Other articles from this issue | Version in English | Version in French
Présence d'Elie dans le Nouveau Testament
Jean Marc Pasquier
L'article de Jean Marc Pasquier montre combien le connaissance du judaïsme peut éclairer la lecture chrétienne de la Parole de Dieu. Nous ne pouvons malheureusement pas le reproduire en son entier, mais nous en retenons ici deux parties importantes, la 2e et la 3e, ainsi que la conclusion.
L'auteur, dans son introduction, suggère un lien entre Jésus, Elie, l'attente messianique juive et la souffrance du monde. Puis, dans la première partie, il montre la signification de la présence d'Elfe dans la tradition juive: il intervient aux « moments-clés » de l'Histoire du Peuple de Dieu; il est l'un de ces per¬sonnages bibliques qui « circulent dans l'espace et dans le temps... donnant sens à l'Histoire du salut, pour en souligner la continuité et la nouveauté ».
Signification de la présence d'Elie à la Transfiguration
Nous allons considérer les deux versets de Mt 17,11-12 et parallèles, et nous les situerons dans le contexte de la vie juive tout en utili¬sant la lecture midrashique à savoir, en éclairant l'Écriture par l'Ecriture elle-même.' Prolongeant ainsi la méditation de toute une communauté qui, face à des situations nouvelles, ne peut s'arrêter de puiser à la Parole de Dieu, nous découvrirons peut-être que l'espérance juive actuelle est d'une extrême importance pour une juste compréhension de notre espérance chrétienne.2
Ayant pris ici comme point de départ de notre réflexion quelques versets du récit de la Transfiguration, nous devons être attentifs à ce qui précède, justement pour bien situer la proclamation chré¬tienne au regard de la proclamation juive. Nous lisons en effet en Mt 16,13 et parall.:
« Or Jésus interrogeait ses disciples en disant:
Au dire des hommes, qui est le Fils de l'Homme?
Ils dirent: Pour les uns Jean Baptiste, pour d'autres Elie;
pour d'autre encore Jérémie ou l'un des prophètes.
Il leur dit: Et vous, qui dites-vous que je suis? Prenant la parole, Simon Pierre répondit:
Tu es le Messie (Mc 8,29) de Dieu (ajoute Lc 9,20), le Fils du Dieu vivant (précise Mt 16,16) ».3
Et les trois synoptiques rapportent qu'il commanda aux disciples de ne le dire à personne.' Suit une première annonce de la Passion, juste avant le récit de la Transfiguration, que nous allons maintenant suivre pas à pas jusqu'aux ver¬sets qui nous concernent plus particulièrement ici.
Luc commence son récit par ces mots: « Envi¬ron huit jours après ces paroles ». En Matthieu et Marc, nous lisons: « Six jours après ». Ainsi, dès les premiers mots, le texte qui nous occupe, parce qu'il est le seul du Nouveau Testament à faire apparaître Elie en personne, soulève une première question, qui peut être éclairée par la liturgie juive. En effet, en Mt 16,16, Pierre vient de proclamer le Nom de son Seigneur comme le grand prêtre à Kippour.5 Or un intervalle de 5 jours sépare Kip¬pour de Soukkot. N'est-ce pas déjà pour cette fête, de caractère messianique, que Jésus a amor¬cé sa montée à Jérusalem? 6 En parlant de 8e jour, Luc n'appuie-t-il pas, lui, sur le fait que cette montée est déjà accomplie? Pas absolument puis¬qu'il dit « environ », laissant là encore, (comme en 1,17 au sujet du rapprochement Jean Baptiste-Elie) une porte ouverte à l'interprétation.
Si nous consultons la Mishna, qui nous offre quelques indications sur le déroulement de la fête des Tentes avant 70, nous lisons en Soukka 6,1 que pendant six jours en doit se réjouir au son de la flûte et pendant sept jours faire la libation d'eau au Temple et vivre dans la soukka (ce à quoi peut effectivement faire allusion la demande de Pierre en Mt 17,4 et parall.).7
Le septième jour est appelé Hoshana Rabba (grand Hoshana). On y chante le Halle] pour la dernière fois de l'année, Soukkot étant la troisiè¬me fête de pèlerinage et l'ultime fête de l'année liturgique, la seule aussi à avoir un jour supplé¬mentaire, un « huitième jour ». Toutefois, avant 70, la fonction de ce 8e jour (Shemini) n'est que de clôturer (Atseret) cette ultime fête liturgique dont le caractère messianique et eschatologique est for¬tement souligné. Il est donc possible que les chif¬fres 6 et 8, ainsi que la mention des tentes, aient une signification propre au regard de l'accomplis¬sement de toutes choses dans le Christ.»
Donc, 6 ou 8 jours après la proclamation de Pierre,9 Jésus « prend avec lui Pierre, Jacques et Jean » (Luc met Jacques en dernier) et « les em¬mène sur une haute montagne » (Luc, plus solen¬nel, dit: « il gravit la montagne »). Ces quelques mots doivent être mis en relation avec la Thora, où nous lisons:
« Le Seigneur dit à Moïse:
Monte vers moi sur la montagne...
Demeure là et je te donnerai les Tables, et la Thora, et la mitzva.
Moïse monta vers la montagne.
Et la gloire du Seigneur monta sur la mon¬tagne du Sinaï,
et la nuée la recouvrit six jours durant.
Et Dieu appela Moïse pendant le septième jour,
du milieu de la nuée »."°
Alors, poursuivent les évangélistes, « Il fut trans¬figuré devant eux » (en Mt et Mc), ou plus sim¬plement: « l'aspect de son visage changea » (en Lc)." Et voici que leur apparurent Moïse et Elle qui s'entretenaient avec lui.12
Voici donc le contexte de l'apparition d'Elie dans le Nouveau Testament. Elle a lieu en rapport avec Moïse. Enlevés tous deux, bien que d'une manière différente, ils sont associés au feu de la Parole? Si, selon la tradition juive, Moïse a trans¬mis la totalité de la Thora, écrite et orale, dans le feu du Sinaï, Elie, lui, en dévoilera l'unité orga¬nique à l'accomplissement des temps, en rame¬nant le coeur des pères vers leurs fils, selon les dernières paroles prophétiques de Malachie:14
1. « Voici que je vais envoyer mon messager pour qu'il déblaie le chemin devant ma face...
L'ange de l'Alliance que vous désirez, le voici qui vient...
2. Qui restera droit quand il apparaîtra? Car il est comme le feu du fondeur et la lessive des blanchisseurs...
6. Moi, l'Eternel, je ne varie pas,
et vous, Israël, vous n'êtes pas un peuple fini...
Toutes les nations vous déclareront heureux...
12. Car vous serez un terre de délices...
20. Pour vous qui craignez mon Nom, le soleil de Justice brillera
avec le salut de ses rayons..
22. Rappelez-vous la loi de Moïse mon ser¬viteur
à qui j'ai prescrit à l'Horeb, pour tout Israël
des lois et des coutumes.
23. Voici que je vais envoyer Elle le prophète, avant que n'arrive mon jour grand et redoutable.
24. Il amènera le coeur des pères vers leurs fils
et le coeur des fils vers leurs pères...15
Le texte de la Transfiguration veut donc souligner qu'il se passe déjà, dans l'humaine condition de Jésus de Nazareth, quelque chose d'essentiel de ce mystère pascal que Dieu a commencé de réali¬ser avec son peuple, lors de la Libération-type de l'Exode; libération vers laquelle tend toujours le peuple juif parmi les autre nations, tendues elles aussi vers une Libération finale. Et c'est pourquoi ce récit anticipe déjà l'heure de la Résurrection (Mt 17,9) avant la mort de Jésus (v. 12). C'est ce qu'on ne soulignera jamais assez.
Il y a donc ici comme un ramassement de l'his¬toire en un point focal, ramassement suggéré par la présence de Moïse et surtout d'Elie. Si Jésus est ici en dialogue avec l'un et l'autre — qui peu¬vent représenter le début et la fin de toute libé¬ration, le commencement et la fin de l'histoire —cette focalisation du sens de l'histoire ne peut être figée en un moment donné du temps ni en un lieu précis, comme est tenté de le demander Pierre; c'est ce que souligne Mc 9,6: « il ne savait pas ce qu'il disait ». Or justement toute la suite du texte, si nous le lisons à la lumière de ce que nous avons dit jusqu'ici sur la présence d'Elie intervenant aux moments-clés de l'histoire du Peuple de Dieu, nous empêche de tomber dans le piège d'un fixisme qui détruirait le sens même de cette vision; une vision où Elle tient bien sa place: celle d'un « océan sans limites », selon la belle expression de St Jean Chrysostome?
Le retour d'Elie et la rédemption finale
C'est dans ce contexte que surgit la question des disciples: « Pourquoi donc les scribes disent-ils qu'Elie doit venir d'abord? » 17
Nous devons ici insister sur la réponse. en deux temps, de Jésus, en Marc 9,11-13 aussi bien qu'en Matthieu 17,11-12:
En Matthieu: « Certes, Elie vient (au présent) et il rétablira tout (au futur),
Mais, je vous le déclare, Elie est déjà venu ». Seulement, entre ces deux affirmations, nous lisons chez Marc:
« Comment donc est-il écrit sur le Fils de l'Homme qu'il doit souffrir beaucoup et être méprisé? » Interrogation primordiale pour qui se demande quel est le sens d'une attente « messianique » vécue dans la souffrance, entre les deux Avènements du Christ. Autrement dit, comment se fait-il qu'entre les deux avènements « méta-historiques » (d'une part la Transfiguration et la Résurrection de Jésus, d'autre part cette Résurrection et la résurrection finale pour le peuple juif) il y ait encore l'attente dans la souffrance? Cette question est liée à la façon même dont s'exprime Matthieu au sujet d'Elie « d'une part » (mèn)... « d'autre part » (dé). « D'une part, Elie vient et il rétablira tout D'autre part, je vous le déclare, Elie est déjà venu ».
Les évangélistes amorcent un essai de réponse au premier niveau (Jésus). Mais on sent poindre le rapport étroit qu'il y a entre le Fils premier-né d'entre les morts (Jésus) et le Fils premier-né attendant sa propre résurrection (Israël, selon Ex 4,22 et Rm 11,15).
Oui, quel sens a la souffrance de ce peuple que Dieu a appelé son « fils »? Le mystère de la souf¬france du Christ entre la Transfiguration et la Ré¬surrection ouvre une piste de méditation infinie sur le sens de la souffrance toujours présente, en premier celle d'Israël, mais aussi celle de l'Eglise et de tout homme, entre l'Avènement du Messie et l'accomplissement de cet Avènement.18
Suite à la réponse de Jésus, mais ne faisant plus partie de celle-ci, une polémique s'engage autour de la seconde partie de sa réponse: « Elie est déjà venu ». « Alors les disciples comprirent qu'il leur parlait de Jean Baptiste »? Polémique, car si Marc, et Matthieu plus encore, renforcent cet « Elie redivivus » en Jean Baptiste, Jean et surtout Luc évitent d'y mettre un point final.
En effet, Matthieu affirme (11,14), avec encore davantage de force puisque l'affirmation vient de la bouche de Jésus, que Jean Baptiste est Elie 20 Cependant nous lisons en Jean 1,21: « Es-tu Elie? Il répondit: Je ne le suis pas », et ceci dans la bouche de Jean Baptiste. Luc, de son côté. évite partout dans son Evangile cette identification défi¬nitive de Jean Baptiste avec Elie: dans son récit de la Transfiguration mais aussi dans l'annonce de la naissance du Baptiste (il sera « revêtu de la puissance d'Elie », mais non pas identifié à lui).21
Si, au regard de celui pour qui Jésus est le Messie, cet Elie-redivivus en Jean Baptiste est en¬core plus riche de signification que Elie-redivivus en Pinhas ou en Harbona,22 cela ne veut pas dire que le sens de cette dernière manifestation d'Elie soit épuisé. Au contraire, le silence de Luc, la dis¬cussion qu'il y a à l'intérieur même des Evangiles au sujet de ce rapprochement entre Elie et Jean Baptiste ne fait que renforcer le caractère parti¬culier, parce que inépuisable, de la manifestation d'Elie au coeur de la Transfiguration de Jésus, de son peuple et du monde.
Oui, la signification de la présence d'Elie en ce monde reste ouverte, tant il est vrai que la notion biblique d'accomplissement n'est pas épui¬sement, extinction ou dévalorisation, mais valori¬sation. N'est-ce pas à cause de ceux qui pourraient croire que, si Jean Baptiste est Elie, tout est fini, que Luc laisse la porte ouverte, comme le font concrètement nos frères juifs à chaque « Seder »? 23
On comprend d'autant mieux la crainte sacrée des disciples de Jésus lorsqu'ils sentent que la vision du Transfiguré, entouré de Moïse et d'Elie, peut leur échapper; en effet, sur cette terre, elle ne peut être que passagère: « Levant les yeux, ils ne virent personne, que Jésus seul » selon Lc 9,36 et Mt 17,8 — « avec eux » précise Mc 9,8. « Alors, tandis qu'ils descendaient de la montagne, Jésus leur défendit de raconter à personne ce qu'ils avaient vu ».
Elle, comme le Christ, n'en finit pas de venir
L'attente du retour d'Elie — précédant toujours la venue du Messie — est vécue intensément par le peuple juif dont la démarche, parallèle à celle du peuple chrétien, aide ce dernier à intensifier l'acuité de son regard sur le Christ passé et à venir. Le visage du Messie, essentiellement présent au coeur de tout homme, demeure temporairement caché, tant que Dieu ne donne pas à tous le « Olam ha Ba » (le monde qui vient). Et cela peut même aider les actuels disciples de Jésus à ne pas céder à la double tentation à laquelle certains chrétiens ne manquent pas de succomber, au regard de la continuité de la présence juive: l'euphorie ou l'apo¬logétique.24
Cette présence juive peut nous aider à ne pas falsifier la parole de Jésus lui-même en ne retenant qu'une partie de sa réponse aux disciples: « Elie est déjà venu »; car il a dit aussi: « Elie vient et rétablira tout ». Autrement dit, Elie comme le Christ lui-même bien que d'une autre manière, n'en finit pas de venir.
Ayant ainsi prêté attention à la signification de la présence particulière d'Elie au regard du Messie, nous pouvons peut-être mieux saisir la différence qu'il y a entre l'accomplissement et la plénitude de l'accomplissement, l'accomplissement de toutes choses dans le Christ et la plénitude de l'accom¬plissement du Christ dans le monde." En effet si, chrétiens, nous croyons que Jésus a ouvert les temps messianiques, nous savons que tout n'est pas accompli en nous. D'où le cri lancé au coeur de nos Eucharisties: « Maranatha », et le désir de nos frères juifs de voir Elie se manifester à nou¬veau à chaque circoncision, à chaque Seder, à chaque shabbat.26
Si, entre le « commencement » et « l'accomplis¬sement» de l'Avènement du Christ, les disciples de Jésus sont renvoyés au secret messianique, cela n'est-il pas une invitation à entrer dans le mouve¬ment amorcé par la présence « passagère » d'Elie: bannir toute peur dans la rencontre de l'autre en tant qu'autre? N'est-ce pas ce que suggère, on ne peut mieux, la présence d'Elie à côté de Jésus, en liaison étroite avec Moïse: il ne s'agit pas de confusion, de syncrétisme, encore moins de fusion, mais il s'agit de présence et de dialogue à propos de l'intrusion de Dieu dans notre monde qui ne peut jamais s'enfermer dans des catégories humaines.
Si, en St Luc, les deux grands témoins parlent avec Jésus de sa montée à Jérusalem, et si Mat¬thieu et Marc ne notent pas ce qu'ils disent, n'est-ce pas pour souligner que nous n'épuiserons jamais ce qui se cache dans la parole reçue du Dieu vivant, dans l'attente de la résurrection finale? 27
* Fr. Jean Marc Pasquier, franciscain, est licencié de Théologie et a étudié à Jérusalem, Il collabore actuellement à l'Equipe de Formation permanente pour adultes chrétiens dans la zone de Vienne (Isère).
1. Voir H. Riesenfeld: Jésus transfiguré. L'arriè¬re-plan du récit évangélique de la Transfiguration de N.S.J.C., éd. Ejnar Munks Gaard, Copenhague 1947; R. Le Déaut: « Actes 7,48 et Matthieu 17,4 à la lumière du Targum palestinien » dans Recher¬ches de science religieuse, LII. 1964, p. 87 ss.
2. On peut en effet se demander si, après Auschwitz, nous sommes dans la même situation que Paul. De toutes manières, nous nous trouvons devant une prise de conscience renouvelée face à la permanence d'Israël, prise de conscience de l'Eglise depuis Vatican II et non de groupes isolés.
3. Au sujet de ce titre voir: A. Descamps: L'Evan¬gile de Marc, Louvain, p. 529-571.
4. Mt 16,20; Mc 8,30; Lc 9,21. Parmi toutes les expressions de l'attente messianique juive, plu¬sieurs soulignent que le Messie demeure caché dans les cieux dès avant la création du monde, dans l'attente de sa pleine manifestation.
5. Le grand prêtre prononçait une fois par an le Nom divin en pénétrant dans le Saint des saints, et Pierre de même vient de reconnaître et de pro¬clamer Jésus comme « Fils du Dieu vivant ». Voir J.M. Van Cangh et M. Van Esbroeck: La Primauté de Pierre et son contexte judaïque, Louvain 1980.
6. Mt 16,21. Soulignons au passage que, en Jean 7,8, 9, la question de la messianité de Jésus se trouve franchement discutée dans le cadre de la fête des Tentes.
7. Voir « Rencontre » No 62 où P. Lenhardt, R. de Tryon-Montalembert et Sr Despina centrent leur réflexion sur cette fête: ces développements intéressent particulièrement les chrétiens vivant à l'intérieur ou à proximité d'une communauté juive célébrant cette fête dans un cadre exceptionnel.
8. Chez Lc 9,28; Mt 17,1; Mc 9,2. Il est à noter que, selon un développement qui est naturel, on superpose au 8e jour la fête de « Simhat Thora » (vers les VIle-IXe siècles) pour renforcer la « joie » que procure le « don de la Thora », déjà célébré à la Pentecôte, fête de clôture du temps pascal. En ce sens, il faut corriger J. Radermakers dans: Au fil de l'Evangile selon St Matthieu, éd. Institut d'Etu¬des Théologiques, Louvain 1972, Note 41, p. 223: Simhat Thora n'existait pas avant 70. Pour le reste, le commentaire reste essentiel.
9. On notera qu'à la fin de sa vie terrestre le Christ lance un appel à Dieu confondu par les audi¬teurs avec un appel au prophète Elie. Il y a en effet deux « auditions interprétatives » de cet uni¬que appel lancé par Jésus en araméen (citation du Ps 22,1), unique parce qu'il est le seul cri du Christ en croix qui nous soit rapporté par deux évangé¬listes. On peut entendre soit: Eli atah (« mon Dieu c'est toi » qu'on trouve dans tous les psaumes cités par les évangélistes à cette heure-là), soit Eliah tha (« Elie, viens! » selon l'interprétation iro¬nisante d'auditeurs qui savent qu'Elie a quelque chose à voir à l'heure de l'accomplissement); voir X. Léon Dufour: Face à la mort: Jésus et Paul, éd. du Seuil, Paris 1979, p. 160.
10. Ex 24,12 ss. In Miqraot Gedolot, Ibn Ezra, complété par Sforno, dit que les Tables représen¬tent la Thora écrite; la Thora, la Thora orale; et la mitzva, leur mise en pratique.
11. Mt 17,2; Mc 9,2; Lc 9,29. Ce dernier situe la manifestation de Moïse et d'Elie dans un contexte de prière, faisant ainsi la jonction entre ciel et terre. Le terme hébreu lehitpallel (prier) suggère l'attente d'un jugement divin, dont la réalisation sera la Pâque du Christ, préfigurée par sa Transfigu¬ration; mais la Résurrection du Christ n'illuminera tout l'univers que lors de la résurrection finale. Comparer à ce sujet Rm 5,10 et Rm 11, 12-13, com¬me le fait M. Remaud dans « Le Serviteur: Jésus et Israël » N.R.T. sept. oct. 1981 ou dans Chrétiens devant Israël Serviteur de Dieu, éd. du Cerf, Paris 1983, p. 43.
12. En Marc, Elie est nommé avec Moise. En Luc la vision a lieu entre le sommeil et la veille.
13. Voir 2 Rois 2, pour Elie; et Assomption de Moïse, pour Moïse (à laquelle fait sans doute allu¬sion Jude 8).
14. Notons au passage que, au regard du N.T., le dernier des prophètes est Jean Baptiste (ou Elie-redivivus en Jean Baptiste); mais il reste signi¬ficatif que la Vulgate termine l'A. T. par Malachie.
15. Ml 3. Comparer le v. 2a avec Mt 17,6 et 2b avec Mt 17,2, ainsi que le V. 6 avec Lc 1,48. N'est-il pas possible également de rapprocher cette finale de MI 3,24 du souhait de Paul aux Romains 11,11 ss jusqu'à: « Dieu a enfermé tous les hommes dans la désobéissance pour faire à tous miséricorde »?
16. In Hom. sur Elie 3: « Il est comme un océan sans limites... ».
17. Mt 17,10; Mc 9,11. Les scribes sont ceux qui lisent l'Ecriture à l'aide de la tradition orale dans le monde pharisien.
18. Peuple de Dieu réunifié, véritable résurrection des morts, selon Rm 11,15.
19. Mt 17,13.
20. Mt 11,14 a compris, à la lumière de MI 3, que la violence de l'intervention des deux prophè¬tes trouvait son dépassement dans l'appel au ras¬semblement, aussi bien pour Elie que pour Jean Baptiste.
21. Lc 1,17 avec la note de la TOB.
22. La tradition midrashique a identifié Pinhas ou Harbona à Elie. Voir Pircié de Rabbi Eliezer 47 et Targum Ps. Jon. sur Ex 6,18 et Nb 23,12. L'identifi¬cation d'Elie avec Pinhas est aussi connue d'Ori¬gène: P.G. 14,225.
23. L'accomplissement d'un événement, tout en le relativisant, en faisant de lui un événement se¬condaire, le met davantage en lumière et en révèle toute la force. Prenons deux exemples en ce sens, dans le judaïsme et dans le christianisme. Selon Tos. Ber. 1,10, la nuit messianique ne déracine pas la nuit de la sortie d'Egypte. De même la Parousie ne déracinera pas la Résurrection du Christ, mais la mettra davantage en lumière aux yeux de tous.
24. Quand ce n'est pas la polémique.
25. Je laisse aux spécialistes l'analyse qu'ils pourront faire en ce sens des mots hébreux: leqayem, lemalé, leshalem.
26. Maranatha peut être traduit par: « le Seigneur est venu » ou, selon la transcription grecque du N.T. (et la lecture traditionnelle qui en découle): « Seigneur, viens! ».
27. Ou de ce que nous, chrétiens, appelons la résurrection finale, et nos frères juifs le Olam ha Ba.