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SIDIC Periodical XII - 1979/2
Daniel: approche juive et chrétienne (Pages 04 - 08)

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Sens et portée du Livre de Daniel
Asher Finkel

 

Si nous considérons le Livre de Daniel à la lumière de la section apocalyptique (Dn. 11, 2 - 12, 4), nous voyons qu'il reflète une connaissance historique d'événements qui vont de Darius II à Antiochus IV. La dernière rédaction semble, par conséquent, avoir été préparée au début de la période asmonéenne, opinion soutenue par le philosophe Porphyre au Me siècle de l'ère chrétienne (cité par Jérôme dans son Commentaire sur Daniel).' La tradition rabbinique soutient également (T.B. Baba-Bathra 15a) que Daniel fut inclus dans les Écritures par les membres de la Grande Synagogue. C'étaient les représentants religieux de l'État juif théocratique et ils se rencontraient à certains moments critiques depuis les temps d'Esdras (Ne. 8-10) jusqu'aux jours de Simon l'Asmonéen (I M. 14, 28 s.). Ce sont eux qui, durant la période perse, introduisirent les oeuvres prophétiques, y compris Ezéchiel et les petits prophètes dans le canon scripturaire. Leur opinion prévaut aussi pour ce qui regarde la reconnaissance de la canonicité des derniers versets de Malachie (3, 22-24) qui réaffirment l'autorité divine du Pentateuque. D'autre part, ils reconnaissent que, de leur temps, la prophétie a cessé (comparer avec Seder Olam Rabba 30) et que la seconde partie du Canon est désormais close; car ils anticipent la restauration de la prophétie avec le retour d'Élie au Grand Jour du Seigneur. Ce nouveau point de vue eschatologique influence la manière chrétienne primitive de concevoir le lien entre le ministère du Baptiste et la venue de Jésus.

Un certain nombre d'écrits hagiographiques furent recueillis et conservés (II M. 2, 14) au début de la période asmonéenne. L'écrit plus tardif appelé Daniel fut mis au nombre des hagiographes et l'édition originale des Maccabées y fait allusion (I M. 1, 14. 54; 2, 58. 59; 9, 27). En l'espace d'un siècle, Daniel est reconnu et cité comme Écriture par les Esséniens (Textes de Qumrân), par les premiers chrétiens (Mt. 24, 15) et par les pharisiens (Tosefta Sanhedrin 13, 3). Son influence sur les différents mouvements religieux fut immense. Ainsi que Daniel dans ses réflexions sur le texte de Jérémie concernant les soixante-dix années d'exil (Dn. 9, 2; 24-27) et la projection qu'il en fait sur son temps, les maîtres esséniens font usage du pesher dans leur mode d'interprétation.

Ils projettent les paroles prophétiques sur les événements et les personnes de leur temps, tout en employant des expressions symboliques: Kittim pour Romains; Ephraim pour pharisiens; Manassé pour Asmonéens et Juda pour esséniens. C'est qu'ils considèrent les Écritures comme des révélations divines que le Maskil doit interpréter comme on le fait des rêves.2 Maskil était le nom donné au maître essénien, et Daniel mentionne souvent ce titre, le Maskil comme Daniel se faisaient fort d'être dotés d'une intuition divine. Les premiers chrétiens exprimaient leur foi en la parousie en s'appuyant sur la promesse eschatologique de Jésus au sujet du Fils de l'Homme venant sur les nuées: première vision de Daniel (Dn. 7, 13). La doctrine des pharisiens sur la résurrection et les peines futures est déjà exprimée en Daniel 12, 2. 3. 13.

Littérature apocalyptique

Les trois mouvements religieux étaient fortement marqués par l'angélologie de Daniel (anges patrons des nations, les archanges Michel et Gabriel), par son historiosophie (les quatre royaumes et la communauté des saints) et par sa chronosophie (les soixante-dix semaines et les trois ans et demi). La forme apocalyptique introduite par Daniel domina vraiment l'expression interprétative de tout visionnaire dans les oeuvres rabbiniques et chrétiennes qui suivirent. A la suite de la destruction du Second Temple, des apocalypses apparurent (telles que le quatrième Esdras, le Baruch Syriaque et l'Apocalypse du nouveau Testament). Les visions de Daniel furent interprétées en fonction de la catastrophe du moment (Mc. 13, 14 et les passages parallèles; le Commentaire de Jérôme sur Daniel au nom des Hébreux). Car Daniel présentait, venant d'au-delà de l'ordre terrestre, l'explication de changements historiques marqués par la tribulation et le bouleversement. Sa vision requérait une interprétation angélique. Ceci encouragea d'autres auteurs à chercher une ultérieure interprétation visionnaire ou auditive des changements catastrophiques auxquels ils faisaient face. L'apocalypse de Daniel, en tant que réponse cognitive aux changements et aux crises, engendra de nouvelles apocalypses en d'autres temps critiques.

Le caractère pseudonyme du personnage Daniel révèle un phénomène d'association d'idées dans l'expérience du visionnaire. Le Daniel du temps d'Antiochus IV se fond avec le Daniel de la période perse qui est lui-même un avec le déporté judéen du règne de Nabuchodonosor. Ce dernier assume la personnalité de Joseph, l'interprète exilé des rêves du roi, et entre dans la catégorie des sages aux cheveux blancs, les Vieillards du Proche-Orient antique (voir Ezéchiel 14, 14 et le récit ougaritique d'Aqhat). Le même phénomène se retrouve dans les écrits apocalyptiques plus tardifs qui assument la personnalité de Daniel et adoptent les noms de personnages bibliques. Ceux-ci, comme Daniel, parviennent à une extase piétiste après une veillée de prière et un jeûne accompagné d'une méditation sur les Écritures et sur des questions concernant la théodicée. Ils perçoivent des images mythologiques individuelles, venues du domaine du symbole, qui doivent être projetées sur le plan humain, dans l'histoire, à des moments précis et avec une signification collective. Ils cherchent l'aide d'un angelus revelator pour transposer leur conscience onirique en termes de conscience historique. Cette manière de s'exprimer en symboles et d'interpréter les événements est enracinée dans le système religieux biblique qui gouvernait la vie des auteurs d'apocalypses.

En Daniel 7, par exemple, la vision symbolique consiste en quatre animaux distincts et un homme individuel. Leur projection sur le monde de l'histoire concerne des collectivités: les nations sont vues comme des empires de bêtes féroces et la communauté formée d'hommes justes comme un royaume humain. L'animal signifie guerre, destruction et conquête dans une histoire agressive où le plus fort domine. La bête surgit de la mer, cette grande profondeur chaotique. Dans la tradition biblique, la mer représente l'étape antérieure au jaillissement de la lumière de Dieu. Les empires des bêtes ne professent pas la foi au Dieu de la Bible. La silhouette humaine, par contraste, apparaît sur les nuages et représente une communauté sainte, modèle biblique (Ex. 19, 6). Les images individuelles successives représentent l'écoulement du temps. Projetée sur le plan historique, cette séquence se réfère à la succession des empires. Pour les derniers auteurs d'apocalypses et leurs interprètes, l'image glisse d'un empire à l'autre. Le quatrième animal, c'est Rome au moment de la destruction du Second Temple.

L'apocalypse, toutefois, n'est pas seulement une historiosophie ou une eschatologie; elle est aussi une théosophie (une révélation sur les palais célestes et sur le trône de Dieu) et une cosmosophie (une révélation sur la création). Les révélations théosophiques et cosmosophiques apparaissent durant la période asmonéenne et sont attribuées à Enoch? Les premières se font en rapport avec l'ouvrage tannaïtique sur la Merkabah (le char divin cité en Ezéchiel 1); les secondes se rattachent au midrash sur la création (en relation avec Genèse 1). Ces traditions furent transmises et développées tout au long de l'apocalypse historiosophique (comparer les passages théosophiques et historiosophiques dans l'Apocalypse, chapitres 4 et 5 et 6 à 22 respectivement. Le commentaire tannaïtique de Daniel 2, 21-22 suggère une semblable association:

« Il (Dieu) donne la sagesse au sage », c'est-à-dire à Joseph le juste. « Et la connaissance à ceux qui comprennent », c'est-à-dire à Daniel. « Il révèle les profondeurs », c'est-à-dire la dimension profonde de la Merkabah, « et les choses cachées », autrement dit l'oeuvre de la création. « Il connaît ce qui est dans les ténèbres », c'est-à-dire le châtiment dû au méchant et qu'il subira dans la Géhenne. « Et le lumière habite avec lui », c'est la récompense méritée que les justes auront dans l'avenir. (Seder Olam Rabba 30, à la fin).

Il semble que les apocalypses historiosophiques de Daniel aient surgi dans les cercles hassidiens.4 Elles soutinrent la révolte des Maccabées et donnèrent naissance à l'essénisme et au pharisaïsme. Ces mouvements, favorisaient une vision eschatologique de la vie à la manière des concepts apocalyptiques, malgré les différences dans l'application pratique. Ceci nous conduit_à souligner l'importance du Livre de Daniel pour la communauté juive. D'une part il reflète la pensée des hassidiens, ces piétistes qui vivaient avant les Maccabées. Leur engagement total envers Dieu, jusque dans la mort, traça la route de l'indépendance religieuse et politique, occasion temporelle de l'accomplissement des promesses messianiques. D'autre part il approfondit la dimension heilsgeschichtlich dans l'existence juive, car Daniel présente une histoire universelle de rédemption, dans laquelle ceux qui servent Dieu et sont fidèles à l'alliance jouent un rôle central, aussi bien en exil que dans leur propre pays. Daniel étend les limites des premières visions prophétiques de l'histoire. Il jette aussi un pont entre les préoccupations religieuses de la Diaspora et celles des habitants de la Judée. Ceci se reflète clairement dans le contenu du livre qui introduit des récits héroïques de juifs martyrs en exil dans les visions d'un juif intéressé aux événements historiques concernant son pays et le Temple.

Daniel 1-6

Le Livre de Daniel comporte deux parties. La première (ch. 1 à 6) consiste en récits au sujet des juifs déportés (1, 3, 6) et explique les rêves et les actions des rois babyloniens (2, 4, 5). Les juifs qui sont au service du roi demeurent fermes dans leur foi en Dieu et dans leur pratique religieuse. Ils sont récompensés à la suite de leurs dernières épreuves, celle du feu et de la fosse aux lions. Au service du roi, ils deviennent eunuques (selon Jérôme et les rabbis) et ce n'est pas par des moyens d'ordre bio-social qu'ils obtiennent leur récompense (Is. 56, 4-5). Leur exemple encourage les juifs de la Diaspora à rejeter l'idolâtrie et à rechercher autre chose que des biens d'ordre matériel. Il enseigne que la véritable union à Dieu, y compris dans la mort, fructifie en une récompense perpétuelle. Daniel énonce un principe: « servir le Maître sans recevoir de récompense », principe déjà formulé par Antigonos (Mishnah Aboth 1, 3). Cet enseignement reflète la position des hassidiens dont on dit qu'elle aurait abouti au schisme pharisiens-sadducéens (Aboth de R. Nathan 1, 5). Il est significatif de voir que Daniel encourage au service de Dieu par la prière non accompagnée de sacrifices. L'expérience de l'exil avait donné naissance à la synagogue comme substitut du Temple. En fin de compte, il arriva que Temple et synagogues existent côte à côte en Judée; c'est ce que suggèrent le nouveau Testament et lestémoignages archéologiques. Ces premiers chapitres de Daniel exhortent les juifs exilés aussi bien que ceux de Jérusalem à intensifier la vie liturgique (Dn. 6, 11) et à accomplir de bonnes actions (Dn. 4, 24), deux points qui deviendront aussi la réponse spécifique du judaïsme après la destruction du Second Temple (Aboth de R. Nathan I, 4; II, 8). La tradition tannaïtique maintient que l'exemple de Daniel illustre ce mouvement.

Nous voyons que Daniel a exercé les oeuvres de miséricorde. Qu'étaient ces oeuvres de miséricorde? Si vous voulez dire qu'il offrit des sacrifices au pays de Babylone, notez qu'il est déjà dit: « Prenez garde de ne pas offrir vos sacrifices en n'importe quel lieu » (Dt. 12, 13-14). Qu'étaient donc ces oeuvres de miséricorde? Il prépare l'épouse (pour le mariage), il accompagne les morts et il fait l'aumône aux pauvres. Il prie trois fois par jour et sa prière est agréée comme il est écrit en Daniel 6, 11 (ibid. I, 4; cf. Tosefta Berakhot 3, 8).

L'accomplissement de la justice est charité (voir le parallélisme en Daniel 4, 24) tandis que les exemples d'imitatio Dei sont appelés oeuvres de miséricorde (voir Targum Pal. sur Gn. 35, 9 et Dt. 34, 6). Ces deux formes de praxis (la justice et la miséricorde) avec la prière vocale, caractérisent la vie religieuse des hassidiens depuis l'époque de Daniel jusqu'à l'époque tannaïtique.5 Elles seront incorporées dans la vie des esséniens, dans celle des premiers chrétiens et dans celle des rabbis éloignés du Temple et de son cultes. 6

La première partie de Daniel reflète une conviction religieuse, la conscience que l'adoration n'est due qu'à Dieu. Elle relate donc les rêves et les actions des rois sous la forme d'une argumentation théologique: tout pouvoir humain, comme la vie elle-même, dépend de la volonté divine. Le péché des puissants de Babylone réside dans leur arrogance soit leur propre exaltation (voir Is. 14, 4-23). C'est pourquoi la confession du Dieu vivant attribuée au roi est vue comme un acte d'humilité (Dn. 3, 31-33; 4, 31-32). On cite à l'appui l'exemple du départ de Nabonide: il quitte la cité royale pour aller à Teima dans le désert d'Arabie.'. L'histoire de la déchéance du roi commence et se termine par une confession; et le nom qui est donné au roi est celui de Nabuchodonosor, le cosmocrator terrestre des Babyloniens (Esther Rabba 1, 9). L'exemple de Nabonide fait contraste avec celui de son fils et co-régent, Balthazar. C'est l'arrogance de ce dernier qui, selon Daniel, amène la chute de l'empire babylonien. La confession du Dieu vivant par un païen révèle aussi les efforts du prosélytisme juif parmi les idolâtres de la Diaspora. Cela est mentionné dans Isaïe (56, 4). Car la Communauté de l'exil assume au nom de Dieu un rôle pédagogique selon ce qui est affirmé par la Deutéro-Isaïe (une lumière pour les nations et un peuple témoin). Le prosélytisme juif se poursuit tout au long de la période du Second Temple (Est. 8, 17; Mt. 23, 15). Il prépare un terrain fertile pour l'expansion du christianismes La première partie de Daniel, redisons-le, présente la pratique des juifs exilés comme semblable à celle qu'observait la communauté de Judée.

La confession du roi consiste dans l'acceptation du jugement divin (Dn. 4, 34 et Ps. 111, 7) et la reconnaissance de la toute-puissance divine (Dn. 3, 33; 4, 31 et Ps. 145, 13). Ce deuxième aspect apparaît dans le Hallel psalmique (T. B. Sabbath 118b; Berakhot 4b) qui était chanté sous forme responsoriale par la communauté. Le rouleau des Psaumes de Qumrân 9 conserve l'antienne doxologique: « Que son Nom soit béni à jamais ». C'était une pratique du Temple (Mishnah Yoma 3, 8) et Daniel en donne la forme araméenne (Dn. 2, 20). Il est significatif de voir que le Hallel égyptien (Ps. 115) est associé, dans la tradition rabbinique, avec la confession martyrologique des trois jeunes gens. L'addition apocryphe faite à Daniel met sur les lèvres des trois jeunes gens un autre chant de louange avec la doxologie: « Loué sois-tu et exalté éternellement ».

Daniel 7-12

Le fond de tableau liturgique est nettement marqué dans la seconde partie du livre (Dn. ch. 7 à 12). Cette partie comporte deux visions avec leur interprétation (Dn. 7; 8) et deux « auditions » (Dn. 9, 22-27; 10, 11. 12. 4). Entre les visions et les « auditions » se place une prière de Daniel (Dn. 9, 4-19). Elle commence par une invocation à Dieu (voir Dt. 10, 17; Jr. 32, 18; Ne. 9, 30 et la Amidah) et un appel à un amour « théopathique » exprimé dans une relation d'alliance (Dt. 7, 9; Ne. 9, 32). Elle se poursuit par une confession des péchés et l'acceptation du jugement divin à la lumière de l'avertissement mosaïque (Dn. 9, 11-13 renvoie à Dt. 29, 20, à la lumière du ch. 28). La prière se termine par une supplication et une lamentation sur la profanation du Temple.

Antiochus IV avait profané le Temple en y introduisant l'abomination de la désolation (la statue de Zeus Olympien) au lieu même où l'on offrait les sacrifices quotidiens. Cela provoqua une crise religieuse terrible. Pour Daniel, ce fut une profonde et douloureuse expérience (Dt. 9, 2-3), expérience qui se traduisit par des actes (période de jeûne et gestes de deuil), par la réflexion sur les Écritures et la prière. La gravité de la situation suscite en lui une réponse dialectique. D'une part, Daniel accepte le jugement divin à la lumière de l'avertissement de Moïse: « Le Seigneur notre Dieu est juste dans toutes ses oeuvres » (Dn. 9, 14). D'autre part, Daniel se demande pourquoi le Dieu tout-puissant n'intervient pas, étant donné la promesse prophétique « Soixante-dix ans accomplis, et ce sera la désolation de Jérusalem » (Dn. 9, 2; Jr. 25, 12). La tradition rabbinique note que, dans la prière adressée à Dieu par Daniel, l'appellation « Dieu tout-puissant » est omise. Car le texte de Daniel soulève la question: « Des étrangers ont dominé ses fils, où sont donc ses actes de puissance? » (T.B. Yoma 69b).

Daniel se lamente aussi pendant trois semaines, durant le mois du pèlerinage festif de la Pâque (Dn. 10, 2-4). Il s'abstient de vin, de viande et de pain, mets choisis pour la fête. Car la célébration du drame biblique de la délivrance s'est changée pour lui en une période de gémissement et de deuil. La Pâque était lourde de tout le poids des grandes espérances qui animaient Israël. C'était cet événement libérateur du passé qui façonnait la destinée et l'orientation eschatologique de la société biblique. Le sens profond du salut dans l'histoire, que Daniel avait connu, donne naissance en lui à des questions sérieuses et troublantes en face de la crise religieuse nationale.

Daniel ne met pas en cause l'existence de Dieu, mais il demande à la présence providentielle de Dieu de lui donner une orientation. Il entre dans une période de lamentation. Cette lamentation représente une plénitude de tristesse et de désespoir qui provient du sens de l'absence de Dieu dans l'histoire de son peuple. Elle suscite d'autre part une plénitude de foi et d'espérance telle que la reflète l'ardent désir intérieur de Daniel pour le retour de la présence divine.

La source d'une vision plus large

Cette polarité dans l'expérience de la tristesse conduit à une conscience apocalyptique qui reconnaît la présence durable et permanente de Dieu dans un royaume celeste. Elle élargit le périmètre du salut dans l'histoire jusqu'à des proportions universelles, car elle considère l'histoire du genre humain à partir d'un point de vue divin. Le salut n'est pas limité à une époque particulière ni à une promesse particulière déjà réalisée dans le passé. La présence de Dieu au niveau terrestre reste élusive." Le plan du salut divin embrasse la totalité de l'histoire humaine. La présence de Dieu au ciel est permanente, mais sur terre, il se manifeste de façon intermittente. L'intuition acquise par Daniel a largement influencé les esprits formés par la Bible et qui, plus tard, en d'autres temps critiques, durent affronter les mêmes questions angoissantes. La théologie de Daniel sur la présence joue un rôle central dans la naissance d'une authentique conscience oecuménique à partager entre chétiens et juifs.



* Le Rabbin Asher Finkel, né a Jérusalem, obtint son doctorat à l'Université de Tübingen; il appartient maintenant au corps professoral de l'Institut d'études judéo-chrétiennes de l'Université de Seton Hall (New Jersey, U.S.A.); il est l'auteur d'un livre intitulé, The Pharisees and the Teacher of Nazareth, Leiden, Brill, 1974.
1. P.M. CASEY, « Porphyry and the Origin of the Book of Daniel », Journal of Theological Studies 27, 1976, p. 15-33.
2. A. FINKEL, « The Pesher of Dreams and Scriptures », Revue de Qumrân 4, 1963, p. 357-370.
3. Voir J.T. MILIIC, The Books of Enoch: Fragments of Qumran Cave 4, New York, Oxford University Press, 1976.
4. LOUIS HARTMAN et ALEXANDER Di LELLA, The Book of Daniel (Anchor Bible) Garden City, Doubleday, 1978, p. 43-45.
5. Voir ADOLPH BUECHLER, Types of Jewish Palestinian Piety, New York, Ktav, 1968, réimpression.
6. GEZA VERMES dans Jesus the Jew (New York, MacMillan, 1973), met ce type de judaïsme charismatique en rapport avec le ministère de Jésus.
7. J.T. Miux, « Prière de Nabonide » et autres écrits d'un cycle de Daniel, fragments de Qumrân 4. Revue Biblique 63, 1956, p. 407-415. On peut en trouver une traduction anglaise dans G. VERMES, The Dead Sea Scrolls in English, Penguin Books, 1975, p. 229.
8. J. KLAUSNER, From Jesus to Paul, édition hébraïque, 1951.
9. JAMES A. SANDERS, The Psalms Scroll of Qumran Cave 11. Discoveries in the Judean Desert IV, Oxford, Clarendon Press, 1965, p. 66.
10. Voir SAMUEL TERRIEN, The Elusive Presence: Toward a New Biblical Theology, New York, Harper and Row, 1978.

 

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