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Collaboration interconfessionnelle dans différents pays
Divers
Aux Etats-Unis
L'ouverture du Concile Vatican II, en 1962, incita beaucoup de catholiques américains à collaborer étroitement avec les juifs et les protestants dans l'action sociale. Des centaines de prêtres et de religieuses ainsi que des laïcs catholiques se réunirent à Chicago en janvier 1963 pour la Conférence nationale sur la question religieuse et raciale; un grand nombre de ministres protestants et de rabbins y assistèrent. De cette réunion sans précédent naquirent d'innombrables comités interconfessionnels d'un bout à l'autre du pays, où, dans une belle collaboration, on venait en aide aux pauvres et aux chômeurs; ensemble aussi, on luttait contre la discrimination raciale. Pour la première fois dans notre histoire, catholiques et juifs travaillèrent côte à côte dans des entreprises civiles, ce qui leur procura une compréhension réciproque au point de vue humain et spirituel.
Lors de la grande Marche de Protestation à Selma (Alabama) en 1965, religieuses et prêtres, pasteurs et rabbins défilèrent, la main dans la main, afin de manifester leur commun souci de l'injustice commise envers les Noirs. Ces contacts personnels présentèrent un vif contraste avec la forme traditionnellement compassée des associations où catholiques, protestants et juifs, tout en dégustant leur tasse de thé et en croquant leurs gâteaux secs, cachaient leurs antagonismes réciproques profondément enracinés.
Lorsqu'en 1965 Vatican II approuva la Déclaration concernant la religion juive, on aurait pu s'attendre à une intensification de la collaboration judéo-chrétienne dans l'action sociale. Au contraire, ce mouvement se ralentit pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, la nouvelle force prise par le « Black Power » découragea nombre de Blancs de toute croyance de participer au mouvement des Droits civils. Les Noirs informèrent les Blancs qu'on n'avait pas besoin d'eux dans les ghettos. Pendant des années, les juifs avaient pris la tête dans le mouvement des Droits civils, mais maintenant, les militants Noirs méprisent l'aide des Blancs libéraux, la regardant comme une sorte de paternalisme. De plus, les extrémistes Noirs malmenèrent brutalement certains juifs dans les grandes villes et la violence de ces quelques Noirs radicaux créa l'impression fausse que tous les Noirs étaient antisémites. Les Blancs américains continuèrent à aider les Noirs de diverses façons, mais non plus dans cette étroite union qui avait amené d'intimes relations personnelles entre catholiques et juifs.
Par ailleurs, les juifs orthodoxes commencèrent à regarder avec suspicion la collaboration dans l'action sociale recommandée par les Evêques de Vatican II. S'appuyant sur des siècles de persécution et de conversions forcées, les juifs orthodoxes pensèrent qu'un dialogue théologique risquait de se révéler un piège à conversion, et ils soupçonnèrent toute collaboration dans l'action sociale d'être un terrain propice à de subtiles implications théologiques. En général, ils évitèrent tout dialogue théologique explicite et se tinrent également à l'écart de tout engagement dans l'action sociale judéo-chrétienne, tout en l'approuvant en théorie. Par exemple, en 1967 du 2 au 9 mars, une conférence se tint à Boston. Elle était organisée par le Synagogue Council of America, le National Council of Churches et le Catholic Bishops' Committee for Ecumenical Affairs, et avait pour but d'étudier la formation de la conscience vis-à-vis de la guerre, de la paix, de la pauvreté, de la question raciale etc. C'était une conférence uniquement destinée à encourager la collaboration dans l'action sociale. Mais elle suscita les critiques des groupes orthodoxes et plusieurs d'entre eux se retirèrent craignant que ces discussions ne prennent un tour théologique.
Je tiens à dire que beaucoup de juifs américains comprennent que les avantages de cette collaboration dans l'action sociale valent la peine d'encourir des risques, et que ce « n'est pas juifdu tout » d'établir une ligne de démarcation entre « le dialogue religieux » et la « collaboration dans l'action sociale ». Le rabbin Marc Tanenbaum écrivait dans le Conservative Judaism, Winter 1968 (*), qu'une semblable dichotomie était une tentative de séparation entre la religion et la vie. Il citait les paroles du rabbin Kook d'Israël, un sage du judaïsme conservateur: « Le sacré ne peut exister que s'il repose sur un fondement profane, puisque la sainteté spirituelle doit reposer sur la base solide de la vie normale ».
Malheureusement, la collaboration des catholiques et des juifs dans l'action sociale subit un arrêt complet en 1967, après la Guerre des Six Jours au Moyen-Orient. Les autorités américaines n'ayant pas protesté alors que deux millions de juifs en Israël étaient menacés d'extermination par les Arabes, la sincérité oecuménique des catholiques américains fut mise en doute. L'attitude des juifs semblait signifier: « Vous, les chrétiens, vous avez gardé le silence quand 6 millions de juifs étaient exterminés par l'Allemagne, et de nouveau vous avez gardé le silence quand les Arabes étaient sur le point d'en exterminer 2 millions ». Depuis 1968, la collaboration s'est améliorée, mais « le silence chrétien » projette encore une ombre sur notre labeur en commun.
Ces deux dernières années, les catholiques américains s'éloignèrent du dialogue et de la collaboration à cause des troubles survenus dans l'Eglise elle-même: crimes dans les rues, émeutes et contestations pour Humanae Vitae. Beaucoup se sont détournés de toute collaboration au mouvement des Droits civils à cause des ennuis provoqués par le « Black Manifesto ». Ce Manifeste, né de la Conférence du développement économique des Noirs, à Détroit, le 26 avril 1969, exigeait des institutions catholiques américaines 500 millions de dollars pour « réparer » les injustices commises envers les Noirs. Quelques groupes protestants plaidèrent en faveur du paiement de « réparation », mais les catholiques et les juifs donnèrent une réponse entièrement négative. Tout en éprouvant une certaine honte et un certain remords devant les traitements infligés aux Noirs dans le passé par les organisations religieuses, catholiques et juifs ont cependant été choqués par la tactique des chefs du Manifeste, chargés de propager à outrance la révolution destinée à abattre le gouvernement « raciste », et qui ont interrompu des services religieux pour présenter leurs réclamations.
Néanmoins, quelques points lumineux figurent au tableau. Par exemple, la large contribution apportée par la communauté juive américaine au Secours du Biafra par l'intermédiaire des oeuvres catholiques et protestantes. En faveur de la Paix, juifs et catholiques ont collaboré en tant que citoyens privés, même si leurs groupes religieux, au niveau officiel, donnent l'Impression d'être favorables à la guerre du Vietnam. Plusieurs rabbins font partie du Comité de direction du mouvement contre la guerre (**), notamment le vénérable rabbin Abraham Heschel.
Dans les universités, des jeunes gens catholiques et juifs travaillent ensemble pour s'opposer à la guerre, mais leurs efforts ne sont pas liés à leur croyance. Ils se sentent rapprochés par un sentiment de fraternité humaine plus que par une collaboration oecuménique.
Les « Guidelines for Catholic—Jewish Relations », publiées par le Secrétariat des Evêques américains, encouragent les catholiques à collaborer avec les juifs pour l'action sociale, mais le milieu américain est lourd d'antagonismes de longue date entre les juifs et les chrétiens dans certaines questions sociales. Par exemple, les controverses entre l'Eglise et l'Etat sont une source permanente de frictions. Le catholique a la réputation d'être un paroissien moutonnier dominé par une hiérarchie autoritaire qui est loin de répugner à contrer le législateur. A l'heure présente, beaucoùp de juifs américains s'opposent à l'aide apportée par l'Etat aux écoles catholiques, à nos lois actuelles sur l'avortement, et aux pratiques religieuses dans les écoles publiques.
La religion a été une force qui a semé la division en Amérique; elle a créé un manque d'harmonie et des frictions dans les communautés, mais ces maux ont été causés par les barrières dressées par l'incompréhension mutuelle. Cette incompréhension s'est trouvée exacerbée du fait que juifs et catholiques appartenaient à des groupes ethniques différents qui se tenaient à distance. Des siècles de méfiance ont donc engendré une fausse image de l'un aux yeux de l'autre.
A présent, les barrières commencent à tomber, lentement mais sûrement. Par un travail fait en commun et par l'emploi de nos ressources communes pour essayer de résoudre les problèmes de nos communautés civiles, juifs et catholiques parviendront à se regarder comme des frères en esprit, autant que comme citoyens d'un même pays.
Au Canada
L'organisation de l'action sociale interconfessionnelle dans ce pays remonte à une dizaine d'années, au moment où le Council of Christians and Jews (C.C.J.) a été fondé au Canada par Richard D. Jones, pasteur méthodiste émigré des Etats-Unis. Le C.C.J. se définit lui-même comme « une association d'hommes et de femmes qui ont une vision spiritualiste de l'univers et qui, au moyen de l'éducation, veulent promouvoir la justice, l'amitié, la coopération, la compréhension entre tous les hommes, sans discrimination de race, de religion ou de nationalité ». Si ses débuts furent modestes, il possède aujourd'hui un bureau permanent dans six des plus grandes villes du Canada. Dans ses statuts il affirme vouloir chercher « à résoudre les problèmes communautaires en s'appuyant sur les valeurs morales communes à toute confession religieuse et à toute personne faisant partie de notre société pluraliste ».
Au début, le C.C.J. s'efforça surtout de dénoncer l'antisémitisme et de poser les premiers jalons d'un dialogue entre catholiques, protestants et juifs. Son champ d'action s'est élargi avec le temps, sans perdre de vue le domaine interconfessionnel; il assume maintenant des activités philan thropiques telles que la « Brotherhood Week », des séminaires sur le travail social, des échanges d'étudiants, pour n'en citer que quelques-unes.
En même temps que le C.C.J. prenait la tête des activités interconfessionnelles au Canada, des autorités religieuses, et des laïcs des différentes confessions accomplissaient à titre individuel un excellent travail. Le Cercle David, où les laïcs ont pris une part active, s'est constitué récemment à Montréal. Dans la ville de Québec, un groupe analogue fonctionne depuis quelques années. L'Amitié culturelle Canada français-Israël cherche à promouvoir de meilleures relations culturelles entre la communauté canadienne-française et les communautés juives, ainsi qu'avec l'Etat d'Israël.
Dans les dernières années, le dialogue entre différentes confessions s'est élargi, grâce surtout aux efforts déployés par le Rév. Roland de Corneille, pasteur anglican qui travaille en relation avec le C.C.J. En 1968 Father de Corneille et le C.C.J. ont collaboré très étroitement pour organiser et financer une conférence internationale et interconfessionnelle à Toronto sur le thème: « Overcoming the Barriers of Communication ».
Il ressort de ces faits que les relations judéo-chrétiennes ont progressé dans notre pays, et ont abouti à des réalisations intéressantes. Sans aucun doute, les préjugés et l'intolérance ont reculé durant ces dernières années. La plupart des activités se sont cependant limitées au domaine de l'éducation ou de l'échange de vue, et le nombre des réalisations où différentes confessions religieuses se sont unies pour une action sociale est encore trop faible. Il y a un an, le C.C.J. modifia ses statuts pour y inclure l'action sociale dans les cas approuvés par les directeurs; dans le passé, seule une action éducative était possible.
Le directeur du C.C.J., R. Jones a fait une intervention devant le Comité du Sénat pour appuyer un projet de loi amendant le Code Criminel; l'incitation au génocide et la haine contre un groupe devraient être punies par la loi, le droit à la liberté de parole étant toutefois garanti. Il est encourageant aussi de voir se développer dans beaucoup de villes canadiennes un mouvement pour créer entre catholiques, protestants et juifsles United Welfare Councils. Leur but est de trouver des fonds aux oeuvres d'entr'aide et de résoudre ensemble les problèmes communs. Dans le passé, chaque confession avait travaillé trop étroitement dans son propre secteur.
On peut dire en conclusion que si les réalisations sont déjà nombreuses, les possibilités le restent également. L'élément positif apporté par Vatican II dans sa Déclaration sur les juifs aidera à promouvoir la collaboration dans l'action sociale, à condition que les mesures soient prises pour que cette déclaration atteigne vraiment son but dans la conscience de « l'homme de la rue ». Les occasions qui s'offrent à nous sont illimitées.
Au Costa Rica
Au Costa-Rica, comme dans d'autres pays aussi, la collaboration entre chrétiens et juifs s'exprime par des mouvements d'éducation. La hiérarchie catholique et les dirigeants juifs ont approuvé sans condition la Confraternidad judeocristiana fondée pour éveiller entre chrétiens et juifs la compréhension et l'estime mutuelles. Depuis ses origines, ce mouvement n'a cessé de lutter pour les droits de l'homme et pour la justice sociale.
A plusieurs reprises, par la presse, et grâce aux autorités civiles, le Comité de direction a pu s'adresser à un vaste public et neutraliser les attaques contre les juifs, spécialement au début de 1960. Le Centre Elias, fondé récemment à San José, travaille activement à former les mentalités selon les orientations données par Nostra Aetate. Il trouve un écho encourageant dans le clergé, parmi les religieux et les groupes de laïcs qui consentent à participer à son action.
Chaque pays de l'Amérique Centrale a, de plus, un Institut pour les échanges culturels avec Israël, afin de diffuser les valeurs humaines des pays respectifs. La première « Convencièn de Institutos de relaciones culturales entre Israel y Centro America—Panama » a eu lieu à San José en février 1969, avec grand succès. Cet organisme devra coordonner et amplifier à l'avenir l'activité de tous ces instituts pour une meilleure connaissance et estime des peuples de ces différents pays.
A une échelle plus modeste, des groupes individuels comme les Damas Israelitis Pro-Beneficiencias poursuivent des efforts pour venir en aide à des catégories sociales défavorisées (invalides, orphelins) tant juives que chrétiennes.
Au Brésil
Les OEuvres d'Assistance Sociale au Brésil sont nombreuses, actives, et travaillent dans un esprit oecuménique. Catholiques, juifs et protestants oeuvrent ensemble, dans un seul but, un unique idéal: Servir.
Dans l'Etat de Sâo Paulo, la secrétaire de l'Aide Sociale est une juive, Suzanne Frank. Consultée personnellement, elle a affirmé qu'il n'existe aucune oeuvre sociale qui ne compte, soit dans la Direction, soit dans la partie technique, et à plus forte raison, chez les bénéficiaires, des chrétiens et des juifs.
Il serait impossible de les nommer toutes. En voici quelques-unes seulement, qui donneront une idée du dynamisme de l'Etat de Sâo Paulo, dans ce secteur:
— Liga Brasileira de Assitência qui couvre tout le Brésil. Siège: Brasilia.
— Obra de Auxilio Fraterno: Assistance aux mendiants, prisonniers, etc.
— Operaçâo Rondon: Assistance, par les Universitaires, pendant les vacances, aux populations de l'intérieur du Brésil.
En Angleterre.
En Angleterre, l'action commune est assurée par un certain nombre d'organismes sociaux. Ici encore, le plus grand effort est réalisé dans le domaine de l'éducation plutôt que dans le domaine social en tant que tel.
Le Council of Christians and Jews travaille depuis 28 ans à créer un courant de pensée qui puisse servir de fondement à l'aide mutuelle et à d'autres domaines intéressant les relations judéo-chrétiennes. Quelle que soit la forme prise par ce travail, le but est toujours le même: extirper les préjugés et promouvoir la compréhension afin de vivre en meilleure harmonie.
Une de ses dernières initiatives répond à une campagne lancée contre l'instruction religieuse dans les écoles. Le C.C.J. fait des recherches pour présenter le point de vue commun aux juifs et aux chrétiens sur ce sujet.
Le National Council of Social Service « met en relation une foule d'initiatives privées et l'action du gouvernement, et les aide à respecter et à unir leurs buts souvent différents, ainsi que leurs actions, en vue du bien général. » (Leslie FarrerGrown, président du NCSS, dans Voluntary Social Action par Margaret Brasnet, London 1969, p. VII.) Il fut fondé en 1919 pour organiser les oeuvres d'assistance déjà existantes et les services sociaux. Aujourd'hui encore, il s'informe de nouvelles initiatives pour diriger leurs forces vers le bien commun.
Il a fait récemment une recherche sur les enquêtes effectuées dans les paroisses; ceci devrait permettre d'apporter une aide plus grande aux différentes couches sociales tant sur le plan matériel que sur le plan intellectuel.
Le Social Morality Council a lancé une action collective sur des questions telles que le divorce, l'avortement, les problèmes sociaux. Il s'intéresse toujours à la formation correcte de l'opinion publique.
L'Institute of Race Relations, dont le but vise à améliorer la condition sociale des minorités, exerce la plus grande part de son activité dans les centres industriels.
En général, chrétiens et juifs collaborent au niveau social à titre personnel plutôt qu'à titre religieux.
En France
La collaboration judéo-chrétienne en matière sociale commencée dès avant la dernière guerre, — l'Hôpital Rothschild de Paris soignait déjà également des non-juifs — s'est amplifiée au moment de la persécution hitlérienne. Dès les années trente, M. Oscar de Ferenczy combattait l'antisémitisme sur le plan social, au moyen, entre autres, de son journal. Pendant la guerre, des milliers de chrétiens, appartenant ou non à des organisations sociales reconnues, ont travaillé, dans la clandestinité, à sauver des juifs, à placer leurs enfants en lieu sûr, tout en veillant sur eux. Au lendemain de celle-ci, les organisations comme le Secours Catholique, la « Cimade » protestante, et, bien sûr, l'Assistance publique de l'Etat, ont collaboré avec les organisations juives d'assistance comme le C .0 . J.A .S .0 .R le H.I .A .S., 1 '0 .S .E etc. Cette collaboration a continué depuis, au profit des réfugiés juifs venant d'Europe centrale, d'Egypte, du Maghreb. Leurs responsables sont généralement satisfaits des rapports qu'ils ont avec les organismes privés ou publics non-juifs. D'autre part, des fondations juives ont également fait profiter des non-juifs des biens et des facilités dont elles pouvaient disposer. Citons, tout d'abord dans cette catégorie les fondations de la famille de Rothschild:
• L'hôpital de ce nom a été remis à l'Assistance publique tout en continuant à bénéficier des subventions de la famille.
• Le Sanatorium pour tuberculeux de Bligny, desservi par des religieuses de St Vincent de Paul, reçoit des malades sans distinction de confession religieuse.
• La « Maison de la Chimie », comportant de grandes salles de conférences, est ouverte à tous.
• La Maison de Vieillards de Chantilly reçoit juifs et non-juifs.
• Les « Maisons Air et Lumière » à bon marché logent décemment les nécessiteux.
Il faut citer aussi le C.S.A.L. (Comité social d'aide au logement) qui travaille, aves des fonds fournis par les juifs d'Amérique, à reloger des réfugiés, juifs ou non, qui viennent s'établir en
France. A l'heure qu'il est, cet organisme a déjà construit des appartements pour quelques centaines de personnes et aidé à l'aménagement de beaucoup d'autres, ayant reçu et dépensé pour cela plus d'un million de dollars.
On sait, par ailleurs, le travail immense accompli par les écoles de l'Alliance Israélite Universelle (A.I.U.) dans tous les pays musulmans d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient: fondées pour promouvoir la culture des communautés juives de ces pays, elles ont également reçu et éduqué des milliers de musulmans. Depuis la création de l'Etat d'Israël et l'émigration massive des juifs de la plupart de ces pays, beaucoup de ces écoles ont fermé leurs portes, mais elles continuent de fonctionner sur une vaste échelle au Maroc et en Iran, où elles reçoivent sans discri_ mination tous les élèves qui se présentent. Au Maroc, elles comptent actuellement beaucoup plus d'élèves musulmans que de juifs. Les professeurs sont recrutés soit dans la communauté juive de France, soit sur place. En France, l'Alliance n'a qu'une seule école, mais ouverte à tous, à Pavillons-sous-Bois.
Notons aussi l'importante participation juive à l'oeuvre de l'Alliance Française (A.F.). Inspirée par l'A.I.U., cette Alliance est essentiellement destinée à diffuser la connaissance de la langue et de la civilisation françaises dans les pays étrangers et parmi les étrangers venus en France. Elèves et professeurs y sont recrutés sans discrimination religieuse ou raciale. De même, il faut noter, en France comme ailleurs, la forte participation juive dans l'enseignement supérieur d'Etat qui, dans sa neutralité, s'abstient de toute discrimination. Le nombre de noms juifs dans les rangs des savants de toute discipline est aussi remarquable que leurs travaux et découvertes. Ceci nous intéresse dans la mesure où l'enseignement supérieur a une portée sociale; c'est en tous cas un domaine où la collaboration entre juifs et gentils se déploie naturellement sans problèmes (à la différence de ce qui se passe actuellement en U.R.S.S.). Cependant, s'il a une grande importance du point de vue social, l'enseignement ne rentre que marginalement dans le sujet de cette enquête: il devrait faire l'objet d'une étude à part.
En Hollande.
Parmi les nombreuses organisations ayant pour but de promouvoir des relations entre chrétiens et juifs, aux Pays-Bas, nous mentionnons les suivantes:
— L'Anna Frank Stichting, dont le siège est à Amsterdam, organise des conférences internationales et des rencontres de jeunes dans le pays. Elle offre, en outre, trois fois par an, des cours sur les attitudes internationales dans la vie courante, la politique et les problèmes socioculturels.
— Le Leerhuis de la même ville fut fondé pour promouvoir la compréhension mutuelle dans les relations entre juifs et chrétiens. Il compte, parmi ses habitués, des juifs, des protestants et des catholiques. Les chrétiens deviennent de plus en plus conscients de la nécessité d'être familiarisés avec la pensée juive de l'Ancien et du Nouveau Testament, car une véritable compréhension du Christ, juif lui-même, n'est possible qu'à cette condition. Les juifs, eux aussi, apprennent à mieux connaître la pensée chrétienne. Les directeurs du Leerhuis font paraître le Compendium Rerum Judaïcarum ad Novum Testamentum avec la collaboration d'une centaine de savants de toute l'Europe, des U.S.A. et d'Israël.
Cet ouvrage traitera du Nouveau Testament à la lumière du judaïsme au temps du Christ et d'aujourd'hui; il est destiné aux théologiens et à tous ceux qu'intéressent l'étude et la compréhension du Nouveau Testament dans l'optique de l'histoire du Salut révélée aux juifs.
Toutes les initiatives mentionnées ci-dessus sont prises en charge par le Katholieke Raad voor Israël, le Nederlands Hervormde Raad voor de verhouding van Kerk en Israël et d'autresgroupes, en collaboration avec les organismes juifs.
En Israël.
Dans l'Etat d'Israël le problème des rapports et de la coopération entre juifs et chrétiens dans le domaine social se pose tout autrement que dans le reste du monde, du fait qu'en Israël c'est l'Etat, l'Etat juif dans l'occurence, qui a la responsabilité des services sociaux. Les organisations chrétiennes ne peuvent avoir, par conséquent, que le caractère d'agences volontaires.
C'est surtout dans le domaine des hôpitaux qu'une véritable révolution a eu lieu depuis la création de l'Etat. Sous le régime ottoman, et dans une large mesure sous le régime mandataire, les hôpitaux chrétiens ont rempli un rôle extrêmement important pour relever le niveau hygiénique du pays. Avec l'avènement de l'Etat d'Israël et la généralisation d'un service de santé bien à jour, les hôpitaux chrétiens devaient s'intégrer dans ce service de crainte de perdre toute utilité.
Ainsi l'Hôpital Français de Jérusalem a signé un contrat avec Malben, la filiale israélienne de l'American Jewish Distribution Committee, pour soigner les incurables atteints de cancer. L'Hôpital Italien de Haïfa s'est spécialisé lui aussi dans le soin des cancéreux et a dans le pays l'équipement le plus approprié.
Dans la région de Nazareth, l'Etat n'a pas voulu établir ses propres hôpitaux, mais il a sollicité la collaboration des différents hôpitaux déjà existants (l'Hôpital Français des Soeurs de St Vincent de Paul, l'hôpital italien des Frères de St Jean de Dieu et l'Edinburgh Missionary Hospital) pour assurer à la région un service hospitalier adéquat.
Finalement on peut mentionner la coopération de deux agences volontaires: Hadassah (The Women's Zionist Organization of America) et la délégation en Israël de Catholic Relief Services — U.S.C.C. pour distribuer à des institutions chrétiennes, catholiques et protestantes, les « food surplus » (excédents de vivres) américains dans le cadre du programme de la « nourriture pour la liberté », Food for Freedom Project.
(*) « Israel's Hour of Need and the Jewish-Christian Dialogue ».
(**) Clergy and Laymen Concerned About Vietnam.
Note. D'après les renseignements fournis par: John B. Sheerin, C.S.P., rédacteur en chef de The Catholic World (New York); l'Honorable Juge Harry Batshaw du Canadian Council of Christians and Jews (Montréal); Sr Yolan, N.D.S., de la Confraternidad judeo-cristiana (San José); Sr Batista, N.D.S., du Conselho de Fraternidade Cristâo-Judaico (SI:, Paulo); le Rév. W.W. Simpson du Council of Christians and Jews (Londres); Sr M. Despina, N.D.S. (Paris); le Prof. Theo de Kruijf du Katholieke Raad voor Israel (Utrecht); Joseph Stiassny, N.D.S., du Catholic Relief Services (Jérusalem).