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L'année 1492 a été marquée par des événements importants dont les conséquences furent immenses, imprévisibles, et particulièrement deux d'entre eux: la « découverte » de l'Amérique et l'expulsion des juifs (et plus tard des musulmans) d'Espagne: deux événements qui diffèrent certes, mais qui forment en un certain sens un tout et qui sont liés l'un et l'autre à la politique de puissance des souverains espagnols de l'époque.
En cette année 1992, le 500e anniversaire a été célébré ou [pour parler plus justement, du fait des ambiguïtés qu'il comporte] a été « commémoré » et le sera encore dans les mois à venir par toutes sortes de manifestations: tenue des Jeux Olympiques à Barcelone, de l'Exposition universelle à Séville ... et aussi visite du roi Juan Carlos à la synagogue de Madrid et grand rassemblement spirituel mondial, à Tolède d'abord du 4 au 7 mai, puis à Jérusalem etc... Pour le peuple juif, et particulièrement pour les juifs d'origine séphardite, la présence du roi d'Espagne à la synagogue de Madrid aux côtés du Président israélien Haïm Herzog, le 31 mars dernier, 500 ans jour pour jour après la promulgation de l'édit d'expulsion, et ses paroles où se manifestait si clairement le désir de la réconciliation ont été un événement de grande portée, chargé d'émotion. Emouvante aussi fut la cérémonie qui a eu lieu cinq jours auparavant à l'église Santa Maria la Blanca (l'ancienne synagogue de Tolède transformée en église, puis en musée), ou cours de laquelle l'Eglise catholique a exprimé, en la personne de Mgr Ramon Torrella Y Cascante, archevêque de Tarragone, son regret pour « ce qui a été fait aux juifs par les chrétiens » et, particulièrement, pour l'expulsion des juifs d'Espagne.
Pour les juifs séphardis, restés si extraordinairement fidèles au long des siècles à une culture et à une langue qu'ils ne voulaient pas perdre, les célébrations de cette année (en Espagne, Belgique, France, Italie, Turquie, U.S.A. etc...) apparaissent comme une juste reconnaissance de la contribution de leurs ancêtres à l'histoire de l'Espagne, et à celle des nombreux pays où les ont conduits les chemins de l'exil. Lea Sestieri, issue elle-même d'une famille juive catalane, nous donne dans son article un aperçu de la richesse de la culture séphardite et du drame que représenta l'édit d'expulsion. L'article de John Edwards, centré sur la personne de la reine Isabelle, nous fait mieux comprendre le contexte historique d'un tel édit, et aussi combien les démarches en faveur d'une béatification peuvent affecter le dialogue interreligieux. Quant à l'article de Sr Ionel, il donne une idée de l'immense travail qui se fait actuellement en Espagne dans le domaine des relations entre juifs et chrétiens.
On trouvera aussi dans ce numéro une rétrospective de Mgr P.F. Fumagalli sur 25 années de dialogue entre l'Eglise catholique et le judaïsme: un document de base précieux pour tous ceux qui font des recherches en ce domaine... mais dont la longueur ne nous a pas permis de rapporter ici certaines rencontres encourageantes qui ont eu lieu en divers pays, et particulièrement en Europe de l'Est. Ce sera pour une autre fois!