10,24, note c; 10,30, note h et 12,35, note k, gagneraient à lever l'équivoque qu'elles créent présentement.

De même dans Jn 1,11, note h, la phrase
«les siens ne l'ont pas reçu » est appliquée au
«peuple juif » alors que, parallèle à l'expression
«le monde ne l'a pas connu », elle doit être entendue de tous les hommes, dont les interlocuteurs juifs de Jésus sont les représentants.

Un dernier détail pourra servir à souligner le genre d'équivoque qu'il faut éviter dans les explications. Commentant la rencontre de Jésus et de la Samaritaine au puits de Jacob, Jn 4,9, note e, dit que « les Juifs haïssaient les Samaritains »,sans mentionner que ceux-ci le leur rendaient bien... Il serait plus juste de dire que juifs et samaritains se haïssaient mutuellement.

La liste de nos remarques ne se veut pas exhaustive. Qu'il nous suffise d'avoir attiré l'attention sur quelques faiblesses et équivoques, qu'il sera facile d'éviter lors d'une révision des notes de la Bible de Jérusalem.

Nous souhaitons qu'une prochaine édition soit entièrement relue, tant pour la traduction que pour les titres et les notes explicatives, par un comité qui, sans briller nécessairement par ses connaissances scientifiques en matière d'exégèse, serait sensibilisé au problème des relations entre chrétiens et juifs et chercherait à éliminer tout ce qui pourrait donner prise à des préjugés.

Jean Martucci Sr Marie Noëlle, N.D.S.




2. Remarques sur la Bible protestante

Dans des Bibles protestantes récemment éditées en Amérique, les traductions, les notes et les commentaires se soucient peu des conséquences morales que peut avoir la façon dont on présente les juifs et le judaïsme. Les auteurs ne semblent guère conscients ni soucieux des problèmes de l'anti-judaïsme et de l'antisémitisme. En une brève recension, nous ne pouvons renvoyer qu'à quelques passages cruciaux du Nouveau Testament, et à la façon dont on les traite dans certaines publications.

MATTHIEU 27,25. Dans cette cause célèbre, « tout le peuple » dans la version traditionnelle de King James, devient « le peuple » dans la New English Bible, et « la foule tout entière » dans le Phillips New Testament. La Interpreter's Bible, largement utilisée par les pasteurs et les enseignants américains, tout en constatant que le verset est représentatif de « l'anti-judaïsme des chrétiens à venir » (comme le fait la Harper's Annotated Bible Series), ajoute alors, de façon singulière, « tandis que tout le peuple n'était pas apostat comme le laisse entendre le récit de Matthieu, le monde juif, cependant, fut infidèle et ne peut être exempt de faute ». Harper's New Testament Commentary - Matthew souligne que « peu de juifs » eurent part à la décision et que « les générations postérieures ne doivent pas en être rendues responsables ».

Dans JEAN 10, 24-39, et en d'autres passages la Harper's Annotated Bible Series restreint le sens du terme « les juifs » aux « autorités juives », contrairement à la plupart des traductions protestantes qui gardent sans changement ni explication l'expression générale de Jean « les juifs ». (La Harper's Annotated Bible indique à propos de 19,7, « il n'y avait pas de telle loi ».) La Oxford Annotated Bible affirme que « les juifs accusèrent Jésus de trahison politique ». La Interpreter's Bible dit que « ses ennemis » trouvèrent Jésus au portique de Salomon.

Dans son commentaire des ACTES 12,1-25, la Anchor Bible déclare sans réserve: « Les juifs persécutaient leurs compatriotes chrétiens toutes les fois qu'ils le pouvaient. Comme ils avaient fait mourrir Jésus, ainsi lapidèrent-ils Etienne, et au cours de la persécution étendue qui s'ensuivit, tentèrent-ils de réduire les disciples au silence par l'emprisonnement et la mort ». (Pour une critique de cette généralisation, voir l'analyse de D.R.A. Hare, presbytérien spécialiste du Nouveau Testament. * Le rapport entre les persécutions des chrétiens par les juifs et par les gentils, Journal of Ecumenical Studies, été 1967, pp. 446-456.) Au sujet des Actes 15, 10 le même ouvrage de la Anchor Bible maintient que « la Loi ne peut sauver ni juifs ni gentils, mais que la grâce du Seigneur Jésus peut sauver les uns et les autres ». (Le judaïsme enseigne-t-il, en fait, que la loi détient un pouvoir sotériologique?)

ROMAINS 9,3-20. Le Harper's New Testament Commentary - Romans allègue: « L'Ancien Testament démontre que les juifs, et a fortiori tous les autres hommes, sont coupables devant Dieu. La faute des juifs est à présent prouvée (par les Prophètes et les Ecritures), et de plus nous savons que la loi les condamne aussi ». Cependant, on nous prévient que « la loi » est identique à « la pratique religieuse ». Au sujet de Romains 11,7-12, la Oxford Annotated Bible atteste que « la résistance des foules juives à l'Evangile est providentielle; Dieu a endurci leur coeur pour un motif d'amour, à savoir pour qu'il soit donné aux gentils d'entendre et d'accueillir l'Evangile ». (Le Phillip's New Testament met une majuscule au mot « Loi » dans les épîtres de Saint Paul, alors que beaucoup d'autres versions emploient « loi » avec une minuscule.)

DEUXIÈME ÉPÎTRE aux CORINTHIENS 3,14-15. La Oxford Annotated Bible explique: « Dans le Christ, on saisit le caractère transitoire de l'Ancien Testament et reconnaît la gloire et la liberté du Nouveau ». Pour la Interpreter's Bible, Paul affirme clairement que seuls les chrétiens « interprètent exactement l'Ancien Testament, bien que par ailleurs elle applique « l'endurcissement » aux hommes en général. (Au sujet de Hébreux 8,13, la Interpreter's Bible explique que « la vieille crainte tremblante du jugement est remplacée par une foi qui est confiante ».)

PREMIÈRE ÉPÎTRE aux THE S SALONICIENS 2,14-16. La Interpreter's Bible cherche à éclairer et peut-être à adoucir ce passage sévère: « Quand il parle des juifs en général Paul pense sans aucun doute au parti des Pharisiens... car ils étaient les chefs du peuple ». Le commentaire se poursuit par une critique du pharisaïsme chrétien.

A. Roy Eckardt



3. Die Heilige Schrift des Alten und Neuen Testaments Verlag der Zwingli-Bible, Zürich.

La Bible de Zürich est la traduction allemande la plus répandue parmi les protestants de Suisse. Beaucoup de catholiques s'en servent également. Elle donne le texte avec très peu de notes, ce qui réduit la possibilité de remarques positives ou négatives sur le judaïsme. Mais les nombreuses indications de références et passages parallèles, renvoyant de l'Ancien Testament au Nouveau, et réciproquement, font apparaître clairement le lien entre les deux. Dans un appendice, la Bible explique quelques thèmes principaux. Les commentaires s'appuient sur des faits et ne contiennent aucune animosité à l'égard du judaïsme. Le souci d'exactitude du rédacteur (dans les limites restreintes de ce qui est expliqué) apparaît bien dans le commentaire suivant sur les Pharisiens:

« Les Pharisiens: (littéralement, les séparés) représentaient une tendance parmi les juifs, qui devint de plus en plus influente pendant les deux derniers siècles avant Jésus-Christ. Ils insistaient sur une observance méticuleuse des prescriptionsde l'A.T., tout en y ajoutant un grand nombre de " traditions " (cf. Mc 7, 3-13) qui règlaient la vie et la semaient de restrictions à chaque pas... Ces traditions à leur tour donnèrent lieu à des prescriptions sans but (comme par exemple: Mat 23, 23)... Les Pharisiens se séparèrent du restant du peuple qui ne pouvait observer ces minuties...

Quoiqu'à peine six mille, ils formaient un corps qui détenait une autorité très grande: car ils étaient seuls à pouvoir appliquer la Loi de Dieu à la vie quotidienne. Le N.T. nous en montre presque exclusivement les aspects négatifs. Mais il ne faut pas oublier qu'à la base du pharisaïsme se trouve un sens religieux authentique, dont hérita aussi St. Paul ».

Pr R. Schmid



Editions oecuméniques de la Bible

« Comme la parole de Dieu doit toujours être à la disposition de toutes les époques, l'Eglise avec une maternelle sollicitude se préoccupe que des versions valables et exactes soient écrites en des langues diverses, surtout à partir des textes originaux des Livres saints. Que si une occasion favorable se présentant, et avec l'approbation de l'autorité de l'Eglise, ces versions sont composées en collaboration même avec les frères séparés, elle pourront être utilisées par tous les chrétiens ». Dei Verbum No 22

Ces dernières années, le mouvement oecuménique et le renouveau biblique ont fourni maintes occasions de collaboration étroite entre chrétiens et juifs. Leurs efforts communs en vue de traductions acceptables par tous ont abouti à des résultats variables.

Aux U.S.A., on annonça en 1964 la Anchor Bible, bien connue à présent. Quand elle sera complète, elle comprendra 49 volumes contenant chacune un ou plusieurs livres de la Bible, avec commentaire d'un auteur spécialiste pour chacun d'eux.

Dans l'éditorial de chaque volume nous lisons: ...La Anchor Bible est un projet de portée internationale et interconfessionelle. Des spécialistes protestants, catholiques et juifs de plusieurs pays contribuent à ces divers volumes. Le projet n'est patronné par aucune organisation ecclésiastique et ne veut refléter aucune doctrine théologique en particulier.

Bien que cette édition prétende marquer une nouvelle période de collaboration entre spécialistes de recherche biblique, plusieurs commentaires donnent l'impression que les attitudes anti-juives traditionnelles n'ont guère été évitées, par exemple dans les Actes des Apôtres pages LXIV et 21. La collaboration semblerait avoir manqué son but.

L'Edition Planète, parue il y plusieurs années en France, en 3 volumes, a comme texte de base celui de la Bible de Jérusalem. Les introductions, indépendantes les unes des autres, sont faites par des catholiques, des protestants, des orthodoxes et des juifs. Un correspondant de France l'a appelée « édition de luxe »: elle semble destinée davantage à paraître sur un lutrin qu'à servir à un travail oecuménique.

Une traduction qui doit paraître cette année est la Bibbia Concordata. Ce projet conçu à Rome avant Vatican II a obtenu la collaboration de représentants du catholicisme, de l'orthodoxie, du protestantisme et du judaïsme. Ceux-ci se réunissent pour discuter les traductions, et quand tous ne sont pas d'accord, des notes donnent le point de vue des trois autres confessions. Puisque le N.T. ne concerne pas directement les juifs, ils se sont abstenus de le commenter.

« En France, catholiques, protestants et orthodoxes se sont récemment mis d'accord sur le projet de publier, non seulement un texte commun de la Bible, mais une édition comprenant un bref commentaire que tous acceptent » Herder Correspondence, Juin 1967, p. 167). Puisque cette publication doit paraître sous le titre Bible Oecuménique, on a préféré en limiter la collaboration aux seuls chrétiens. Aujourd'hui, un livre, l'Epître aux Romains, a déjà paru.

Une autre expérience fut tentée en Hollande en 1962: les Phoenix Bijbel Pockets, série de 30 livres de poche. Cette entreprise oecuménique de traductions et commentaires, réalisée par des exégètes chrétiens et juifs, est remarquable par l'absence totale de tendances apologétiques, ou de polémiques. Chaque collaborateur lisait les manuscrits des autres, et pouvait demander et obtenir des modifications là où cela semblait nécessaire. Le texte final était formulé de sorte que chacun puisse respecter l'opinion de l'autre, sans pour autant trahir l'expression de la foi de l'auteur. Bien que les chrétiens seulement soientresponsables des traductions du N.T., des spécia• listes juifs y ont cependant ajouté des commentaires, qui donnent aux textes les nuances qui proviennent de leur cadre juif.

Il faut mentionner aussi l'approbation par le Saint Siège de la coopération catholique et protestante dans le travail biblique. L'Eglise catholique collabore actuellement avec les « United Bible Societies » qui ont déjà une vieille expérience de la traduction, la publication et la distribution de l'Ecriture en langues vulgaires, pour un prix à la portée de tous, spécialement dans les pays sous-développés. Le P. Walter Abbott, assistant du Cardinal Bea, a été chargé par le Pape Paul VI de superviser la collaboration catholique aux UBS, dans les différentes parties du monde.

En ce qui concerne la collaboration judéo-chrétienne dans les traductions de la Bible, nous pouvons fournir sur la situation dans le monde la vue d'ensemble que voici.

Dans de nombreux pays une telle collaboration est impossible, à cause de l'absence de population juive ou de leur petit nombre: c'est le cas pour le Kenya ou pour Ceylan. Ailleurs, elle est impossible pour des raisons politiques. Dans d'autres pays encore, la collaboration est désirée mais pas encore réalisée, par exemple, en Lithuanie, d'où on a écrit: « Nous serions heureux que les autorités ecclésiastiques supérieures approuvent une version réalisée en commun avec les juifs; quant à nous, nous n'en avons malheureusement pas les moyens ni la compétence » et au Pays de Galles: « Je ne connais pas de juifs compétents en gallois; mais ils seraient bienvenus ». Enfin, dans plusieurs pays, comme nous l'avons montré plus haut dans cet article, une vraie collaboration a déjà été réalisée.

A. K. Willett

 

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