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L'idée de salut-redemption dans les traditions juive et chrétienne.
S. Bénédicte
Voila trois ans déjà qu'un groupe de 12 à 15 professeurs et théologiens d'Europe (France - Belgique - Hollande - Italie) se réunit à l'Abbaye de Maredsous — près Namur — pour deux jours et demi de travail et d'échange.
Le sujet du colloque est un thème biblique éclairé à la fois par la tradition juive et par la tradition chrétienne des Pères de l'Eglise, afin de permettre de dégager les analogies, la continuité, les points de divergence des deux traditions.
Cette année — après « le Royaume » — « le Peuple de Dieu » — « La Teshouva » — « La Shekina » — traités les années précédentes — le thème choisi fut: « L'idée de Salut-Rédemption ». La purification et la remise à jour de la théologie catholique dans sa formulation pour notre temps ne peut pas faire l'économie d'un ressourcement à l'Ecriture, c'est-à-dire à l'expérience du Dieu vivant exprimée en hébreu, et à son interprétation première dans la communauté juive qui en a perpétué le témoignage. C'est la conviction qui s'affirme déjà en conclusion de ces colloques.
Une publication en français des conférences et des interventions marquantes est prévue pour 1971.
Trois conférences étaient annoncées pour ouvrir les échanges. Elles furent assurées par l'Abbé Kurt Hruby, professeur à l'Institut Catholique de Paris et au Biblicum de Rome — le P. Ghislain Lafont, O.S.B., de l'Abbaye de « LaPierre-Qui-Vire » — et le R.P. Bernard Dupuy, 0.P., directeur du Centre Oecuménique «Istina».
M. le professeur Hruby présentait: « L'idée de Salut et de Rédemption dans la Tradition juive ». Il exposa les deux aspects du concept de « salut » dans la Bible hébraïque:
— Salut universel par Jugement de Dieu — confondu avec la reconnaissance de son Règne, après l'anéantissement des nations coupables, qui, elles, seront jugées et « sauvées », c.à.d. « recevront le joug du Royaume de Dieu ».
— Salut par Rédemption: dans la transformation de la nature, des rapports sociaux et des coeurs, par l'effusion de l'Esprit (Zach 1-8).
Le Professeur K. Hruby dévéloppa ensuite l'idée de médiation messianique et de libération concrète du peuple de Dieu par son Rédempteur.
Le Professeur Laffont traita du même sujet dans la Tradition des premiers siècles chrétiens, particulièrement chez Grégoire de Nysse.
Il constata que nous sommes plus héllénochrétienne du Salut, mais en donne une expression suffisamment riche, sinon complète.
C'est pourquoi il invita à un double travail de purification de cette expression par l'invention d'un langage de foi incarné dans une action et une culture actuelles, et par la référence à la première expérience juive.
Le P. Dupuy dégagea les aspects de la différence entre Judaïsme et Christianisme sur la notion de Salut, en précisant bien les deux démarches: transmission d'un enseignement de maitre à disciple — ou interprétation de textes traduits dès l'origine aspect de restauration, ou schème grec du Sauveur descendu du ciel, emprunté peut-être à la veine gnostique et apocalyptique.
Il invita à retrouver l'expression plus biblique du kérygme primitif: « qui croit au nom du Seigneur, sera sauvé », et à se souvenir que « le salut vient des Juifs ». Il souligna enfin l'accord profond, des deux côtés, sur l'impact de Dieu dans l'Histoire, et sur la réponse que peut lui donner l'homme aujourd'hui.
C'est pourquoi le thème choisi pour le Colloque de 1971 sera le rapport Révélation-Actualité historique, dans les deux Traditions.
Les échanges, variés et trop riches pour être résumés, aboutirent pourtant à un essai de définition plus biblique du Salut pour le chrétien d'aujourd'hui, qui fait sa place à l'effort humain et aux énergies « transhumaines », à une libération historique, prémices de la libération totale.
La référence au témoignage de la Tradition juive paraît essentielle pour comprendre le Dieu de Jésus-Christ et le projet auquel il invite l'homme à collaborer en partenaire de l'Alliance, pour accomplir sa Création.