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La section des jeunes cadres du ICCJ
Les Editeurs
La Section des jeunes cadres ou SJC (Young Leadership Section ) du Conseil international des chrétiens et des juifs (ICCJ) a été fondée par le ICCJ en 1983 pour promouvoir l’activité du ICCJ auprès des jeunes. Depuis, elle s’est étoffée et affermie au point d’apporter une importante contribution personnelle aux relations entre juifs et chrétiens. Elle rassemble des juifs et des chrétiens, aussi bien que des musulmans, de 18 à 35 ans, afin de faire cesser les conflits et les préjugés entre les religions et de faire avancer la réflexion sur des sujets intéressant les diverses communautés.
Il existe des groupes SJC officiels, animés par des bénévoles, en Australie, en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Israël, en Italie, aux Pays-Bas et aux Etats-Unis. Tout aussi importants sont les pays où la SJC n’est pas encore officiellement instituée, mais où des individus ou de petits groupes qui lui sont rattachés font connaître ses activités. Ces pays sont: l’Autriche, l’Egypte, la France, l’Irlande, la Jordanie, la Lettonie, la Lituanie, l’Autorité palestinienne, la Pologne, la Russie, la Slovaquie, la Suède, la Suisse et l’Ukraine. Soucieux d’instaurer entre chrétiens et juifs un dialogue plus dynamique, qui cherche à mettre en lumière les questions contemporaines intéressant nos communautés religieuses, aussi bien qu’à comprendre le tragique développement de l’antisémitisme dans l’ensemble de la chrétienté, ces jeunes adultes rassemblent effectivement leurs forces pour affronter les maux engendrés par le racisme et l’intolérance.
Officiellement créée lors de la Conférence du ICCJ à Montréal en 1987, la SJC a , depuis, tenu ses propres conférences à Paris (1989), à Birmingham (1991), en Allemagne (1992), à Jérusalem (1993), à Londres (1994), en Hongrie (1995), à Todtmoos, Allemagne (1996), à Rome (1997) et à Klingenthal, France (1998).
Par ailleurs, la SJC met actuellement en place un Forum abrahamique des jeunes, destiné à favoriser les contacts entre les juifs, les chrétiens et les musulmans en Europe et à nouer des liens avec divers groupes réunissant juifs, chrétiens et musulmans. On espère que les membres de la SJC originaires d’Europe et du Moyen-Orient pourront prochainement se rassembler pour une conférence en Europe. La SJC accorde une attention particulière au dialogue entre les juifs, les chrétiens et les musulmans au Moyen-Orient. Une réunion de ce genre s’est déroulée avec succès cette année à Chypre.
Quelques cadres de la SJC parlent au SIDIC
Lucia Faltin
Lucia Faltin travaille au Centre de la politique européenne de Bratislava, Slovaquie.Elle est actuellement présidente de la SJC.
La situation actuelle des jeunes en Europe centrale et orientale reste en grande partie déterminée par les quatre à sept décennies de totalitarisme, dont la portée et la force ont varié d’une région à l’autre. Les changements intervenus en 1989 et au début de 1990 ont non seulement ouvert de nouvelles possibilités mais aussi, compte tenu de ce qu’avaient été les régimes précédents, lancé de formidables défis. Les trois principaux consistent à procéder à la lecture de l’histoire, à définir l’identité nationale et à trouver une place dans l’évolution récente rapide du monde.
On affirme souvent que les jeunes d’aujourd’hui n’ont aucun lien avec le passé récent de leurs parents ou de leurs amis plus âgés sous les régimes totalitaires; or, tous vivent ensemble et revendiquent un certain bien-être. Il faut donc qu’ils partagent la responsabilité de la lecture de l’histoire de leur pays et de leurs compatriotes, même s’ils n’y ont apporté qu’une contribution minime, voire nulle. Ce besoin de lire l’histoire doit faire contrepoids à l’ignorance et au refus des jeunes et, pour le moins, au manque d’intérêt de leurs aînés. Or, le passé continue de jouer son rôle formateur, même en l’absence de participation individuelle concrète. Dans la plupart des pays d’Europe centrale et orientale, les structures et institutions de l’Etat reflètent toujours un stade embryonnaire de la pratique démocratique. L’engagement commun n’existe pas ou est, au mieux, une notion fort vague. On dit souvent que même ceux qui n’étaient pas bolcheviks ont appris à vivre comme s’ils l’étaient.
Les jeunes doivent affronter les profondes dichotomies entre les idéaux que l’on prétend officiellement concrétiser et la réalité d’un pluralisme limité, entre la citoyenneté et la pratique démocratique courante. Dans de trop nombreux anciens pays communistes, l’Eglise est restée immuable pendant des décennies, autrefois parce qu’elle manquait de moyens de communication et, aujourd’hui, parce qu’elle tient à garder au moins une partie du pouvoir acquis. C’est pour préserver cet élément de pouvoir que l’Eglise tend paradoxalement à collaborer avec les nationalistes ou avec d’anciens communistes dans le rejet de la démocratie. Il est souvent trop tard lorsqu’elle se rend compte qu’elle a une fois de plus simplement servi d’instrument à des fins autres que celles qu’elle envisageait. Dans d’autres cas, l’Eglise continue d’exercer son autorité, sans voir les mutations subies ailleurs dans le monde – le train manqué pendant les décennies de gel totalitaire. Tous ces phénomènes exercent une pression croissante sur les jeunes, les incitant à aborder le passé de leur pays, afin de comprendre sur quelle orbite ils se trouvent à présent. Malgré cette réticence à explorer le passé, sauf peut-être chez les juifs qui ont participé activement aux recherches concernant leur histoire ancienne et récente, il est urgent de lire l’histoire – d’en examiner aussi bien la face sombre que la face lumineuse.
Pour définir son identité, il faut, d’une part, lire l’histoire et, d’autre part, procéder à une analyse SWOT, c’est-à-dire réaliser un examen de nature à contrebalancer le complexe d’infériorité grandissant qui donne actuellement naissance à un nationalisme de plus en plus vif, lequel trouve trop rapidement ses boucs émissaires dans toute l’Europe centrale et orientale. C’est ce même nationalisme qui parvient si bien à recruter des membres parmi la jeune génération. L’Eglise, qui doit elle-même bien des fois lutter pour sa survie, est trop souvent en défaut lorsqu’il s’agit de fournir un filet de sécurité assez solide et des conseils assez éclairés à ceux qui recherchent des solutions dans cette situation confuse. Il est stupéfiant qu’elle se laisse d’abord abuser avant de s’ouvrir et de se joindre au combat pour la démocratie. Elle se contente souvent de suivre les nombreuses initiatives laïques. Le phénomène de la dissidence (mouvement clandestin religieux et laïque actif de l’ère communiste) revêt désormais un nouveau visage, souvent celui du martyre. Cette autoperception ne permet pas aux anciens dissidents de faire cause commune avec les contestataires contemporains. Dans l’optique qui est la leur, ces derniers ont trop peu souffert pour être dignes d’une reconnaissance pleine et entière. Telle est, semble-t-il, la base de l’opposition divisée au nouvel autoritarisme qui se manifeste dans la région. Il ne s’agit plus de prises de position civiles ou religieuses. Il s’agit de plus en plus du degré de souffrance subi dans le passé. Le rôle joué par la dissidence dans l’avènement de l’ordre nouveau à la fin des années 80 est indiscutable. Et pourtant, c’est à ces dissidents, au rôle qu’ils se sont attribué et notamment à leur refus de se mêler à la masse du peuple, aux “pécheurs”, qu’il faut attribuer, dans une certaine mesure, l’évolution récente. Et cela englobe aussi l’Eglise.
Pour prendre une part entière et particulièrement active aux transformations spectaculaires de l’Europe, surtout en cette période d’intégration sans précédent, il importe de relever avec succès les deux premiers défis et d’y répondre avec objectivité. C’est à cette condition seulement que l’on peut, en tant qu’individu et membre de la société, avoir l’assise nécessaire pour jouer un rôle et tenir une place dans les mouvements qui s’étendent sur toute l’Europe. Il s’agit de définir ses besoins et ses compétences, de discerner son devoir, pour aujourd’hui et pour demain, d’être prêt à prendre la responsabilité d’assumer ses propres choix – ce qui suppose l’accueil de la réussite aussi bien que de l’échec. L’Europe centrale et orientale et, en particulier, ses ressources humaines , que le passé récent et les remous actuels ont forgées de manière unique, constitue un défi pour l’ensemble de l’Europe dont elle fait partie intégrante, puisqu’elle représente une partie de sa conscience et un élément incontournable de sa sécurité régionale. Etant donné le rôle de l’Europe aujourd’hui et l’importance croissante que la réalisation de son intégration est appelée à lui donner, les questions qui se posent actuellement à l’Europe centrale et orientale ne concernent pas uniquement ceux vivent à l’intérieur de ses frontières.
Dr James Aitken
James Aitken effectue des recherches à la Divinity Faculty de l’Université de Cambridge, R.U. Il a été le dernier président de la SJC.
Le dialogue est un défi. C’est une tentative qui vise à franchir des barrières et à affronter “l’autre” avec honnêteté. Le défi est encore plus grand lorsqu’on rencontre non seulement quelqu’un qui appartient à une autre religion, mais quelqu’un qui vient d’un autre pays, comme au ICCJ. Les choses sont plus faciles, il est vrai, lorsque l’autre est de la même génération que soi et c’est ainsi que j’ai fait mes premières expériences de vrai dialogue avec d’autres jeunes, à des réunions de la SJC du ICCJ. Le défi n’était pas moins important, mais le fait de rencontrer des pairs ouvrait un espace à de nouvelles questions. Il garantissait aussi la possibilité de chercher de nouveaux moyens pour comprendre les différentes religions et établir des liens entre elles. Le défi consistait à soulever les questions qui paraissaient les plus pertinentes, même si elles étaient délicates ou douloureuses.
Dans le cadre de mes recherches universitaires, j’étudie l’histoire juive ancienne mais, contrairement à ce que supposent bien des gens, ce n’est pas pour cette raison que je me suis engagé dans le dialogue. Le dialogue est un enjeu contemporain et doit aborder les relations entre les individus et les groupes dans la société d’aujourd’hui. La SJC m’a impressionné, parce que ses membres s’intéressaient à diverses régions du monde, désiraient apporter une aide au nom de leur appartenance religieuse et, surtout, reconnaissaient l’individu. Il est facile de parler des communautés et de discuter de la foi des autres sans se soucier de la manière dont chacun vit et agit dans sa communauté. A la SJC, si les débats sont parfois acharnés (même s’ils se déroulent dans une bonne ambiance), c’est parce que l’on connaît l’importance des sujets et leur impact sur le vie même des gens. Entrer en dialogue avec des personnes d’horizons divers est une expérience vivante, une manière d’approfondir ses connaissances et d’affiner sa sensibilité, en participant à une théologie à la fois active et vivante. L’impression que je retire de certains des ouvrages et articles que j’ai lus sur les relations entre juifs et chrétiens est que l’on peut résoudre les problèmes de conflit entre les religions en apportant une explication historique et en reformulant la théologie. On peut, par exemple, replacer les paroles dures du Nouveau Testament dans leur contexte historique, afin d’éviter qu’on y voie une allusion aux juifs de tous les temps ou aux juifs d’aujourd’hui. C’est là un élément important, mais comment le concilier avec le fait qu’un texte religieux est, en quelque sorte, une entité vivante? Ce texte est lu et réinterprété par chaque lecteur et il n’est pas étranger à la manière dont la vie de la communauté s’organise, quelle que soit sa signification historique originelle. Il faut que nous trouvions de nouvelles clés pour en donner une appréciation et en expliquer le contenu si nous voulons tenir compte de la multiplicité de ses applications. Ce n’est que lorsque nous aurons pris acte de la manière dont il est réellement lu que nous pourrons commencer à influer quelque peu sur la lecture qu’en fait chaque personne et chaque communauté.
La passion du dialogue (on pourrait même parler de vigueur ou d’optimisme juvénile) au sein de la SJC reflète l’enthousiasme que l’on y éprouve pour le changement. Mais où espérons-nous opérer ce changement? Il est indispensable que le dialogue se poursuive à la base et engage des personnes qui ne sont ni des responsables religieux ni des théologiens spécialisés. Certes, l’ouverture manifestée par les enseignants et les dirigeants des communautés religieuses ne peut manquer d’exercer une influence plus vaste, mais cette évolution prend du temps et n’atteint pas toujours sa cible. Il faut mettre l’accent sur l’opportunité de constituer de petits groupes qui puissent travailler à partir des diverses situations locales et faire l’expérience concrète du dialogue, comme beaucoup ont pu le faire au sein de la SJC du ICCJ. En outre, le monde est en perpétuelle mutation et il nous faut aussi réagir à ces changements.
Regardons le monde d’aujourd’hui; les transformations spectaculaires qu’il a subies, même au cours de ma courte vie, ne peuvent qu’influer sur la manière dont nous concevons nos relations mutuelles et le contexte social dans lequel s’établissent les rapports entre juifs et chrétiens. La nature et la portée des changements intervenus depuis la fin des années 80 sont bouleversantes, qu’il s’agisse de la chute de l’apartheid en Afrique du Sud, de la disparition de l’hégémonie soviétique dans l’Europe centrale et orientale, de l’unification de l’Allemagne, de la fin de la guerre froide, du remplacement du rideau de fer par un “rideau d’argent” (c’est-à-dire une séparation économique entre l’Est et l’Ouest), de l’intégration rapide de la Communauté européenne ou de la désintégration de la Yougoslavie. En outre, les médias évoquent l’éternelle fragilité des accords de paix en Israël et en Irlande du Nord. C’est pourquoi il est encourageant de relever le sérieux avec lequel les jeunes s’engagent dans le dialogue au Moyen-Orient et l’hypothèse selon laquelle un travail analogue s’amorcerait en Irlande du Nord. C’est là un important message livré à notre génération: la religion peut être un facteur de réconciliation et non pas simplement un facteur de division.
Au milieu de tous ces bouleversements internationaux, on constate que l’Europe tend à devenir une “forteresse” qui se défend contre les immigrants et les réfugiés et que les nouvelles structures européennes tendent à créer une sorte de nationalisme pan-européen. Si nous avons retenu quelque chose de nos histoires respectives, le rejet des réfugiés et le moindre signe de nationalisme, si ténu soit-il, devraient nous apparaître comme de sinistres avertissements pour l’avenir. Dans cette nouvelle Europe, les préjugés religieux demeurent et ils visent non pas seulement (ni même peut-être principalement) les juifs, mais les musulmans. A l’heure actuelle, bien des jeunes placent nos relations avec l’Islam au coeur du dialogue. Puisque cette religion est l’une de celles dont la propagation est la plus large en Europe, nous devrions, au nom de notre engagement religieux, nous efforcer de la faire mieux comprendre, surtout lorsque tant de préjugés anti-islamiques semblent naître des milieux juifs et chrétiens. C’est, heureusement, ce qui se fait et, quelle que soit l’orientation que prenne l’Europe et le reste du monde, le fait que le dialogue lui-même se poursuive reste le plus grand espoir pour l’avenir.
Dr Dvora Ross
Dvora Ross est mathématicienne et élabore des programmes informatiques. Elle enseigne à l’Institut Yakar de Jérusalem et a fait partie du comité exécutif de la SJC.
Elevée dans la religion juive à Jérusalem, Israël, j’ai eu très peu de contacts avec des non-juifs. Mes parents accueillaient parfois des invités non-juifs, et nous avions aussi une femme de ménage et des ouvriers arabes mais, personnellement, je n’ai jamais vraiment eu d’amis non-juifs. Dans bien des écoles confessionnelles d’Israël, l’éducation est très ethnocentrique et c’est pourquoi notre scolarité ne nous a guère donné l’occasion d’apprendre ce que d’autres religions avaient à dire. A titre personnel, pourtant, je me suis toujours sentie attirée par ce qui est différent et j’ai toujours eu envie de comprendre les autres religions.
Mes rapports avec l’Europe et les chrétiens d’Europe sont plus compliqués. Mes grands-parents sont tous nés en Europe de l’Est et la plupart des membres de leur famille y ont été exterminés – avant, pendant ou après la seconde guerre mondiale – par les Nazis ou d’autres antisémites d’Europe orientale. J’ai passé mon enfance à écouter leurs récits et à lire des livres relatant l’histoire des juifs d’Europe – histoire faite de haine, de meurtres et de pogroms. La première fois que je me suis rendue en Europe en tant qu’adulte, je ne savais pas exactement à quoi m’attendre. Je ne savais pas si les Européens haïssaient toujours autant les juifs. A mon grand soulagement, non pas toutes mais la plupart des personnes que j’ai rencontrées n’avaient rien contre les juifs. Durant mon séjour, je me suis fait quelques amis non-juifs et, étant croyante, je m’intéresse vivement à l’aspect religieux de leur vie et de leurs traditions.
Voici quelques années, l’une de mes amies étudiantes m’a parlé d’un groupe de juifs et de chrétiens qui se réunissait en privé pour discuter de la religion. Très intéressée, j’ai commencé à participer à ces réunions. Malheureusement, les heures de réunion ne me convenaient pas et je ne pouvais pas venir souvent. Plus tard, lorsque j’ai entendu parler d’un groupe de jeunes juifs et chrétiens rattaché à l’Association interreligieuse israélienne (membre du ICCJ), je m’y suis jointe et ai participé très activement à ses réunions. Quelques mois plus tard, la Section des jeunes cadres du ICCJ tenait sa conférence annuelle à Jérusalem. Cette rencontre avec des jeunes croyants, originaires de toute l’Europe, m’a réellement inspirée. La conférence était fort intéressante et j’y ai noué de très profonds liens d’amitié.
Je me suis alors mise à participer plus activement à notre groupe local du ICCJ. Je suis allée plus souvent à des conférences du ICCJ et ai multiplié les rencontres. Par la suite, j’ai été élue au comité de la SJC du ICCJ et chargée de planifier et d’organiser moi-même les conférences. Chaque conférence a été pour moi une véritable expérience, faite de multiples rencontres, de multiples échanges, de multiples occasions de percevoir la diversité de l’expérience religieuse.
L’Association interreligieuse israélienne n’est pas réservée aux juifs et aux chrétiens; elle compte aussi parmi ses membres des musulmans et des Druzes. A l’origine, cependant, notre groupe de jeunes se composait surtout de juifs et de chrétiens. La plupart des chrétiens étaient des étudiants européens venus en Israël pour une ou deux années d’études. Les quelques participants arabes (chrétiens et musulmans) ne venaient pas très régulièrement. Au départ, c’était à mes yeux un avantage, car je m’intéressais davantage à un échange intellectuel qu’à un effort politique destiné à faciliter la compréhension entre juifs et arabes. Environ deux ans plus tard, nous avons tenté d’accueillir davantage de participants arabes. A l’époque, j’ai également participé, avec plusieurs autres membres du groupe, à la Conférence des jeunes du WRCP en Italie, qui avait une orientation politique beaucoup plus marquée. Nous avons recruté quelques arabes israéliens pour cette conférence, où nous avons également rencontré des arabes d’autres pays du Moyen-Orient. Nous avons immédiatement envisagé de mettre sur pied une conférence qui réunisse au Moyen-Orient juifs, chrétiens et musulmans, mais nous sommes heurtés à cet égard à bien des difficultés.
Dans l’intervalle, l’absence des musulmans aux conférences du ICCJ a suscité parmi nous un certain malaise. Il nous est arrivé d’inviter des musulmans “témoins”, mais les réunions restaient essentiellement destinées aux chrétiens et aux juifs. C’est alors que, pour la conférence de 1996, nous avons pu, grâce à une aide financière, inviter plusieurs délégués chrétiens et musulmans du Moyen-Orient. Le succès de cette aventure nous a conduits à créer le Forum abrahamique, instance qui compte des musulmans et dont les réunions font pendant aux réunions habituelles du ICCJ.
Ici, en Israël, nous avons établi des liens avec des organisations palestiniennes, ainsi qu’avec des groupes et organisations de pays arabes voisins. Nous cultivons nos relations avec eux. Nous organiserons prochainement une conférence du Forum abrahamique du Moyen-Orient afin d’aider les peuples du Moyen-Orient à se servir de leur religion pour mieux se comprendre.
Le conflit entre juifs et arabes étant à la fois politique et religieux, il est très difficile, dans nos réunions, de séparer l’aspect religieux de l’aspect politique. C’est là un grave inconvénient. Nous nous efforçons de nous en tenir à la compréhension mutuelle et la découverte de nos religions respectives, mais le dialogue glisse toujours très rapidement vers le terrain politique. Je reconnais que, personnellement, je crois de moins en moins à une solution purement politique. J’espère néanmoins que les rencontres personnelles faites au cours de ces réunions permettront aux intéressés de mieux se comprendre et d’établir entre eux de meilleures relations.
[Textes traduit de l’anglais par C. Le Paire]